La Capeb Rhône et le Syndicat des artisans plombiers, zingueurs, couvreurs, chauffagistes du Rhône tirent la sonnette d'alarme sur l'explosion des ventes des matériaux du bâtiment sur internet. Les deux organisations pointent ainsi les dangers pour les utilisateurs mais aussi les répercussions pour les professionnels, particulièrement la question de la garantie pour laquelle la confédération du Rhône souhaite justement un ajustement de la législation. Décryptage.

Après les travailleurs détachés, un nouveau cheval de bataille pour la Capeb Rhône : l'explosion des ventes des matériaux du bâtiment sur internet. Lors d'un point presse tenu ce mardi 29 septembre à Lyon, Sylvain Fornes, président de la Capeb Rhône, et Arnaud Dromain, vice-président ont tiré de nouveau la sonnette d'alarme sur l'ampleur de ce phénomène, particulièrement dans le secteur de la construction.

Un plombier-chauffagiste sur deux estime que cette tendance le concerne directement

"Ce n'est pas nouveau, car cela dure depuis près de quatre ans, nous confie Arnaud Dromain, également président du Syndicat des artisans plombiers, zingueurs, couvreurs, chauffagistes du Rhône, qui représente 600 adhérents et près de 400 entreprises dans le Lyonnais. Il y a trois ans, notre précédente enquête révélait qu'un plombier-chauffagiste sur 100 se sentait concerné par cette évolution. L'étude de cette année montre que ce chiffre explose. Désormais, un sur deux estime que cette tendance le concerne directement."

Constat de l'explosion des ventes des matériaux sur Internet

Les chiffres parlent d'eux-mêmes : "En France, les ventes sur internet représentent aujourd'hui 57 milliards d'euros dont près de 10 % (soit 5,4 milliards d'euros) pour les seules ventes du matériel de plomberie et de chauffage, un chiffre en croissance de + 15% par an", détaille Arnaud Dromain.

 

Par ailleurs, ces derniers éléments chiffrés sont d'après lui plus inquiétants "lorsque l'on connait la montée en puissance des sinistres et lorsque l'on sait qu'ils ne seront pas couverts par les assurances dans la majorité des cas", ajoute-t-il.

 

Même si la Capeb Rhône et le Syndicat des artisans plombiers, zingueurs, couvreurs, chauffagistes du Rhône sont favorables à toute forme de "modernité et de commerce", insistent-ils, les deux organisations se retrouvent confrontées à la problématique de l'évolution du marché et de la qualité des produits au moment de la pose.

Conséquences économiques lourdes

En détails, les conséquences économiques s'avèrent lourdes pour les utilisateurs finaux, répète Arnaud Dromain, notamment lorsque les assurances ne peuvent pas jouer leur rôle.
"Par exemple, lorsqu'un artisan rencontre un problème de casse sur une barre de douche, dans ces cas-là on la change, indique-t-il. De même pour un chauffe-eau, soit on accepte la marchandise, soit on fait jouer l'assurance. A noter que l'artisan dispose d'une assurance décennale et de la responsabilité civile durant deux ans.

 

Pour rappel : l'ensemble des fabricants et industriels le stipulent clairement dans leurs conditions générales de vente : "Tout est garanti dès lorsqu'une installation est effectuée par un professionnel qualifié."

 

Dans leur argumentaire, les deux organisations artisanales rappellent que de "500.000 euros à un million d'euros de dégâts des eaux constatés chaque année sont dus uniquement à une douche défectueuse et génèrent au minimum 3 millions d'euros de réparation". Autres exemples cités : certains adoucisseurs peuvent rendre l'eau non potable ; tout achat doit être intégralement réglé avant livraison avec les risques que cela peut induire par la suite : défaut, fraude, erreur, et casse.

Vers un ajustement de la législation ?

De plus, un matériel de chauffage défectueux est susceptible de causer des accidents de grande ampleur. "En effet, le monoxyde de carbone demeure la première cause de mortalité accidentelle toxique, puisqu'un incendie se déclare toutes les deux minutes en France, ajoute-t-il. Et on constate chaque année une croissance des chantiers de rénovation interrompus pour des raisons de matériel imparfait, en provenance du net et fourni par le client."

 

Quelle est alors la conséquence directe pour l'artisan ? : "On risque de se faire attaquer par des clients sur des garanties pour des accessoires que l'on n'aura pas fournis mais installés", estime Arnaud Dromain. C'est pourquoi la Capeb envisage aussi d'agir sur les conditions générales de vente ou de faire changer la loi. "On veut modifier la jurisprudence de la biennale (Ndlr : la garantie de deux ans) pour aller dans le sens de l'utilisateur final, c'est-à-dire notre client, souligne Arnaud Dromain. Il propose donc une hausse de la durée de garantie de 2 à 5 ans, afin de lutter contre l'obsolescence programmée des produits." Et d'ajouter : "Si les consommateurs fournissent les matériaux pour les travaux, les professionnels ne doivent pas assurer la garantie s'il y a des problèmes."

 

 

Capeb Rhône et logo Capeb
Capeb Rhône et logo Capeb © Capeb Rhône.
Quels moyens pour y faire face ?
Parmi les actions enclenchées par la Capeb Rhône et le Syndicat des artisans, plombiers, zingueurs, couvreurs, chauffagistes du Rhône, une brochure intitulée "Mes travaux sur mesure"* a été éditée à 20.000 exemplaires à destination des particuliers listant ainsi toutes les questions qu'il est nécessaire de poser avant toute décision d'achat. "Et avant d'entériner toute commande, il est nécessaire de vérifier les frais de TVA et de livraison qui seront appliqués ; de regarder de près également les délais de frais et frais de retour pour les matériaux, endommagés ou non conformes à la commande", indique aussi la Capeb Rhône. Enfin, les deux organisations invitent tous les professionnels du bâtiment à réfléchir sérieusement sur ce sujet. Avant de reconnaître que de "nombreuses réunions ont déjà commencé avec les distributeurs et rendez-vous pris avec les principaux fabricants pour agir tant sur les délais de livraison, l'allongement des périodes de garantie (Ndlr : matériel et service après-vente), l'information, l'augmentation des compétences voire des qualifications."

 

"Lors des dernières Journées professionnelles de la Construction à Marseille, on a alerté la Capeb nationale et l'ensemble des régions, conclut la Capeb Rhône, s'inspirant beaucoup de la Fédération professionnelle allemande artisanale du bâtiment. On espère que notre mobilisation fera boule de neige à l'intérieur de la Capeb."

*"Mes Travaux sur mesure", disponible sur www.capeb-rhône.fr et infoachatweb@capeb-rhone.fr

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