AMÉNAGEMENT. Le député (Modem) de Haute-Garonne Jean-Luc Lagleize a rendu le 6 novembre 2019 son rapport au gouvernement pour la maîtrise des coûts du foncier dans les opérations de construction. Il se structure notamment autour du rééquilibrage de la relation propriétaire-acquéreur et lance de premières pistes pour freiner la spéculation, et pour une meilleure exploitation du foncier bâti.

Le foncier, pomme de discorde régulièrement affichée entre propriétaires fonciers et promoteurs immeubles, pourra-t-il être freiné dans son envolée, notamment en matière de coûts ? Le député Jean-Luc Lagleize, missionné en avril dernier par le chef du gouvernement, veut y croire.

 

Dans un rapport rendu mercredi au ministre du Logement Julien Denormandie, le député (Modem) de Haute-Garonne déploie une série de mesures visant à mettre fin à la rétention foncière ou la surenchère des prix, qu'elle émane d'acteurs privés ou publics. Au nombre de cinquante, les préconisations, pourront pour certaines se retrouver inscrites dans la loi, alors qu'une proposition de loi en ce sens sera examinée le 28 novembre prochain dans l'hémicycle du Palais Bourbon.

 

Dissociation entre foncier et bâti

 

Souvent attaqué comme un des paramètres favorisant la flambée des prix du logement, le foncier est souvent au cœur d'une lutte d'influences par le prix, nourrissant "l'engrenage infernal de la hausse des coûts du foncier" selon Jean-Luc Lagleize. Parmi ses principales préconisations, il propose de rééquilibrer ce jeu d'acteurs par une refonte du droit de la propriété : à commencer par la dissociation entre foncier et bâti, plus particulièrement dans les zones dites tendues où les organismes de foncier solidaire émergent peu à peu. Aujourd'hui dévolus à l'accession sociale à la propriété, Jean-Luc Lagleize appelle à élargir leur périmètre d'action.

 

Pour tenter de casser la machine inflationniste, le député estime que l'exemple doit aussi être donné par les pouvoirs publics, notamment l'Etat et les collectivités territoriales, quand elles portent la casquette de propriétaire foncier. En ce sens, il appelle à mettre fin à la vente aux enchères du foncier public, et de permettre aux élus d'accéder à une expertise privée pour estimer au mieux la valeur de leur terrain.
Les élus pourraient également inscrire dans leur plan local d'urbanisme (PLU) une fourchette maximale de prix par typologie de logement et par quartier, reprenant le modèle des chartes anti-spéculatives signées entre collectivités et promoteurs sur la base du volontariat. En contrepartie, les signataires pourraient bénéficier par exemple d'un bonus de constructibilité.

 

Observatoire du foncier obligatoire en zones tendues

 

Le rapport s'attarde aussi sur la "transparence" à instaurer du côté des acteurs privés intervenant dans l'acquisition de foncier. Dans une approche similaire à celle de l'Etat ou des collectivités territoriales, "les parties prenantes de la construction et de l'immobilier se plaignent de la cupidité des propriétaires mettant en avant leur foncier. Pourtant, ils alimentent eux-mêmes cette cupidité en renchérissant leurs offres pour obtenir une promesse de vente", regrette le parlementaire.

 

Pour servir cette "transparence", le rapport propose la création d'Observatoires du foncier, "obligatoire dans chaque zone tendue" et facultative dans les autres territoires. Il recenserait notamment les évolutions de prix, les "surfaces potentiellement réalisables par surélévation des immeubles" ou les "les friches urbaines".

 

Exploiter le foncier existant

 

Le rapport appelle aussi à exploiter ce foncier déjà bâti, en recensant les opportunités avant d'inciter les opérateurs à mener des opérations de surélévation ou de réhabilitation de friches. Alors que l'extension-surélévation est encore une opération délicate en zones tendues, Jean-Luc Lagleize déroule plusieurs mesures incitatives. Il s'agit notamment de prolonger l'exonération d'impôt sur les plus-values de cession d'un droit de surélévation ou de l'abaissement à une majorité simple des voix de copropriétaires pour autoriser une surélévation.

 

Pour accélérer la réhabilitation et la requalification de friches industrielles, le rapport s'oriente vers la création d'un "fonds national pour la dépollution des friches", et de mettre en valeur ce foncier public ou privé en instaurant "une agence de valorisation du patrimoine vacant de l'Etat", et de faire entrer les propriétaires privés dans le "capital des offices fonciers".

 

A travers la massification de la surélévation, le député Jean-Luc Lagleize s'attaque au délicat chantier de la densification qui peine encore à convaincre de manière unanime. D'autres mesures questionnent profondément le droit de la propriété, constitutionnellement sanctuarisé, et presque impossible à réformer. Jean-Luc Lagleize s'en défend, estimant que le droit de la propriété doit pouvoir "tenir compte de l'explosion insupportable de la spéculation foncière et immobilière" estimant, in fine, que le foncier détient une valeur "d'intérêt général".

actionclactionfp