Or, les collectivités à elles seules empruntent entre 16 et 18 Md€ par an, les hôpitaux empruntent, quant à eux, environ 4 Md€ par an. Le manque de liquidité pourrait donc atteindre 14 Md€. Par ailleurs, rien ne garantit que les banques ne diminuent pas à nouveau leur présence en 2013.

 

Après son fiasco, la restructuration de Dexia se fera sentir : en dehors de la question de la crise de liquidité, l'arrêt de la production de nouveaux prêts aux collectivités par la Banque Dexia aura des conséquences lourdes au premier semestre 2012. Le marché du financement des collectivités locales fonctionne actuellement avec un acteur en moins.
Le Gouvernement a annoncé qu'une enveloppe de 2 à 5 Md€ de crédit serait mobilisée sur les fonds d'épargne de la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC) à destination des collectivités locales, comme ce fut le cas, à la demande de l'AMF notamment, en 2011. Il est souhaitable que ces sommes soient débloquées au plus vite, dès lors que les collectivités élaborent actuellement leur budget 2012 et ont besoin de visibilité. Le budget est un document prévisionnel, il n'est donc pas nécessaire d'avoir l'accord écrit des banques pour prévoir des recettes liées à l'emprunt, qui sert à financer les investissements des collectivités locales. Pour autant, nous recommandons aux gestionnaires locaux de prendre dès à présent l'attache de leurs correspondants bancaires afin d'évaluer les possibilités de financement. Par ailleurs, il existe dans certaines caisses régionales de dépôts, un reliquat de l'enveloppe 2011 qui peut actuellement être mobilisé.

 

Enfin, il s'agit pour les élus locaux dans la réalisation effective des investissements, de s'assurer du financement bancaire et non pas de rechercher le financement a posteriori, pratique concevable à l'époque où la liquidité était très importante, mais risquée aujourd'hui.

 

Batiactu : Chiffres à l'appui, les résultats du baromètre financier 2011 des communes, réalisé par l'institut CSA, montrent que les investissements sont en baisse. Au premier rang : la voirie. Confirmez-vous cette tendance ? Et plus globalement, face à des demandes sociales fortes (logements sociaux) et à l'inflation des réglementations, les collectivités ont-elle encore moyen d'investir ?
Jacques Pélissard :
L'investissement des collectivités locales n'est pas linéaire. Nous ne disposons pas pour le moment de statistiques nationales sur le niveau d'investissement 2011, même si le baromètre financier des communes réalisé par l'AMF via l'institut de sondage CSA permet de dégager une tendance. Il est certain qu'à mi parcours du cycle électoral, nous devrions observer en 2011 une hausse des investissements et un pic en 2012. On peut craindre un ralentissement des investissements dès lors que les collectivités n'ont pas de visibilité sur les recettes notamment celles liées à l'emprunt. Les élus communaux et intercommunaux font preuve de prudence face aux incertitudes relatives à l'accès au crédit. Cependant, ils sont conscients de leur rôle moteur en matière de développement et de la nécessité de continuer à investir, dans un contexte de crise économique.

 

Par ailleurs, il est vrai que certaines collectivités à l'image du Conseil général du Jura, département dont je suis député et maire de Lons-le-Saunier, préfère cette année investir dans le Haut-Débit que dans les voiries. Ce sont ensuite des choix, des volontés des collectivités.

 

Batiactu : Lors de la conférence nationale des finances locales, en février à l'Elysée, l'Etat et les collectivités ont rencontré quelques désaccords sur la manière dont ces dernières doivent participer à la réduction de la dépense publique. Quels sont les désaccords et quels sont les avancées ?
Jacques Pélissard :
Nous avons précisé que les communes et communautés de France étaient particulièrement conscientes de la gravité de la situation économique et financière de notre pays et prêtes à apporter leur contribution à l'effort de maîtrise de la dépense publique, mais dans le cadre d'un véritable pacte de confiance entre l'Etat et les collectivités locales. Le pacte devrait être fondé sur un diagnostic, des objectifs et des politiques partagés.

 

Au-delà des questions de méthode de travail à mettre en place pour permettre un dialogue constructif, nous a souligné, au nom des associations d'élus du bloc local, les contraintes financières qui pèsent sur nos collectivités, le gel des dotations de l'Etat, la stabilisation des effectifs depuis 2009 - 2010, et la recherche d'une plus grande mutualisation grâce aux nouvelles dispositions sur l'intercommunalité.

 

L'AMF a également insisté sur l'impérieuse nécessité de préserver les capacités d'investissement des collectivités et de mettre un coup d'arrêt à la prolifération des normes législatives et réglementaires, faute de quoi la maîtrise des dépenses sera impossible.

 

Nous souhaitons surtout que cette conférence enclenche un processus régulier de rencontres entre l'Etat et les collectivités locales, sur l'ensemble des politiques publiques les concernant, et que s'instaure un véritable partenariat de confiance…

 

Découvrez en page 3 la suite de l'entretien de Jacques Pélissard, président de l'Association des maires de France

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