C'est un mécanisme ancien mais peu connu. Un délai de deux ans peut être appliqué à la garantie décennale d'une durée de dix ans, conformément au code des assurances. Explications avec Me Rouquette-Térouanne du cabinet Cornet-Vincent-Ségurel.

« Il n'y a rien de nouveau », prévient d'emblée Maître Cécile Rouquette-Térouanne, avocat associé au cabinet Cornet-Vincent-Ségurel. Ainsi, l'arrêt de la Cour de cassation, en date du 19 mai 2016, fait état d'une rénovation immobilière pour laquelle le propriétaire avait découvert un défaut dans l'installation d'assainissement alors que près de dix ans s'étaient écoulés depuis la réception des travaux. Mais le temps qu'un expert détermine l'origine du défaut, le délai d'épreuve de dix ans était expiré et l'assureur dommages-ouvrage refusait de mobiliser sa garantie. Or, la Cour de cassation a estimé que dès lors que le sinistre était apparu dans le délai de dix ans, l'assuré disposait de deux ans pour demander à l'assureur de faire jouer sa garantie, au moyen d'une déclaration de sinistre et pour saisir la justice si l'assureur refusait de couvrir la réparation des dommages.

 

Cet arrêt, « qui n'a pas vocation à être publié », nous précise l'avocate, est conforme à la jurisprudence antérieure qui stipulait déjà que le maître d'ouvrage, bénéficiaire d'une assurance dommages-ouvrage, dispose d'un délai de deux ans à compter de la connaissance des désordres survenus dans les dix ans qui ont suivi la réception des travaux, pour effectuer la déclaration de sinistre à son assureur, de sorte que la garantie peut en réalité se prolonger sur douze ans.

 

Bouffée d'oxygène

 

Pour rappel, la garantie décennale couvre les propriétaires successifs d'un bien immobilier, pendant dix ans à partir de la réception des travaux, contre les vices et malfaçons compromettant la solidité du bâtiment, affectant l'un de ses éléments constitutifs ou d'équipements rendant l'immeuble impropre à sa destination normale. Or « vient se caler sur ce régime classique un mécanisme d'assurance qui prévoit une prescription biennale dans les deux ans qui suivent le sinistre, si celui-ci survient à l'intérieur de la période des dix ans de la garantie », nous précise l'avocate.

 

Ce délai supplémentaire de deux ans s'applique donc à tous les litiges entre le maître d'ouvrage et son assureur dommages-ouvrage. Le premier, dès lors qu'il a connaissance du désordre « de nature décennale », a deux ans pour faire une déclaration de sinistre auprès de son assureur. « Le mécanisme n'est ouvert qu'au maître d'ouvrage en sa qualité d'assuré à l'encontre de son assureur », insiste Me Rouquette-Tèrouanne. « C'est une bouffée d'oxygène pour le maître d'ouvrage, pour autant qu'il ait souscrit une telle assurance », conclut-elle.

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