RÉNOVATION. La réforme de MaPrimeRénov' permettra-t-elle d'atteindre les 200.000 rénovations d'ampleur, et les 500.000 mono-gestes, envisagés par le gouvernement ? Le président de la Capeb, Jean-Christophe Repon, est à peu près sûr du contraire.

C'est peu dire que la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb) est sceptique quant aux futures performances de MaPrimeRénov' (MPR) en 2024. "La trajectoire est celle d'un échec obligatoire", a ainsi tempêté le président de l'organisation professionnelle, Jean-Christophe Repon, lors d'une conférence de presse qui s'est déroulée le 20 décembre 2023, au siège de l'organisation, à Paris. Pour lui, la possibilité de voir atteints les objectifs du gouvernement, à savoir 200.000 rénovations d'ampleur et 500.000 mono-gestes tient donc de la fiction. Les principales raisons ? Tout d'abord, le manque d'accompagnateurs rénov' (Mar), qui seront obligatoires dans le cadre des parcours accompagnés (rénovations multi-gestes de MPR). L'Anah en a annoncé 2.000 déjà agréés, d'autres sources n'en indiquent que quelques centaines : quoi qu'il en soit, il n'est pas acquis qu'ils soient suffisants pour atteindre les 200.000 travaux suivis. "Nous voyons bien que nous n'allons pas réussir", avertit Jean-Christophe Repon. "Dans ce cas-là, pourquoi est-ce que le gouvernement n'assume-t-il pas de dire que la performance énergétique du parc n'est pas une priorité nationale ?" Des mots forts. Mais, selon la Capeb, réalistes. L'organisation en veut pour preuve l'absence de réactions gouvernementales significatives à son "courrier de la dernière chance" de début décembre sur le sujet. Une alerte d'ailleurs réitérée par écrit ce 20 décembre 2023, à travers une missive adressée à la Première ministre cosignée par une vingtaine de grands acteurs du secteur, issus du négoce, de l'énergie ou encore de l'industrie (1).

 

Le défi des rénovations d'ampleur

 

Autre élément bloquant quant aux rénovations globales : la contrainte budgétaire des ménages. "Le marché ne décolle pas du fait des restes à charge importants", assure Jean-Christophe Repon. La frilosité, pour ne pas dire l'aversion, des banques à proposer puis financer un éco-PTZ, y compris chez les ménages aisés, y est pour beaucoup. Ainsi, pour dynamiser ce marché, la Capeb formule à nouveau les propositions qu'elle liste de concertation en concertation, depuis plusieurs mois : création d'un prêt garanti par l'état "vert" (sur le modèle simplifié du PGE covid), possibilité pour les artisans de monter des groupements momentanés d'entreprises (GME), instauration d'un système de contrôle de la qualité des travaux de rénovation énergétique sur le modèle du Consuel, ou encore possibilité pour les ménages de faire des travaux globaux en plusieurs étapes, sur une période pouvant aller jusqu'à cinq ans. "C'est d'ailleurs l'un des points positifs que nous retenons de cette réforme : il y a le mot 'parcours', une philosophie en faveur de laquelle nous militons depuis des années", reconnaît Jean-Christophe Repon.

 

"Il faut toujours commencer par isoler avant de changer le système de chauffage"

 

La Capeb ne s'inquiète pas uniquement au sujet des rénovations d'ampleur, voyant aussi d'un mauvais œil les barèmes d'aides financières MPR pour les mono-gestes, rendus publics par l'opérateur en rénovation énergétique Effy. L'État souhaite en effet prioriser l'installation d'appareils de chauffage décarbonés, devant la réalisation de travaux d'isolation, qui ne pourront être effectués qu'en surplus. "Toutes les études sur l'efficacité énergétique concluent pourtant de la même manière : pour obtenir les meilleurs résultats, il faut toujours commencer par isoler avant de changer le système de chauffage. L'État a choisi de faire l'inverse", remarque Jean-Christophe Repon.

 

La Capeb garde toutefois l'espoir de pouvoir remettre les choses à plat, dans les mois à venir, en concertation avec les pouvoirs publics. "Sur MaPrimeRénov', le gouvernement est à l'opposé de ce que nous avons proposé", regrette le président de l'organisation. Les adhérents qu'il représente espèrent, de plus, voir la rénovation énergétique soutenir leur activité en 2024, alors qu'un recul de 1% de l'activité pourrait avoir été enregistré en 2023.

 

(1) AICB, ALGOREL, BMI GROUP, COEDIS, COENOVE, COROXYL, FDMC, FFTB, Fédération Nationale de la Décoration, FRANCE GAZ, FRANCE GAZ LIQUIDES, Groupe FRANS BONHOMME, FRISQUET, GRDF, HERIGE, KILOUTOU, KNAUF FRANCE, LARIVIERE, LOXAM, LAYHER, ORCAB, PLADUR ALGISS, PPG, SNSO, TEREVA, URMET, URSA France, VIESSMANN France SAS, WURTH.

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