Lors de l'inauguration du Viaduc de la Dordogne, ouvrage d'art de la ligne à grande vitesse Sud Europe Atlantique réalisée par Vinci, Manuel Valls a, par ses propos, relancé le débat autour des partenariats public privé. Le Premier ministre a notamment indiqué que l'investissement public comme privé est un bon moyen pour soutenir le secteur des travaux publics et de la construction. Explications.

Parfois soutenus et d'autre fois décriés, les financements en partenariats public privé (PPP) pourraient bien avoir trouvé un soutien de poids en la personne de Manuel Valls.

 

A l'occasion de l'inauguration du Viaduc de la Dordogne, ouvrage d'art de la ligne à grande vitesse Sud Europe Atlantique réalisée par Vinci, situé dans la commune de Saint-Romain-la-Virée, en Gironde, il a déclaré : "La France, pour retrouver la croissance et donc des emplois, doit impérativement relancer l'investissement public comme privé dans le secteur des travaux publics et de la construction (…) Et ces investissements, nous allons les poursuivre notamment dans les contrats de plan État-régions".

 

Si le Premier ministre n'a pas cité explicitement les PPP, il n'a en tout cas fermé aucune porte, répondant ainsi aux propos de Xavier Huilard, président de Vinci, groupe ayant investi près de 4 milliards d'euros (soit environ la moitié de l'investissement) via sa filiale Lisea dans le cadre du PPP de la LGV Tours-Bordeaux. "Les PPP réconcilient la politique de l'offre et de la demande. Ils sont créateurs de développement économique à long terme, en optimisant les dépenses publiques", a souligné le président du groupe de BTP. Autant de déclarations qui devraient encore faire couler de l'encre, notamment après la publication, le 17 juillet dernier, d'un rapport des Sénateurs qui dénonçaient le procédé pointant du doigt la dérive des coûts et son utilisation à outrance.

Les PPP plus avantageux que la loi MOP, selon Eiffage

Cité régulièrement comme l'échec le plus cuisant, le Centre hospitalier sud-francilien (CHSF) situé entre les villes de Corbeil-Essonne et Evry, a vu son contrat qui le liait au groupe Eiffage annulé. Pourtant, le groupe de BTP ne renie en rien le choix de cette procédure : "Si le PPP du Centre hospitalier sud-francilien (CHSF) à Evry a connu la tourmente au cours de ces dernières années, conduisant à la résiliation en mars 2014 du contrat qui le liait avec notre filiale Héveil, c'est avant tout un problème d'une mauvaise définition de l'ouvrage. Nous le reconnaissons. Mais ce n'est en aucun au cas le choix du contrat du PPP, qui dans ces cas-là doit être remis en cause ! Mais pour la puissance publique, ce type de contrat est plus avantageux que la loi MOP", confiait à Batiactu, Pierre Berger, PDG d'Eiffage, lors d'une conférence le 28 août dernier. Résultat : le groupe est loin d'avoir mis une croix sur ce type de financement. Au contraire : "C'est une belle rentrée chez Eiffage qui s'annonce sous le signe des PPP, note-t-il. La preuve ? Après deux ans de travaux, nous livrons 8 collèges sur 12 en PPP commandés par le Conseil général de la Seine-Saint-Denis, présidé par le socialiste Stéphane Troussel. Par conséquent, on estime que le flux des PPP est actuellement constant chez Eiffage (…)".

Des voix discordantes

Si les grands groupes du BTP semblent logiquement affectionner ce type de financement, il est loin de faire l'unanimité. Denis Dessus, Vice-Président de l'Ordre des Architectes, n'hésite pas à renvoyer dans les cordes ce dispositif : "Le retour de 10 ans d'expérience sur les contrats PPP, et de 16 ans sur les PFI anglais, confirme l'endettement accru, la concurrence faussée, la captation de la commande publique par les majors, les loyers qui explosent et l'impact économique intenable de ces véritables bombes fiscales à retardement", commente-t-il. Et d'ajouter : "Les grands travaux d'infrastructure ferroviaire, dont les marchés en PPP de plusieurs milliards ont été passés dans une concurrence 'simplifiée' et, dans l'indifférence générale, gentiment répartis entre nos trois majors, plongent dans des fonds abyssaux la dette réelle de RFF, et donc de la SNCF. Une dette qui provoque l'ire des cheminots, avant celle probable des contribuables et usagers qui devront rembourser. (…)". Selon lui, "le mal est fait, et le vrai coût des PPP se jugera à l'expiration des contrats dans des dizaines d'années. Là où les PPP passent, les finances publiques ne repoussent pas ! Malheureusement l'état, au lieu d'abroger l'ordonnance de 2004 qui avait créé ces procédures grandement responsables de l'endettement public, souhaite un simple toilettage".

 

Entre pourfendeurs et défenseurs, la question des PPP continue donc bien de faire débat…

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