EXPERT DS AVOCATS. L'économie circulaire touche de plus en plus d'aspects dans le secteur de la construction. Décryptage avec Patricia Savin, avocate associée chez DS avocats.

L'économie circulaire a pour objectif de sortir du modèle linéaire "fabriquer, consommer, jeter" pour aller vers une consommation plus sobre et une meilleure utilisation des ressources, en améliorant notamment le tri des déchets et en favorisant leur recyclage ou réemploi. La transition vers une économie circulaire devrait générer des retombées bénéfiques sur l'environnement (réduction des émissions de gaz à effet de serre) et sur l'économie (création de richesse, d'activités et d'emplois nouveaux). L'économie circulaire invite pourtant à un bouleversement des habitudes, également impactant pour le secteur du bâtiment.

 

Quatre objectifs principaux

 

La feuille de route de l'économie circulaire (ci-après "FREC") publiée le 23 avril 2018 par le ministère de la Transition écologique et solidaire est organisée autour de quatre objectifs principaux : mieux produire, mieux consommer, mieux gérer les déchets et mobiliser tous les acteurs.

 

Pour mieux produire, il est proposé d'utiliser les matières recyclées, d'accompagner les innovations et d'encourager financièrement les entreprises à aller vers une production plus durable. Mieux consommer requiert de renforcer l'offre de réemploi et de réparation, ainsi que l'information générale du consommateur (disponibilité des pièces détachées, réparabilité des produits etc.). Ces exemples de mesures doivent tendre vers une consommation plus sobre et une production moindre de déchets.

 

 

Certains objectifs de la FREC concernent directement le secteur du bâtiment et des travaux public (ci-après "BTP"), puisque selon le ministère de l'Ecologie, le secteur du BTP génèrerait 70% des déchets produits sur le territoire français (1), issus des activités de démolition et de déconstruction.

 

Ainsi, la FREC prévoit diverses mesures dont le but est de faire évoluer le secteur du BTP vers un modèle circulaire, en préconisant une gestion durable des ressources, qu'il s'agisse des matériaux utilisés pour la construction ou des déchets générés par les chantiers.

 

Systématiser le diagnostic déchets

 

L'écoconstruction est ainsi favorisée, avec la promotion de conceptions de bâtiments zéro déchet ou ayant un faible impact environnemental. Les déchets doivent être mieux gérés, en systématisant le diagnostic déchets préalablement à la réalisation des travaux afin d'avoir une vue d'ensemble du chantier et une meilleure visibilité sur les exutoires possibles pour le réemploi et la valorisation des matériaux de chantier.

 

Un suivi fiable de la gestion réelle de toutes les ressources secondaires et des déchets du chantier est également préconisé, notamment via les plans de récolement, et le partage de responsabilité des acteurs.

 

L'approche retenue consiste à répondre à la raréfaction des ressources et à l'urgence environnementale, en adoptant de nouvelles manières de construire, rénover et déconstruire. Tels sont les enjeux de "bon sens" des démarches d'économie circulaire dont la loi à venir doit définir les obligations légales.

Un projet de loi présenté d'ici à l'été 2019

 

Le projet de loi "pour une économie circulaire et une meilleure gestion des déchets" (2), qui devrait être présenté en Conseil de ministres d'ici à l'été 2019, entend ainsi répondre aux attentes de la société de l'économie circulaire en mettant concrètement en œuvre les mesures de la feuille de route tout en transposant dans le droit français les récentes directives déchets (3).

 

Ce projet de loi comprend, dans sa version non définitive, six articles portant principalement sur la consommation durable et responsable. L'article 6, qui pourrait impacter le domaine du BTP, autorise le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance certaines mesures relevant de la loi pour transposer les directives européennes déchets et améliorer la gouvernance des filières à responsabilité élargie du producteur (ci-après "REP").


Les producteurs contribueront à la gestion des déchets

 

Concrètement, l'ordonnance permettra notamment de fixer de nouvelles ambitions aux filières à REP afin que les producteurs contribuent à la prévention et à la gestion des déchets qui proviennent de leurs produits. Ce cadre permettra de développer l'éco-conception des produits, de soutenir les réseaux de réemploi et de réparation ou encore de favoriser l'insertion par l'emploi.

 

A titre d'exemple, l'ordonnance prévoit de définir des objectifs qualitatifs et quantitatifs notamment en termes de prévention des déchets, de réemploi et de réparation, de réutilisation et de recyclage ainsi qu'en termes de nettoyage, de collecte de traitement des dépôts sauvages des déchets couverts par les filières à REP. Cette ordonnance devra être suivie avec attention.

 

1 Guide « comment mieux déconstruire et valoriser les déchets du BTP », page 6, Orée, Novembre 2018.
2 Exposé des motifs du projet de loi pour une économie circulaire et une meilleure gestion des déchets, 15 janvier 2019, NOR : TREP1901302L, Ministère de la Transition écologique et solidaire.
3 Directive (UE) 2018/851 du Parlemente et du Conseil du 30 mai 2018 modifiant la directive 2008/98/CE relative aux déchets, Directive (UE) 2018/852 du Parlement et du Conseil du 30 mai 2018 modifiant la directive 94/62/CE relative aux emballages et aux déchets d'emballages et Directive 2018/850 du 30 mai 2018 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 modifiant la directive 1999/31/CE concernant la mise en décharge des déchets.

 

DS Avocats est un cabinet français qui a développé son savoir-faire au bénéfice des sociétés privées mais aussi des entreprises et collectivités publiques. Créé en 1972 à Paris, il rassemble aujourd'hui plus de 400 avocats et juristes.
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