Cinquante ans après son appel du 1er février 1954, le discours de l’abbé Pierre reste toujours tristement d’actualité avec une pénurie de logement qui touche plus de trois millions de personnes en France. Face à ce constat, le gouvernement se veut optimiste.

"Malheur à nous, gens heureux", a déclaré dimanche soir l’abbé Pierre devant quelque 6.000 personnes rassemblées à Paris, devant le Trocadéro. "Vous qui possédez des locaux vides et habitables et réussissez à empêcher les réquisitions que permet la loi, vous qui, sur des terrains à bâtir, proches de votre domicile confortable, faites que soient refusés les permis de construire des logements sociaux", "malheur à vous, à nous, car beaucoup des nôtres agissent ainsi ..." a poursuivit l’homme d’église. Le fondateur d'Emmaüs a ensuite clairement demandé , "d'imposer aux élus et au gouvernement" une autre politique.

La réponse a été rapide... et au plus au niveau ! Après son discours, l’abbé a été reçu durant une heure à l'Elysée par le chef de l'Etat. Celui-ci s'est vu remettre le rapport de la fondation Abbé Pierre sur l'état du "mal-logement". Ce rapport souligne que si la situation n'est en rien comparable à celle de 1956, 3,1 millions de personnes vivent aujourd'hui des situations de précarité et dans des formes d'habitat qui relèvent de la survie.
Devant un tel constat, "la question des réquisitions a été abordée" a indiqué Martin Hirsch, président d'Emmaüs-France. "Le président de la République a indiqué qu'il comprenait, qu'il pensait effectivement que la réquisition était importante", a-t-il précisé.

L’abbé Pierre "a raison de tirer la sonnette d'alarme", avait déclaré mercredi le ministre du Logement Gilles de Robien. Il a promis "80.000 logements sociaux de plus en 2004" et a affirmé qu'"environ 58.000" avaient été bâtis en 2003 (ndlr : ce chiffre de 80.000 logements est contesté par la Fondation Abbé Pierre qui avance celui de 40.000). Reste que l'Institut français de la statistique (INSEE) évalue le besoin potentiel à 320.000 logements par an pour la période 2000-2004.

"Il y a un rythme de construction du logement insuffisant par rapport aux besoins, et à la démographie" malgré "beaucoup de savoir-faire" en matière de construction, a expliqué Gilles de Robien sur RFI. "Mon défi c'est de passer d'un rythme de logements sociaux de l'ordre de 50.000 dans les années passées à 80.000 en 2004". "Je suis sûr que les acteurs sociaux, les bailleurs sociaux vont être mobilisés" pour cet objectif, a avancé Gilles de Robien. Ce dernier souhaite en effet "donner de nouveaux moyens" en la matière car "les moyens classiques ont limité la construction de logement à un trop faible nombre".
Gilles de Robien a souligné qu'"en 2003, pour la première fois, on va dépasser les 20.000 logements sociaux en mixité sociale". Et le ministre d’ajouter qu’il ne veut pas "condamner des gens modestes à faire la queue des HLM pour être locataires" mais les "encourager à devenir propriétaires à un coup raisonnable"
"On est sur la bonne pente, sur la pente vertueuse", a conclu Gilles de Robien, "2004 sera une très grande année pour le logement".

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