ENTRETIEN. Face aux défis fonciers et démographiques de la Guyane, l'aménagement est un enjeu critique. Denis Girou, délégué général de l'Établissement public foncier et d'aménagement Guyane, détaille dans une interview les solutions que déploie l'opérateur, bras droit de l'Etat.


Comment urbaniser un territoire recouvert à 90% par la forêt amazonienne, sans artificialiser et détruire les espaces naturels ? De l'autre côté de l'Atlantique, la question se pose. La Guyane est confrontée à une croissance démographique rapide, à une pression foncière et à la rareté des infrastructures. De grands défis d'aménagement se posent pour l'Établissement public foncier et d'aménagement (EPFA) Guyane. Son directeur général, Denis Girou, revient dans un entretien pour Batiactu sur les initiatives en cours et les perspectives de développement.

La Guyane connaît des problématiques foncières. Le territoire est recouvert à 90% par la forêt amazonienne et l'urbanisation ne représente que 0,01% du territoire. Quels sont les besoins urgents d'aménagement en Guyane ?

Denis Girou : La Guyane s'étend sur 84.000 km² [soit un sixième de la superficie de l'Hexagone, NDLR] mais son foncier n'est que très peu aménagé. L'agriculture n'occupe que 0,1% du territoire. La Guyane est passée de 30.000 habitants dans les années 1970 à 300.000 aujourd'hui, et la grande majorité de la population vit sur la bande littorale. Les infrastructures de base sont absentes, et le territoire vit depuis 20 ans une crise du logement.

 

Il y a une spéculation sur les loyers, certains atteignent 17 euros/m², alors même que la moitié de la population vit sous le seuil de pauvreté. Cela entraîne une suroccupation des logements. Les fonciers sont très chers à l'achat. Le logement illégal croît plus vite que le logement légal, à hauteur de 5,2% par an contre 4,7%. Le besoin démographique est de 4.000 à 5.000 logements par an et 2.000 logements par an sont produits aujourd'hui. Il faut aussi souligner que l'âge médian en Guyane est de 24 ans, et de 17 ans pour la ville de Saint-Laurent-du-Maroni. Imaginez le nombre de logements qu'il faudra produire pour répondre à cette démographie.

 

Le sujet de recyclage de friches industrielles et commerciales que connaît l'Hexagone n'existe pas en Guyane. Nous courons après les infrastructures de transport, de santé, d'énergie, d'éducation, de pénitentiaire et de logements. Quatre-vingt-dix pour cent des opérations d'aménagement que nous menons sont de l'extension urbaine.

Qu'a débloqué l'EPFApour répondre à ces enjeux ?

L'établissement public a engagé près de 40 millions d'euros sur des opérations de portage foncier, 24 millions d'euros sur le renouvellement urbain à Cayenne, Matoury et Saint-Laurent-du-Maroni, 10 millions pour des infrastructures de transport pour la communauté d'agglomération de Cayenne et 10 millions pour le compte de l'Etat, dans des infrastructures de transport également, dont des ponts et échangeurs. Il n'est pas question de remplacer les anciens, car il y en a très peu, mais d'en créer des nouveaux.

 

Notre objectif de production est de 1.500nouveaux logements par an. Mais qui s'occupe d'imaginer des zones d'aménagement concerté (ZAC) de 200 à 300 logements ? C'est un vrai sujet et aujourd'hui, personne ne le fait. La dernière consultation de ZAC a été réalisée il y a 15 ans. Le temps de l'aménagement est long et il est difficile d'anticiper. Il est estimé que la Guyane compte 40.000 logements illégaux.

 

Produire rapidement du logement ici est difficile car il faut
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