Les professionnels du bâtiment ont particulièrement mal vécu la très forte hausse du prix de l’acier de ce début d’année. Mais pour Guy Dollé, président d’Arcelor, le premier sidérurgiste mondial, ces hausses «ont été bien trop faibles» en regard de ce qui va se passer au troisième trimestre.

"Il est clair qu'elles ont été bien trop faibles" a déclaré Guy Dollé au sujet des hausses de prix appliquées sur les six premiers mois de l'année. Au cours d'un dîner avec des journalistes, le patron du premier groupe sidérurgiste mondial a donc indiqué qu'il tablait sur une hausse du prix de l'acier au troisième trimestre 2004 supérieure à celle des deux premiers trimestres de l'année.
Le mois dernier, le numéro trois européen de la sidérurgie, Corus avait lui aussi annoncé une hausse de ses prix et l'allemand ThyssenKrupp prévoit lui aussi de relever ses tarifs indique l’agence Reuter.

Cette hausse des prix de l'acier s'inscrit dans la tendance actuelle qui touche l'ensemble des matières premières, et notamment le pétrole, au niveau mondial. Pour les professionnels du BTP, cela se manifeste par une très forte poussée des aciers et produits dérivés (ronds à béton, treillis, armatures, poutrelles, tubes et laminés), mais aussi du cuivre et même des produits plus locaux comme l’ardoise.
Difficile d’avoir une idée précise de cette flambée des prix, mais l’on peut affirmer sans se tromper que le fer à béton a augmenté de près de 75% depuis le début de l’année. "Sur une maison individuelle, le lot maçonnerie peut augmenter de 2%" explique Gérard Lemouzy, vice-président de la Confédération de l’Artisanat et des Petites Entreprises du Bâtiment (Capeb), chargé des affaires économiques.

Pour Guy Dollé, les hausses de prix constatées actuellement proviennent de l'explosion de la demande chinoise qui entraîne une hausse du cours des matières premières en général et du coke en particulier.
Effectivement, lorsqu’un pays de1,2 milliard d’habitants ouvre ses frontières - avec en plus la volonté de rattraper le retard perdu - cela ne peut que créer des déséquilibres. Ainsi, dans l’acier, les achats chinois sont passés de 50 millions de tonnes de minerai il y a 5 ans à 150 millions en 2003, alors que le marché mondial est de 515 millions.
Résultat : les pays producteurs de minerai - principalement l’Australie et le Brésil - ont du mal tenir ce rythme effréné, surtout d’un point de vue logistique. "Les ports de chargement sont saturés et les bateaux ne sont pas assez nombreux" expliquait dernièrement Guy Dollé. Selon lui, "le marché de l’acier est devenu fou. Nous n’avions pas connu une telle spéculation depuis 30 ans".

Plus grave, ces flambées de prix sont amenées à durer. "La situation inédite que nos professions doivent actuellement gérer repose sur des fondamentaux solides et non pas artificiels" a expliqué Joël Bellion, président de France Négoce Aciers, interrogé par la Fédération Française du Bâtiment. "Notre profession estime que nous n'assisterons pas à un inversement de cette tendance en 2004 et que la situation actuelle pourrait perdurer au delà" poursuit-il.

En effet, la Chine fait ses premiers pas dans la société de consommation et les années à venir devraient connaître un rythme de croissance sensiblement identique à celui d’aujourd’hui (environ 9%). Juste un chiffre qui donne une idée des besoins des Chinois : aujourd’hui, 0,3% d’entre eux possèdent une voiture (contre 70% en moyenne en occident) !

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