JUDICIAIRE. Damien Castelain, président de la Métropole européenne de Lille, sera jugé pour recel d'abus de confiance, dans l'affaire du marché de construction du Grand Stade de Lille par Eiffage, alors qu'il était vice-président.

Epilogue judiciaire en vue dans l'affaire du Grand Stade de Lille: le président de la métropole européenne, Damien Castelain, sera jugé pour recel d'abus de confiance, seul à comparaître dans ce dossier instruit depuis 2012 après une série de non-lieux. Elu en 2014 à la tête de la Métropole européenne de Lille (Mel), quatrième communauté urbaine de France avec 1,2 million d'habitants, reconduit en juillet 2020, Damien Castelain (divers droite) voit ainsi son horizon judiciaire s'assombrir, lui qui est aussi visé, dans une affaire distincte, par une enquête préliminaire pour détournement de fonds publics.

 

Il est soupçonné, alors qu'il était vice-président de la Mel, au tournant des années 2010, d'avoir bénéficié, en marge de la construction, par Eiffage, du Grand Stade, de plus de 17.000 euros de pierres bleues, matériau connu pour sa qualité, livrées via le constructeur, pour une terrasse personnelle. Ce volet de l'enquête avait fait l'objet d'une demande de supplément d'information du parquet en 2018. Il s'agit du seul dossier finalement retenu dans cette information judiciaire ouverte fin 2012 pour "favoritisme" et "faux et usage de faux".

 

"Il avait parfaitement conscience d'avoir bénéficié frauduleusement du produit de faits délictueux".
- le juge d'instruction

 

"En sa qualité de citoyen élu, particulièrement éclairé, [Damien Castelain] ne pouvait ignorer que ces pierres qu'il n'a pas payées avaient une valeur significative, que leur transport et leur livraison n'étaient pas sans frais", pointe le juge d'instruction Jean-Marc Cathelin dans l'ordonnance qui le renvoie devant le tribunal judiciaire, estimant qu'il avait "parfaitement conscience d'avoir bénéficié frauduleusement du produit de faits délictueux".

 

Stade ultramoderne

 

Au cours de l'instruction, l'élu a régulièrement assuré avoir payé ces pierres puis a fini par reconnaître "que c'était lui qui avait pris l'initiative de demander à bénéficier gratuitement de ces matériaux". Si ce volet de l'affaire n'est pas prescrit, tout le reste du dossier, portant sur des faits de corruption active et passive, de favoritisme, de faux et usage de faux et de trafic d'influence, ont abouti à des non-lieux, les charges étant jugées insuffisantes ou les faits prescrits.

 

Un ancien élu - Henri Ségard, ex-vice-président de la métropole - ainsi que deux anciens dirigeants d'Eiffage et deux fonctionnaires de la communauté, étaient mis en examen au côté de du président de la métropole, et bénéficient de ces non-lieux, tout comme l'ex-sénatrice PCF du Nord Michèle Demessine, témoin assistée. Pour la construction du stade, la communauté urbaine avait choisi Eiffage alors que son projet présentait un surcoût de 108,5 million d'euros, face à celui, plus classique, de Bouygues. Implanté à Villeneuve-d'Ascq et inauguré en 2012, le stade Pierre-Mauroy est une enceinte ultramoderne de 50.000 places où se tiennent principalement les matches du Losc, club de foot de Lille.

 

Elu avec le soutien de Martine Aubry

 

En 2014, l'élection de Damien Castelain, maire divers droite d'une petite commune, avait marqué la fin de la domination du Parti socialiste, aux commandes de la communauté urbaine depuis 1967. Le nouvel édile avait été propulsé à ce poste après un accord de programme avec Martine Aubry, présidente sortante, qui avait ainsi empêché l'UMP de s'emparer de la collectivité. Il y a été réélu en 2020, à nouveau grâce au soutien de différents groupes politiques, notamment des élus socialistes et de la maire de Lille.

 

"Il est temps que M. Castelain démissionne pour ne pas décrédibiliser l'institution dont il est le président", a estimé samedi sur son compte Twitter l'ancien candidat LFI à la mairie de Lille, Julien Poix. Damien Castelain fait aussi l'objet d'une enquête préliminaire pour détournement de fonds publics pour des factures notamment de parfums, services de bien-être et nuits en hôtel de luxe entre 2017 et 2018. Elles s'élèveraient à environ 11.000 euros, selon le site Médiacités.

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