ANALYSE. Le 15 novembre dernier, un bâtiment de logements pour étudiants s'embrasait à Bolton (Royaume-Uni), sans faire de victimes. Outre-Manche, certains ont évoqué la responsabilité des panneaux HPL posés en façade. D'après des acteurs de la filière contactés par Batiactu, les risques liés à l'utilisation de ces produits sont strictement encadrés en France.

Le 15 novembre dernier, un bâtiment de logements étudiant s'est embrasé, à Bolton (Royaume-Uni), sans faire de victimes. Plusieurs observateurs ont évoqué, dans le déploiement rapide du sinistre en façade, la responsabilité des panneaux HPL (high pressure laminated) qui y étaient apposés. Qu'en est-il en France de l'encadrement réglementaire de l'utilisation de ces panneaux, qui semblent assez couramment employés ? "Il n'y a pas de mauvais produits, il n'y a que de mauvais cuisiniers", résume Serge Le Nevé, du FCBA, contacté par Batiactu. Autrement dit, si le produit est installé en respectant les règles de l'art de la sécurité, précisées dans le guide "Bois construction et propagation du feu par les façades", dont la dernière version, disponible ici, date de mars 2019 (la première de 2015). "Il est possible de concevoir une façade performante avec tout un panel de produits ; l'idée de ne mettre que des produits incombustibles pour les bâtiments de troisième famille, par exemple, n'est qu'une règle parmi d'autres", avance Serge Le Nevé.

 

"La qualité de ce matériau et sa réaction au feu sont parfaitement maîtrisées"

 

Les panneaux HPL, produits dérivés du bois, autorisés par le guide, sont classés "B", donc disposent à priori d'une résistance satisfaisante aux flammes. "Il s'agit de panneaux de fabrication industrielle, encadrés par une norme européenne", détaille Serge Le Nevé. "Nous sommes dans une technique bordée, avec l'installation de panneaux disposant donc d'une euroclasse B, dans le respect de l'instruction technique 249 sur les risques de propagation des flammes par la façade." Ainsi, en France, "la qualité de ce matériau et sa réaction au feu sont parfaitement maîtrisées". Le spécialiste rappelle également que des solutions existantes et validées font appel à des bardages en bois lames de bois massif en façades par exemple, des produits sans ignifugation conférée pourtant de performance en réaction au feu inférieur à celle du HPL précité. "Lorsque l'on utilise un matériau combustible en façade, on renforce les autres aspects pour assurer la performance de la façade", résume Serge Le Nevé. Cela passe par exemple par des bandes de recoupement d'isolant incombustible à intervalle régulier, l'installation d'obturateurs de lame d'air placés dans la cavité, de bavettes sous les fenêtres...

 

Des "compléments d'information" sur Bolton

 

Autant de contraintes de mise en œuvre qui n'ont probablement pas existé au Royaume-Uni ? Quoi qu'il en soit, d'après Stéphane Lambert, président du Syndicat national des bardages et vêtures isolées (SNBVI), contacté par Batiactu, le HPL pourrait ne pas être le facteur principal expliquant l'ampleur du sinistre de Bolton. Ainsi, s'appuyant sur "certains compléments d'information", il propose une autre hypothèse. "La façade en HPL n'aurait pas été un élément de propagation du feu. En effet, la façade du dernier niveau d'où semble provenir la source du foyer paraît plus fortement endommagée que les proches niveaux inférieurs."

 

 

Bien sûr, le président du SNBVI rappelle que seules les conclusions de l'enquête permettront de connaître avec précision les raisons du sinistre - et l'on sait que le comportement de divers matériaux de façade imbriqués les uns dans les autres, lors d'un incendie, est très complexe à analyser. "En l'espèce, les regards se tournent à ce jour davantage sur les éléments constructifs de la structure légère", continue Stéphane Lambert. "Très différents outre-manche de ce que l'on rencontre en France, on ne peut pas exclure que ceux-ci aient constitués des facteurs aggravants, qui auraient pu alimenter la puissance et la violence de l'incendie. En tout cas, on peut s'interroger quant à la capacité coupe-feu de cette structure légère, que les images présentent comme ayant été complètement mise à nue par l'incendie."

 

L'ITE, un "traitement fiable et pérenne"

 

Qu'en est-il de l'utilisation de ces panneaux HPL en France ? D'après le patron du SNBVI, recoupant les propos suscités de Serge Le Nevé, ils sont majoritairement classés B-s2,d0. "L'isolation thermique par l'extérieur, et particulièrement associée à un système de façade ventilée, reste donc un traitement fiable et pérenne", assure Stéphane Lambert. "Dans le détail, le guide de préconisations sur la protection contre l'incendie des façades rédigé par le SNBVI notamment, fixe les règles de mise en œuvre permettant d'assurer au mieux la sécurité des personnes occupantes."

 

Pour rappel, les pouvoirs publics ont récemment décidé, dans la foulée de l'incendie de la tour Grenfell, à Londres, de renforcer les exigences sur les immeubles résidentiels allant de 28 à 50 mètres, baptisés dorénavant immeubles de moyenne hauteur (IMH). Deux solutions sont proposées, nous rappelle Serge Le Nevé (FCBA) : soit le système de façade est classé A2-s3, d0 (A2 signifiant 'incombustible') ; soit un produit combustible est installé, mais il doit être alors protégé par un écran thermique et le système de façade doit faire l'objet d'une appréciation de laboratoire spécialisé.

 

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