RÉACTION. Les dernières annonces sur la Réglementation environnementale 2020 satisfont le Réseau français de la construction paille, qui met en avant le "calendrier ambitieux" ainsi que "le soutien affiché aux filières de matériaux biosourcés" contenus dans le texte. Sa mise en oeuvre dépendra toutefois, d'après l'organisation, d'une hausse des moyens publics affectés au développement de ces segments et de la mise en place d'autres mesures spécifiques.

Les constructeurs paille s'inscrivent, sans grande surprise, dans le camp des partisans de la Réglementation environnementale 2020, dont les derniers arbitrages rendus par le Gouvernement consacrent une place de choix à l'électricité, au bois et plus largement aux matériaux biosourcés. Saluant "le retour d'un État stratège", le Réseau français de la construction paille (RFCP) se félicite ainsi du "calendrier ambitieux" et des orientations globales du texte qui permettront, selon lui, de réduire l'impact écologique des futures habitations et de les rendre plus agréables à vivre.

 

 

La confiance n'excluant pas le contrôle, le secteur précise néanmoins qu'il restera vigilant quant à la mise en oeuvre de la RE2020, et lance un appel plus global aux pouvoirs publics : pour parvenir aux ambitions proclamées dans le texte, "les moyens affectés [...] au développement des filières biosourcées devront changer de dimension et largement dépasser les niveaux actuels". Tout en se disant prêt à collaborer avec les autres acteurs de la construction, le RFCP assure qu'il rassemble "des acteurs de terrain peu enclins au secret industriel et résolument engagés dans des démarches ouvertes faisant une large place aux partages et aux savoir-faire".

 

L'Hexagone parmi les pays les plus à la pointe dans les constructions biosourcées

 

Pour les professionnels de la construction paille, l'atout premier des matériaux biosourcés réside dans leur capacité de captation puis de stockage du dioxyde de carbone (CO2) dans les sols (par le biais des racines) et dans les composants eux-mêmes. Mais l'enjeu de la mouture actuelle de la RE2020 serait encore plus large : les filières tricolores spécialisées dans les constructions biosourcées étant, d'après le RFCP, "parmi les plus avancées dans le monde", la mise en oeuvre du texte assurerait une certaine valorisation des savoir-faire et un renforcement des métiers du bâtiment. "La France est incontestablement leader européen de la construction de bâtiments écologiques contemporains à base de matériaux peu transformés, grâce notamment à la vitalité de ses organisations professionnelles qui disposent d'un savoir-faire reconnu internationalement, de référentiels techniques et pédagogiques solides et éprouvés, d'entreprises et de concepteurs compétents", avance l'organisation dans un communiqué.

 

Pourtant, qui dit hausse de l'utilisation de biosourcés (comme la paille) dans le bâtiment dit logiquement hausse de la production agricole en amont. Sur ce point, la filière tient à rassurer, en affirmant que les exploitations agricoles françaises sont en mesure de produire "massivement" des matériaux destinés à la construction et de maintenir, en parallèle, la production destinée à l'alimentation. Et les spécialistes de citer un exemple, en expliquant que la production céréalière est "concomitante" avec celle de paille : "La ressource est disponible (aujourd'hui, 40% de la paille retourne au sol en fin de moisson). Il suffirait de mobiliser 5% de la paille produite pour construire chaque année la totalité (400 à 500.000) des logements individuels et collectifs neufs de notre pays." Le confort estival comme hivernal serait par ailleurs garanti avec les biosourcés qui, conjugués à une conception bioclimatique et sobre des bâtiments, permettraient de faire sortir de terre "au prix moyen du marché des bâtiments passifs voire à énergie positive". Un aspect qui aurait été "un peu oublié" dans la version actuelle de la RE2020, alors qu'il présenterait des atouts dans la lutte contre la précarité énergétique et dans la relance des territoires.

 

Relever progressivement et avec ambition les niveaux de performances énergétiques des bâtiments neufs et rénovés

 

 

En revanche, le recours massif à la biomasse comme source d'énergie ne serait pas une piste à privilégier pour les constructeurs paille, qui alertent sur le risque d'explosion des prix des coproduits agricoles et forestiers qu'il pourrait engendrer. "Sortir de l'âge du feu ne consiste pas à se contenter de remplacer les ressources fossiles par d'autres renouvelables mais exige de donner la priorité à la sobriété énergétique", souligne le communiqué. La filière demande de fait à la puissance publique de relever progressivement et avec ambition les niveaux de performances énergétiques des bâtiments neufs et rénovés, de sorte à éviter le gaspillage ainsi qu'une "concurrence mortifère entre filières". Dans cette optique, le concept d'analyse du cycle de vie dynamique simplifiée représenterait un premier élan encourageant, qui pourrait toutefois aller encore plus loin aux yeux du RCPF. Les pistes de réflexion proposées par ce dernier tablent sur une simplification de la réglementation thermique, une amélioration du noyau de calcul réglementaire et une publication en open source.

 

Enfin, la dernière mise en garde des constructeurs paille concerne les paysages des territoires français, cible selon eux de "décennies de constructions désincarnées et standardisées [qui] ont massacré nos terroirs, nos villages et nos villes". D'où une nécessité, via une éco-conception et une éco-construction utilisant des matériaux locaux (terre crue, pierre, bois, paille, chanvre, lin, chaume...), d'élaborer "une nouvelle architecture vernaculaire", chargée de "réenchanter" les paysages.

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