CONJONCTURE. La flambée des prix des carburants bouleverserait les trésoreries des entreprises des travaux publics et du paysage, selon la chambre nationale de ces métiers. Alors que l'alerte a été lancée il y a déjà des mois, aucune rentabilité ne semble toujours se dégager face à de tels niveaux de prix, et les déficits seraient en train de plonger.

Les travaux publics lancent une nouvelle fois un message d'alerte : à cause de la flambée des prix des carburants, les trésoreries des entreprises des TP et du paysage seraient en train de s'effondrer. C'est ce que martèle depuis déjà plusieurs mois la Chambre nationale de l'artisanat des travaux publics et du paysage (CNATP, membre de l'U2P - Union des entreprises de proximité), qui va même jusqu'à parler aujourd'hui d'une inflation "insoutenable".

 

 

En octobre 2022, 34,5% des entreprises de TP ont ainsi déclaré avoir des besoins de liquidités - elles étaient 33,3% en mai et 25% en février. Du côté des entreprises du paysage, ce chiffre s'est élevé à 20% en octobre, contre 19% en mai et seulement 11,5% en février. La situation semble donc clairement se dégrader.

 

Plusieurs explications

 

La pérennité de l'activité s'en trouverait en danger, selon l'organisation : "Si aucune rentabilité ne peut être espérée à ce niveau de prix, les entreprises devront cesser leurs activités déficitaires", prévient-elle dans un communiqué.

 

Plusieurs facteurs expliqueraient cette situation, à commencer par l'impossibilité de répercuter les augmentations des prix des matières premières et des énergies depuis la fin de l'année 2020. De même, certains chantiers ne pourraient être achevés du fait des difficultés d'approvisionnement, voire des pénuries, et ne pourraient donc être facturés.

 

Les entreprises de TP et du paysage se retrouveraient par ailleurs dans l'obligation de stocker les marchandises pour les chantiers signés, déjà en cours ou qui sont encore à réaliser. Les hausses importantes de prix observées au printemps 2022 seraient aussi en train de se faire sentir dans les comptes des entreprises, sans oublier les nouvelles augmentations de cet automne.

 

"Les travaux publics et paysagistes subissent pleinement les augmentations des prix des carburants depuis 2021. Malgré toutes les précautions prises lors de la rédaction des documents contractuels, elles ne peuvent répercuter ces hausses journalières puisque leurs activités sont majoritairement concentrées sur le marché privé non révisable", plaide la CNATP. Qui rappelle au passage que le carburant constitue le deuxième poste de dépenses des entreprises qu'elle représente, après la masse salariale.

 

Baisse des carnets de commandes

 

Les professionnels demandent par conséquent le plafonnement des taxes sur les carburants, via le rétablissement de la "TICPE (taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques) flottante", de manière à éviter "la triple peine" des augmentations, à savoir le carburant, la TICPE et la TVA (taxe sur la valeur ajoutée, qui n'est pas récupérable pour certains carburants). Ils souhaitent en outre une hausse des montants de récupération de TICPE sur le gazole routier pour les véhicules d'un poids de 7,5 tonnes, assujettis aujourd'hui à des montants forfaitaires qui ne sont pas proportionnels.

 

 

Enfin, la CNATP réclame un élargissement du recouvrement de TICPE sur le GNR (gazole non routier) et sur le gazole tourier des véhicules professionnels de moins de 7,5 tonnes. "À tout le moins, même si l'aide TP obtenue en mars pour la période mars-juin dans le cadre du plan de résilience BTP était très insuffisante, nous demandons une prolongation comme pour les pêcheurs (jusqu'en février 2023) et un élargissement aux entreprises du paysage", indique le communiqué.

 

Car une telle conjoncture plombe qui plus est l'activité future. En octobre, quasiment 40% des entreprises de TP ont déclaré que leurs carnets de commandes étaient en baisse sur un mois (contre 23,5% en mai et environ 19% en février). Idem du côté des paysagistes : 33,3% ont constaté un recul de leurs carnets de commandes en octobre, contre 27,3% en mai et 22,2% en février.

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