FINANCES. Le gouvernement vient d'annoncer une baisse de cinq euros des aides au logement à partir d'octobre. Et l'avenir du dispositif Pinel ne semble pas acquis. Décryptage.

Le spectre d'un coup de rabot sur les aides au logement planait depuis quelques semaines. C'est à présent devenu une réalité. En effet, le ministère de la Cohésion des territoires vient d'annoncer que les aides au logement allaient baisser uniformément de 5 euros par mois et par foyer à partir d'octobre. Christophe Castaner, porte-parole du gouvernement, a affirmé dans la foulée une remise à plat de la politique du logement "dès cet automne". "On veut remettre les choses à plat sur la politique du logement parce qu'elle n'est pas efficace", a-t-il affirmé à la radio RMC.

 

"Toutes les études montrent que notre système d'APL et souvent d'aide fiscale au logement font monter le prix des loyers", a argumenté M. Castaner. "L'urgence c'est, pour le dernier trimestre de cette année, faire en sorte que chacun puisse toucher son APL, parce que c'est ça la bonne nouvelle entre guillemets, alors que les crédits n'étaient pas là", a assuré le porte-parole du gouvernement, précisant cependant qu'il ne voulait pas "minorer" l'effort demandé aux bénéficiaires.

 

L'USH "alertée", Emmanuelle Cosse "consternée"

 

Les aides personnelles au logement bénéficient au total à 6,5 millions de ménages français, dont environ 800.000 étudiants, et coûtent 18 milliards d'euros par an au budget de l'Etat. Versées par la Caisse d'allocation familiale (CAF), elles se décomposent en trois catégories: l'aide personnalisée au logement (APL), l'allocation de logement familial (ALF), et l'allocation de logement social (ALS). Selon un calcul de l'AFP, une baisse de 5 euros par mois et par ménage économisera 32,5 millions d'euros mensuels aux contribuables, donc un peu moins de 100 millions d'euros sur les trois derniers mois de l'année en cours.

 

De nombreux acteurs ont immédiatement fait savoir leur indignation à la suite de ces annonces. Ainsi, l'Union sociale pour l'habitat (USH) a réagi par communiqué de presse du 24 juillet, affirmant que cette mesure allait "porter préjudice" à six millions de citoyens. "Les aides personnelles au logement sont un outil indispensable à la solvabilisation de nombreux ménages modestes et leur baisse serait un très mauvais coup porté à leur pouvoir d'achat et à leurs conditions de vie", peut-on y lire. Jean-Louis Dumont, président de l'USH, alerte fortement les pouvoirs publics : "Cette mesure est injuste et constitue une 'double peine' pour les ménages modestes alors qu'au cours des 12 dernières années, le nombre de personnes pauvres, comme le rappelle l'Observatoire des inégalités, a progressé de plus d'un million en France."

 

L'ancienne ministre du Logement, Emmanuelle Cosse, s'est dite sur France Info "absolument consternée" par la direction prise par le gouvernement. "Cinq euros, c'est considérable. Il faut vraiment se rendre compte que, parmi ces gens, certains n'ont que 600 euros par mois pour vivre et qui ont 200 ou 300 euros de loyer. Les APL, aujourd'hui, leur permettent tout simplement de payer leur loyer et de ne pas être en situation d'endettement."

 

Enfin, le délégué général de la Fondation Abbé Pierre, Christophe Robert, a demandé à être reçu par le gouvernement après l'annonce de la baisse des aides au logement, dont les APL. "On voudrait pouvoir discuter des raisons de ce choix qui nous paraît assez étrange. On a déjà rencontré le gouvernement à plusieurs reprises mais voir annoncer une baisse des aides au logement qui ciblent vraiment les ménages les plus modestes, les plus pauvres, nous semble être un signe assez préoccupant", a déclaré à l'AFP le responsable de l'association caritative.

 

Le maintien du Pinel en 2018 ne semble pas acquis

Une petite phrase du discours d'Emmanuel Macron, durant son discours introductif à la Conférence nationale des territoires, a pu faire tiquer des professionnels de l'immobilier : "Pour ce qui est du logement, là aussi, c'est une réponse différenciée que nous devons apporter. Nous le savons bien, les politiques qui consistent à inciter à la construction de logements partout sur le territoire avec des outils fiscaux extrêmement chers ne fonctionnent plus." Le président de la République avait promis, durant sa campagne, de ne pas stopper brutalement le Pinel. Son état d'esprit a-t-il évolué ? Il ressort de ces propos que le maintien du Pinel en 2018 ne semble pas acquis, et encore moins pour les années suivantes.

 

La Fédération des promoteurs immobiliers (FPI), dans un communiqué de presse du 18 juillet, rappelait l'importance à ses yeux de ce dispositif. "Le soutien de la demande doit être considéré comme une composante à part entière de la politique de l'offre, lorsqu'il est orienté vers le neuf", précisait l'organisation. "C'est le cas du dispositif d'investissement locatif Pinel qui crée du logement locatif intermédiaire, et pour partie du Prêt à taux zéro (PTZ) qui soutient les primo‐accédants, contrairement aux outils de la politique des revenus (APL) ou de la politique énergétique (aides aux travaux), beaucoup plus coûteux et moins générateurs d'emplois durables. Au moment où l'emploi dans le BTP repart pour la première fois depuis près de dix ans, grâce à la relance de la construction, gardons ces outils et ne cassons pas ce qui marche!"

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