Un mois après les premières fuites, le député PS Laurent Grandguillaume a remis à Sylvia Pinel et Fleur Pellerin, son rapport sur l'entrepreneuriat individuel. Salué par Matignon et par les fédérations d'auto-entreprises, il reçoit un accueil toutefois mitigé des professionnels du bâtiment. Explications.

Depuis plusieurs semaines, Laurent Grandguillaume n'avait qu'un seul but : simplifier le régime de l'auto-entrepreneur. Un pari en passe de réussir, qu'il a présenté ce mardi après-midi aux ministres de l'Artisanat et des PME, Sylvia Pinel et Fleur Pellerin.

 

Il y a un mois environ, certains points de son rapport avaient été ébruités dans la presse. Il y était question de créer un statut unique de l'entreprise individuelle, qui rassemblerait l'EIRL, l'EURL, l'EI et la SARL. Cela devait impliquer que tous les cotisants au régime social des indépendants (RSI) soient sur la même bannière. Il préconisait alors la fusion du régime fiscal et social de l'auto-entreprise et de la micro-entreprise. Enfin, la Cotisation foncière des entreprises (CFE) devait être étendue à tous. Et bien d'autres pistes encore à venir, nous avait confié l'entourage de Sylvia Pinel.

 

Des mesures "qui vont dans le bon sens"
Ce mardi soir, les conclusions du rapport sont les suivantes : la réflexion sur la création d'un statut juridique unique sera bien examinée par les ministères, "au travers d'un groupe de travail constitué début 2014". Une réforme du cadre fiscal et social sera elle aussi bien à l'ordre du jour, tandis qu'une large concertation aura lieu en matière de prélèvements fiscaux et sociaux, indique le ministère de Sylvia Pinel dans un communiqué. Pour autant, cette volonté d'une réflexion basée sur la simplicité, la lisibilité, l'équité et la fluidité du parcours de l'auto-entrepreneur - qui rejoint bien des points du projet de loi que présentera Sylvia Pinel fin janvier 2014 - ne satisfait pas entièrement le secteur de l'artisanat.

 

Si certaines mesures préconisées par les acteurs du bâtiment ont été reprises dans le rapport, à l'instar du contrôle des assurances ou le stage préalable à l'installation, d'autres comme l'abaissement des seuils de revenus pour ceux qui exercent une activité complémentaires ne sont pas mentionnés. Là encore, le débat aura lieu avec le ministère, qui lui souhaite une politique plus incitative en proposant notamment de l'accompagnement.

 

Le bâtiment mi-figue, mi-raisin
"Les conditions d'une concurrence loyale ne sont pas réunies", a estimé la Fédération française du bâtiment, à la lecture du rapport. Si elle salue des mesures "qui vont dans le bon sens" comme la suppression de la possibilité d'être auto-entrepreneur sans chiffre d'affaires ou la réintégration de cotisations dans leurs charges, elle regrette néanmoins que le bâtiment n'ait pas un traitement spécifique. Entre autres sur les moyens de contrôle de l'activité des auto-entrepreneurs, mais aussi sur l'incohérence d'un régime juridique qui, à la fois, prône la création d'entreprise et la recherche de revenus d'appoint pour certaines catégories de personnes.

 

De son côté, Patrick Liébus, président de la Capeb, considère que ce rapport "part d'une bonne intention". Mais ce qui l'inquiète davantage, c'est le délai de mise en place des mesures qui risque d'être très long. "On aurait pu espérer que le texte de loi de Mme Pinel accélère les choses. Mais vu qu'il ne sera présenté qu'en février prochain, puis suivi d'une période où il ne se passera rien, élections obligent, ça ne bougera qu'en septembre ou octobre 2014", analyse-t-il. Une idée partagée par l'Union professionnelle artisanale (UPA) qui reconnaît des "axes de travail intéressants", mais qui "n'apportent de solutions ni immédiates ni suffisantes". L'organisation patronale accueille avec satisfaction la recommandation qui vise à séparer les revenus du chef d'entreprise (IR) et les bénéfices de l'entreprise (IS), mais constate que "les sources essentielles de concurrence déloyale demeurent".

 

Quoiqu'il en soit, les deux organisations du secteur du bâtiment maintiennent fermement la revendication d'exclure le bâtiment du régime de l'auto-entrepreneur, comme ils le souhaitent depuis l'instauration du dispositif. "Voire l'exclusion des professions réglementées, comme les métiers de bouche ou de services", renchérit Patrick Liébus. Les concertations à venir s'annoncent encore mouvementée…

 


Les principales mesures attendues par le Bâtiment
- Abaisser les seuils de chiffres d'affaires
- Contrôle des indemnités journalières perçues par les AE qui n'ont pas d'activité
- CFE pour tous
- Immatriculation au répertoire des Métiers
- Stage préalable à l'installation
- Qualification pour toutes les professions réglementées
- Contrôle des assurances

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