ÉCONOMIE. Du Covid à la flambée des prix énergétiques en passant par les difficultés de recrutement, les entreprises artisanales tentent de faire tourner leur activité actuelle tout en anticipant les changements à opérer. Le baromètre des Chambres de métiers et de l'artisanat pour l'été 2022 montre malgré tout une certaine confiance des professionnels pour le prochain semestre.

"On est passé d'une situation économique artisanale en mode projet à une situation plus préoccupante." À peine sortie de la tempête Covid, dont les confinements sanitaires successifs ont désorganisé les chaînes mondiales d'approvisionnement, l'économie française a dû composer avec les retours de boomerang de la pandémie, de l'inflation aux difficultés de recrutement.

 

 

S'y ajoute depuis plusieurs mois la flambée des prix énergétiques et les menaces de rupture d'approvisionnement en gaz et électricité pour cet hiver. S'exprimant devant les représentants du patronat ce 29 août, la Première ministre Élisabeth Borne a d'ailleurs invité toutes les entreprises à élaborer un plan de sobriété énergétique pour éviter les "rationnements" - comprendre les coupures - de courant.

 

Les plus petites d'entre elles ont pourtant déjà commencé à se préparer à la transition écologique, si l'on en croit le président du réseau des Chambres des métiers et de l'artisanat (CMA) : "Les artisans sont dans une phase compliquée et regardent comment faire tourner l'économie existante. Ils se sont adaptés dès les premiers signes de la guerre en Ukraine ; nous avons largement anticipé et sommes toujours vigilants", assure Joël Fourny.

 

"Conserver l'existant"

 

Il s'agit donc pour les entreprises artisanales de "conserver l'existant", autrement dit leurs salariés, leurs savoir-faire et leurs outils de production, tout en essayant de jouer sur un certain nombre de leviers pour obtenir des économies d'énergie et des gains de productivité. "Les chiffres sont pourtant extrêmement bons, positifs. L'artisanat continue à se développer, à conforter ses activités", poursuit le président du réseau consulaire.

 

D'après le dernier baromètre CMA réalisé cet été par Qualitest auprès de 2.000 artisans de tous les secteurs d'activité, la France compte en effet 1,83 million d'entreprises artisanales, soit 80.000 structures de plus depuis le début de l'année. De plus, quasiment 3 artisans sur 4 envisagent de maintenir leur activité au cours des six prochains mois. Car si l'inquiétude est naturellement présente, l'optimisme parvient à garder sa place dans l'esprit des entrepreneurs.

 

Ce qui ne veut pas non plus dire que plus aucune difficulté ne se pose à eux. Parmi les principales problématiques mises en avant, la hausse du prix du carburant arrive en tête (28,5% des répondants), suivie par l'inflation en général (18,8%) et les difficultés d'approvisionnement en matières premières (12,8%). Alors que le mot sobriété est sur toutes les lèvres, 46% des artisans sondés affirment avoir limité leurs déplacements pour économiser de l'essence, et 30% font la chasse au gaspillage, par exemple en éteignant les lumières et en baissant le chauffage.

 

La formation au coeur des enjeux

 

De la résilience, et aussi de l'initiative, donc. "Les crises successives nous amènent à une certaine prudence. Mais les artisans restent largement optimistes", se réjouit Joël Fourny. Pour quasiment les deux tiers d'entre eux, la question de la survie de leur entreprise ne se pose pas. Le climat n'est cependant pas aussi propice aux affaires qu'avant : 45,6% des artisans ont vu leur chiffre d'affaires stagner entre le premier semestre 2021 et le premier semestre 2022, et même baisser pour 33,1%.

 

 

Le prochain semestre devrait être marqué par une continuité de cette stabilisation pour 54,1% d'entre eux, et par une nouvelle dégradation pour 27,5%. "On se concentre plus sur le maintien de l'activité que sur son développement ou sa cession", rebondit Julien Gondard, directeur général de CMA. "Le mot d'ordre est la stabilisation, la préservation des acquis de l'entreprise. L'enjeu majeur pour les chefs d'entreprises restera le besoin de formation ; formation à la pratique du métier, au numérique, à la gestion de l'entreprise, pour mieux connaître la réglementation..."

 

Seulement un petit quart des artisans ont effectivement suivi une ou plusieurs formations depuis l'année dernière. Dans le même temps, ils sont un tiers à estimer avoir pourtant des besoins de formation. Toujours est-il que les futurs investissements - s'il y en a - seront plutôt fléchés vers la consolidation de l'activité : par exemple, pour financer un projet immobilier (40%), pour acheter un véhicule (36%), ou encore pour renouveler ou moderniser un outil de production (32%).

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