Après plus de 30 ans d'attente, les Tunisiens qui habitent le bidonville de Cassis vont quitter leurs baraques insalubres pour des préfabriqués, première étape d'un vieux rêve: être relogés, en dur, tous ensemble, sur le site.

"J'ai le souhait et la volonté que d'ici à la fin de mon mandat, en 2006 ou 2007, le projet de relogement soit entièrement réalisé", explique Jean-Pierre Teisseire, le maire UMP de la station balnéaire courue par les touristes du monde entier.
"Nous avons l'espoir que les opérations démarrent sans tarder", confirme-t-on à la préfecture.

Dans le courant du premier trimestre 2005, un "relogement provisoire" des 93 habitants est ainsi prévu avec l'installation de préfabriqués en plusieurs endroits du site: une carrière désaffectée de deux hectares, située à l'écart du coquet centre-ville de Cassis et de ses élégantes villas et totalement cachée des regards.

Le "village des Tunisiens", originaires pour la quasi totalité d'entre eux de Mareth (sud), a été construit de bric et de broc en 1972 par les immigrés venus chercher du travail de jardinier ou de maçon. Depuis, les Tunisiens, dont une bonne partie des revenus va au pays, où sont restés femmes et enfants, ont vieilli et la moyenne d'âge est supérieure à 60 ans.

Mais en dépit de conditions de vie très pénibles, la majeure partie d'entre eux refusent de quitter leurs cabanes dépourvues du tout-à-l'égout pour rentrer en Tunisie. Cela signifierait la "perte des revenus sociaux, de la couverture médicale ou de la retraite complémentaire", explique Lazhar Ferchichi, un peintre de 53 ans qui habite les lieux depuis près de 30 ans. Ils refusent également d'être séparés.

Après des années de tergiversations, durant lesquelles les Tunisiens ont vécu "invisibles", dans une sorte d'indifférence polie, au côté des 8.000 autres habitants de Cassis, l'Etat a pris en 2001 un arrêté d'insalubrité prévoyant "l'éradication complète du bidonville", dans la foulée d'une visite, en juin 2000, de l'ancien secrétaire d'Etat au Logement Louis Besson.

Cet arrêté chargeait une association spécialisée de concevoir le projet et désignait un opérateur social chargé de la construction des nouveaux logements.
"Les choses ont traîné, il y avait des problèmes de zone inondable mais désormais, nous avons un projet intelligent" qui prévoit la construction de trois immeubles comportant une centaine de logements sociaux, déclare
Jean-Pierre Teisseire. Trente logements (soit 90 chambrées) seraient réservés aux Tunisiens "en ayant fait la demande et s'étant déclarés prêts à contribuer au loyer".

L'opération permettra "de résoudre le problème du bidonville tout en évitant le ghetto et de faire du logement social" dans une ville qui en est quasiment dépourvue. Son coût: 7,5 MEUR, dont 5,2 MEUR pris en charge par l'Etat au titre de la réhabilitation de l'habitat insalubre, selon la préfecture.
"On attend de voir pour le croire, car il en est passé du monde ici", commente Mohamed Bedoui, un habitant du bidonville. Son voisin de cahute "espère quand même que ça va se faire, cette fois-ci".

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