Le séisme, qui a ébranlé Alger et sa région le 21 mai détruisant des milliers d'habitations, va sans doute compliquer la crise de logement, déjà chronique, dans ce pays où la demande, depuis une vingtaine d'années, n'a cessé de croître en raison d'une forte démographie.

Même si le bilan définitif du tremblement de terre n'est pas encore établi, la demande va rester très forte eu égard à l'ampleur des dégâts: d'Alger à Tizi-ouzou (100 km à l'est d'Alger), aucune localité n'a été épargnée par les destructions, une zone qui connaît la plus forte concentration de population en Algérie.

Le département de Boumerdès, le plus affecté par le séisme qui a fait plus de 2.200 morts et près de 10.000 blessés, comptait à lui seul près de 700.000 habitants en 1998, selon le dernier recensement.
Le département d'Alger comptait, selon ce recensement, plus de 2.500.000 habitants, dont près de 300.000 dans les communes sinistrées de Rouiba, Réghaïa, Bordj-El-Bahri, Aïn-Taya, Héraoua et Bordj-El-Kiffan.

Avec la catastrophe qui vient de frapper cette région, ce sont des dizaines de milliers de candidats qui vont s'ajouter aux listes des demandeurs dans ce pays où le déficit de logements est évalué à 1.000.000 d'unités, selon les chiffres officiels.

Des centaines de logements neufs, ou en voie d'achèvement, construits dans le cadre d'un programme de relance économique mis en oeuvre en 2001 par le président Abdelaziz Bouteflika, se sont effondrés au grand désespoir de familles auxquelles ils étaient destinés.

Le ministre de l'Habitat a annoncé lundi qu'un "stock" de 3.000 logements était "disponible" à Alger et Boumerdès pour le relogement des sinistrés. "Ces logements seront atribués aux vrais ménages sinistrés, mais nous ne connaissons pas le nombre exact de citoyens victimes de la tragédie, nécessitant un logement et pour le moment il n'y a pas de statistiques fiables", a-t-il admis.

Déjà, en novembre 2001, le gouvernement avait mis des mois à reloger les victimes des inondations meurtrières qui avaient frappé le quartier de Bab-el-Oued à Alger. Certaines ont d'ailleurs été frappées à nouveau à Bordj-el-Kiffan se retrouvant à nouveau la rue, a constaté l'AFP.

La presse algérienne rapporte souvent que les sinistrés des séismes d'Aïn-Témouchent (500 km à l'ouest d'Alger) en 1999 et de Béni-Ouartilane en 2000 (300 km à l'est d'Alger) n'ont pas encore été relogés.

Un agent immobilier interrogé mercredi par l'AFP a affirmé que les prix des logements ont commencé à grimper dans la banlieue ouest d'Alger, à la suite du séisme du 21 mai.
"Je pense que la hausse va se maintenir car beaucoup de personnes habitant à l'est et ayant encore des moyens financiers vont désormais venir à l'ouest", présumait Rédha Haïmour.
"Je suppose qu'avec ce qui vient de se passer, les autorités seront plus vigilantes sur la qualité des constructions, ce qui va en augmenter les prix", craignait un cadre hôtelier à la recherche d'un logement.
"Une telle augmentation éliminerait beaucoup de candidats à l'achat, ce qui se traduirait par une pression sur le logement social", se désolait-il.

Ces deux dernières années, des mairies ont été régulièrement assaillies par des habitants mécontents des listes des bénéficiaires de logements, ce qui a parfois conduit à des émeutes.

Selon les observateurs, l'Algérie paie les erreurs en matière de politique d'habitat depuis l'indépendance en 1962.
Les dirigeants d'alors avaient décrété que les biens vacants laissés par les pieds-noirs étaient en nombre suffisant pour loger les Algériens. C'était sans compter sur les phénomènes de l'exode rural et de l'explosion démographique. En 40 ans, la population algérienne est passée de 10 millions à quelque 32 millions d'habitants.

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