DIPLOMATIE. Le soutien aux architectes à l'export est mieux organisé outre-manche, pointe l'Afex dans un rapport commandé par le ministère des Affaires étrangères. La France, deuxième en Europe dans le domaine, pourrait mieux mettre son réseau diplomatique au service de cette activité dont les enjeux économiques dépassent le métier d'architecte.

L'Afex, association des Architectes français à l'export, vient de livrer les résultats d'une étude qui dresse le bilan et les perspectives des performances des architectes français à l'export. Elle a été réalisée pour le compte du ministère des Affaires étrangères dans le cadre du Comarex (Comité interministériel pour l'exportation de l'architecture), relancé en 2021 par les ministères des Affaires étrangères, de la Culture, de la Transition écologique, et de l'Economie. Cette étude propose à la fois des données chiffrées et des analyses qualitatives et débouche sur une série propositions pour renforcer la présence des architectes français à l'international. Elle sera officiellement diffusée au début de l'été.

 

Lucie Courcet, autrice de l'étude, a rappelé des chiffres déjà connus : seulement 4,2% du chiffre d'affaires des quelque 30.000 architectes français est réalisée à l'export, une part en croissance constante cependant, puisqu'il était de 2,2% en 1992, et qui reste le fait d'un très peti nombre d'agences, puisque seules 2,6% des agences exportent. Il s'agit, explique l'autrice, "soit d'agences de taille importante, ayant une activité généraliste", parmi lesquelles ont trouve "les architectes stars, très bien identifiés mais très peu nombreux", soit de petites agences, sur des marchés de niche, tels que les établissements de santé ou les infrastructures de pointe.

 

Si les architectes qui travaillent à l'export apprécient "la possibilité d'exercer leur talent de manière plus libre", les agences françaises souffrent de plusieurs handicaps que tente d'identifier le rapport : problèmes de trésorerie et d'effectifs permettant de prospecter, mais aussi absence de stratégie, explique Lucie Courcet, entre défaut de ciblage géographique, de projection dans le temps, ou encore de comptabilité analytique.

 

"Monter une Riba à la française"

 

Les architectes français sont recherchés à l'étranger principalement pour les grands équipements, notamment culturels, ou des projets d'aménagement urbain durables, pour lesquels ils sont réputés. Les architectes français occupent la deuxième place du podium européen de l'exportation, derrière le Royaume-Uni, historiquement très dynamique (14% du chiffre d'affaires des agences se ferait à l'export). La structure de promotion et d'assistance à l'export, le Riba (Royal Institute of British Architects) paraît à l'Afex particulièrement efficace dans la réalisation de ses missions.

 

Madeleine Houbart, secrétaire générale de l'Afex, a pointé le besoin de "monter une Riba à la française", en faisant évoluer l'Afex pour en faire un véritable "centre de ressources sur l'export, avec diffusion systématique à tous les architectes des appels d'offre, formation à l'international, promotion de l'architecture, ou encore l'organisation de stages internationaux obligatoires".

 

Agir de concert avec le réseau diplomatique

 

Dans la même dynamique, le rapport préconise de "sensibiliser les agents publics à l'étranger" sur les enjeux de l'exportation de l'architecture française, et de promouvoir la diplomatie architecturale. Pour Brice Piechaczyk, vice-président de l'Afex, l'objectif est "d'activer tout le réseau diplomatique français qui est l'un des plus dense du monde, pour promouvoir l'architecture". L'Afex souhaite à l'avenir "coordonner [ses] incitations à la prospection avec la diplomatie". De ce point de vue, la réactivation du Comarex montre, selon lui, que "cette stratégie est connexe du plan de relance, parce que l'écosystème qui accompagne l'architecte a un poids économique important, vu le rôle prescripteur de l'architecte", et ce "en dépit du CA assez faible" de la profession proprement dite.

 

Parmi les autres préconisations du rapport, la secrétaire générale a relevé le besoin de "renforcer les liens avec Business France" et d'améliorer la coordination avec cette structure de promotion des entreprises françaises à l'export. Elle attend également beaucoup des VIE (volontariats internationaux en entreprise) dits "filière", qui doivent être lancés prochainement par le gouvernement, et dont la profession devrait pouvoir bénéficier. Enfin, l'Afex suggère de "développer les initiatives d'accueil de professionnels étranger dans des agences françaises et d'engager une réciprocité" : "c'est très intéressant", explique Madeleine Houbart, "pour pénétrer les marchés et mieux les connaître" ; et les architectes étrangers ayant travaillé en agences françaises "sont les meilleurs ambassadeurs de l'architecture française". De ce point de vue les architectes africains sont "la prochaine cible".

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