Le Sénat vient de voter la loi Nome, visant une nouvelle organisation du marché de l'électricité. Ce texte, dans lequel certains voient déjà une «loi d'augmentation des prix» a surtout été poussé par la Commission européenne, pour une réelle concurrence du marché. Détails et réactions.

Plus de trois ans après l'ouverture des marchés et de la libre concurrence dans ce secteur, le Sénat vient d'adopter la loi Nome, ou Nouvelle organisation du marché de l'électricité. Le texte, adopté jeudi dernier par les sénateurs et qui devra encore passer en deuxième lecture à l'Assemblée nationale, a pour objet de «mettre fin à une insuffisante concurrence sur un marché juridiquement ouvert depuis le 1er juillet 2007», a indiqué Ladislas Poniatowski, le rapporteur UMP du texte. Ce dernier a admis que la nouvelle loi engendrerait une «augmentation tarifaire inéluctable».

 

Depuis 2007, les concurrents d'EDF peinent en effet à trouver leur place, le fournisseur d'électricité historique continuant d'alimenter 95% du marché des consommateurs résidentiels, et 92% de celui des professionnels. Mais la loi Nome a surtout été poussée par la Commission européenne, Bruxelles ayant notamment engagé plusieurs procédures contre la France visant les tarifs réglementés proposés par EDF aux entreprises.

 

Vers une évolution des prix plus rapide ?
Avec la nouvelle loi, c'en est donc fini des tarifs réglementés verts et jaunes, qui étaient fixés par le ministère de l'Energie à destination des entreprises. Les professionnels, dont le compteur affiche une puissance supérieure à 36 kVA, pourront donc aller voir la concurrence ; concernant les compteurs de moins de 36 kVA, les prix évolueront en tenant compte «de l'addition des coûts d'acheminement d'électricité, du prix d'accès à la base régulée, du prix du complément de fourniture évalué sur la base des prix observés sur les marchés et des coûts de commercialisation», indique le texte.

 

La loi prévoit également l'attribution automatique du tarif social pour le gaz, et le gouvernement s'est engagé à rendre automatique ce tarif pour l'électricité. Le Sénat a rendu à la Commission de régulation de l'énergie (CRE) sa composition initiale de 5 membres (alors que les députés les avaient réduits à 3) et a renforcé certaines de ses compétences. Des mesures en faveur de la petite hydroélectricité et de la biomasse ont été adoptées, ainsi que des ajouts techniques, visant par exemple à aider les collectivités locales souhaitant enfouir leurs lignes à haute tension.

 

Une «usine à gaz»
Les réactions sont partagées, suite à ce vote adopté par 181 voix contre 152. Le Vert Jacques Muller a qualifié la loi Nome «d'usine à gaz kafkaïenne» et de «nouvelle opération main-mise sur l'électricité au profit du privé». Pour Roland Courteau (PS), cette «loi d'augmentation des prix […] affaiblit un système qui donne satisfaction depuis des décennies» et signe la «montée en puissance d'énormes intérêts privés». Les syndicats sont également montés au créneau, à l'image de FO qui demande le retrait de la loi, dénonçant «une véritable privatisation de la filière nucléaire». Valérie Létard, secrétaire d'Etat à l'Ecologie, a répondu que cette loi «pérennise les tarifs réglementés pour les petits consommateurs et permet une réversibilité totale entre les offres libres et réglementées».

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