L'Ineris et ses partenaires (CTICM, Amaris, Arcelor Mittal) éditent un guide destiné à simplifier la construction de bâtiments à structure métallique dans les zones "Plan Prévention Risque Technologique" de surpression. Grâce à une méthodologie nouvellement élaboré, il sera plus facile de dimensionner les éléments des ouvrages pour qu'ils puissent résister à une déflagration proche. Explications.

Depuis le drame AZF, en septembre 2001, la mise en place des plans de prévention des risques technologiques (PPRT) se poursuit en France. La première phase d'élaboration et de signature de ces plans touche d'ailleurs à sa fin : en tout, 345 ont été approuvés à ce jour sur les 394 prévus et les derniers devraient être validés d'ici à la fin de l'année 2016. La France entre donc maintenant dans une seconde phase, d'application de ces plans sur le terrain. Nicolas Chantrenne, sous-directeur des risques accidentels au ministère de l'Environnement, explique : "Un travail très important a été mené avec les industriels exploitants des sites classés Seveso pour réduire les risques. Nous sommes à la fin d'un processus qui a été bénéfique, en réduisant les zones impactées". En quinze ans, environ 1 milliard d'euros aurait été investi sur ces sites industriels.

 

"La mise en œuvre des PPRT porte sur deux volets : les logements, des constructions dures qui abritent la population générale, et les locaux d'activités, qui hébergent des professionnels formés mais dont les constructions sont souvent en acier", détaille-t-il. Sur ce dernier point, l'Ineris (Institut national de l'environnement industriel et des risques), Amaris (Association nationale des collectivités pour la maîtrise des risques technologiques majeurs) et le CTICM (Centre technique industriel de la construction métallique) ont rédigé un guide permettant d'appliquer les prescriptions d'urbanisme à ces bâtiments en acier. "Les zones commerciales et industrielles soumises à un aléa de surpression sont composées à 80 % de bâtiments en acier", relate Danielle Sauge-Gadoud de l'association Amaris. "Ces zones sont donc délaissées peu à peu car les propriétaires n'ont pas les moyens financiers de construire des bâtiments aux normes, et ils ne souhaitent pas exposer leurs personnels". Cependant, situées en périphérie des centres urbains, ces zones bien desservies par les axes routiers ou ferroviaires, présentent un intérêt économique certain et ne peuvent rester en friche. "Il fallait trouver une solution pour les zones où l'aléa de surpression est de 20-50 millibars, les moins contraintes et les plus étendues, afin de libérer de grandes surfaces foncières grâce à des travaux économiquement viables et sûrs pour les clients et professionnels".

 

Ne surdimensionner que la face exposée plutôt que l'ensemble du bâtiment

 

Trois ans de travaux ont été nécessaires afin d'approfondir les connaissances sur le comportement des structures et la tenue des bâtiments en acier face à des phénomènes de surpression. Ils ont notamment permis d'améliorer la précision des modèles théoriques de prédiction existants en prenant en compte la dynamique du signal (nature de la déflagration ou de la détonation, intensité, durée, orientation…). Divers moyens d'essais ont été mobilisés, qu'il s'agisse de maquettes ou de moyens de calcul numérique. "Le guide facilitera le dimensionnement des éléments structurels et non-structurels des constructions futures et optimisera leur conception", assure Benjamin Le Roux, de l'Ineris. "La nouvelle méthodologie est plus précise, plus simple et plus rapide, et elle réduit les coûts", poursuit-il. Concrètement, deux étapes seulement sont nécessaires : la première consiste à évaluer le risque technologique auquel sera soumis le bâtiment et à caractériser la sollicitation potentielle. Elle conduit à numéroter les façades, de 1 à 4, selon leur exposition. Dans un deuxième temps, en se reportant à des tableaux, il est possible de dimensionner tous les éléments constitutifs : poteaux, traverses, pannes, lisses, panneaux et pièces d'assemblage. "Parmi les préconisations, on pourra augmenter le nombre de travées, faire encastrer les pieds des poteaux de rives, veiller à garantir la continuité entre les éléments…", note le spécialiste.

 

"Dans certains cas, plutôt que de surdimensionner l'ensemble du bâtiment, avec un surcoût considérable de l'ordre de 100 à 150 %, il est possible de ne surdimensionner que les éléments de la face exposée, pour un surcoût de seulement 5 %", assure Christophe Renaud du CTICM. Le guide, qui s'adresse aux professionnels qui accompagnent les entreprises (bureaux d'études), permettra d'obtenir plus aisément le permis de construire en construisant selon les règles de l'art en vigueur, souvent suffisantes dans les faits, et en apportant de l'attention aux détails. Il sera ainsi plus économique pour les industriels de s'installer ou d'étendre leur outil de production aux abords de ces zones de risque industriel jusqu'ici pénalisées par une méthode constructive trop onéreuse.

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