SOCIAL. La carte d'identification du BTP est en passe de concerner l'ensemble des salariés travaillant dans le secteur de la construction, nous informe la Direction générale du travail. Seul hic : de nombreux travailleurs détachés n'en disposent pas encore. Seulement 68.000 sont concernés.

D'après les derniers chiffres communiqués par la Direction générale du travail (DGT), la carte d'identification du BTP, créée pour faciliter les contrôles de l'inspection du travail dans le cadre de la lutte contre le travail illégal, a été distribuée, ou va bientôt l'être, à près de 1,3 million de salariés en France (1.281.110 exactement). "Le nombre de cartes délivrées depuis huit mois est à mettre en regard avec les 1,145 million de salariés que compte le BTP", précise la DGT. Un peu plus de 100.000 entreprises ont fait des demandes de carte.

 

"Toutes les personnes qui travaillent sur des chantiers, y compris les salariées détachés et les salariés intérimaires, doivent être titulaires de la carte du BTP", rappelle la DGT. Un QR code permet aux inspecteurs, via un smartphone, de savoir si le salarié concerné est bien "rattaché ou lié" à un employeur.

 

68.728 cartes délivrées à des salariés détachés

 

Toutefois, un chiffre communiqué par la DGT pose question : 'seulement' 68.728 cartes ont été délivrées à des salariés détachés. Or, d'après les statistiques officielles publiées en février 2018, ils étaient 122.420, dans le BTP, a intervenir en France en 2017. A noter que ce chiffre ne concerne que les travailleurs détachés ayant été déclarés sur la base de données officielle Sipsi. Ainsi, en supposant que le nombre de salariés de ce type, en 2018, soit comparable à celui de 2017, au moins un sur deux ne dispose pas de la carte BTP, alors qu'il le devrait. Sans compter les salariés détachés qui ne sont pas même déclarés sur la base Sipsi. Pour rappel, ce sont aux entreprises de faire le nécessaire pour déclarer ce type de salariés et effectuer les demandes de carte d'identification (via le site dédié cartebtp.fr).

 

 

L'amende encourue en cas de fraude est de 2.000 € par salarié en plus des sanctions prévues pour travail illégal ou fraude au détachement. La DGT nous informe d'ailleurs qu'au premier trimestre 2018 plus de 8.000 contrôles ont été menés. "Les contrôles conjoints, notamment avec l'Urssaf, se multiplient." Pour rappel, en 2017, 1.034 amendes ont été émises en recouvrement pour un montant de 5,9 millions d'euros, et 16 fermetures temporaires d'établissement.

 

"La carte BTP est la première chose que les inspecteurs demandent"

 

"La carte BTP se diffuse relativement bien, et c'est en effet la première chose que les inspecteurs du travail demandent sur le terrain", réagit Patrick Liébus, président de la Capeb, auprès de Batiactu. Toutefois, le patron des artisans du bâtiment s'inquiète de voir peu d'affaires finir en justice, et peu de condamnations. "Il semblerait que cela n'aille pas toujours au bout", constate-t-il. "Nous nous posons donc la question : est-ce que les sanctions sont à la hauteur ? Est-ce que les contrôles sont suivis d'amendes administratives ?" Patrick Liébus estime par ailleurs que les acteurs ne sont pas assez conscients des risques encourus. "Il faudrait deux ou trois cas de condamnations exemplaires, avec un affichage des sociétés concernées", explique-t-il.

 

Les noms des entreprises sanctionnés bientôt rendus publics ?

 

C'est d'ailleurs l'une des nombreuses mesures annoncées en février dernier par le Gouvernement : rendre publiques les noms des entreprises sanctionnées pour travail illégal, en instaurant le 'name and shame', déjà en vigueur en France en matière de retards de paiement. Ce dispositif est censé être annoncé dans le cadre d'un projet de loi 'Fraudes', qui n'est toujours pas à l'ordre du jour. Les pouvoirs publics envisagent également de permettre à une Direccte de suspendre une prestation de services internationale sans avoir à ouvrir des poursuites pénales, d'élargir les pouvoirs des inspecteurs du travail ou encore de créer un service national d'enquête au sein de l'Acoss.

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