Icade a réalisé, en partenariat avec le CSTB, une étude pour l'ADEME dans le cadre des projets PREBAT sur le retour d'expérience des premiers bâtiments HQE Tertiaire. Ce rapport détaille les performances « réelles » des trois premiers bâtiments certifié HQE et lève le voile sur un certain nombre de constats sur la conception, l'exploitation et leurs vraies performances notamment énergétiques. Résultats.

Alors que des études ont déjà traité de la conception et de la réalisation des bâtiments certifiés HQE, celle présentée récemment par Icade, le CSTB et l'Ademe, dans le cadre des projets du Programme de recherche et d'expérimentation sur l'énergie des bâtiments (PREBAT) propose de couvrir l'exploitation et la performance effective de ces ouvrages. Ainsi, l'objectif du rapport est d'analyser les démarches innovantes initiées par des maîtres d'ouvrage et des gestionnaires du secteur privé engagés dans une démarche volontaire de recherche d'efficacité énergétique via la certification HQE.

 

L'étude exploratoire a porté sur trois opérations de bâtiments de bureaux : Le 270 à Aubervilliers (93), Le Millénaire à Paris 19eme (à quelques dizaines de mètres du 270 en réalité), tous deux du groupe Icade, et le bâtiment d'accueil de l'INERIS à Verneuil-en-Halatte (60). Au final, l'étude démontre que le 270 et le Millénaire n'ont pas atteint les performances énergétiques escomptées. Ainsi, la consommation réelle du 270 atteint 170 kWh/m2/an, soit 50 kWh/m2/an de plus que les prévisions. Tandis que le Millénaire consommait, en 2008, 247 kWh/m2/an, contre les 217 kWh/m2/an prévus. Si l'on compare aux objectifs de la norme RT 2005, le gain en performance est quasi nul, en revanche, il se révèle être au-delà des données du parc existant, dont l'Ademe estime la moyenne à 286 kWh/m2/an. Comment expliquer ces écarts ? Dans le cas de l'immeuble 270, selon l'étude, il est perçu par ses occupants, (la société Celfish a été interrogée, ndlr) comme une vitrine High Tech et pas HQE. Les bénéfices qu'apporte la conception de l'immeuble peuvent apparaître en contradiction avec l'usage qui est fait des bâtiments loués à des occupants dont l'essentiel de l'activité est très énergivore. « En effet, il y a une utilisation permanente des multimédias (jour et nuit, ndlr), les métiers concernés sont en lien avec les hautes technologies, la communication et les médias d'information. Les besoins de la société Celfish semblent en contradiction avec la conception architecturale du bâtiment basée sur les économies d'énergie », explique le rapport.

 

Ainsi, dans les cas du 270 et de l'Ineris, il apparaît qu'aucune information ou explication concernant l'utilisation des bâtiments n'ait été donnée aux salariés et aux prestataires travaillant sur le site. « Les salariés interrogés ne savaient rien de la norme HQE, de ce qu'elle implique en termes d'usage des bâtiments et de ce qu'il peut découler de l'ignorance de ses qualités. Cela reste assez incompréhensible. De manière générale, ce que perçoivent les salariés des deux bâtiments est le caractère « neuf » de l'espace qu'ils occupent. A l'issue de la rénovation, il s'agit là du seul critère retenu par les occupants des bureaux et du hall d'accueil. Dans ce contexte, les défaillances même mineures ne peuvent qu'apparaitre anormales (…) » souligne l'étude.

 

Tirer les enseignements…
Le rapport met ainsi à jour les écarts à la hausse entre les intentions du projet et la réalité des performances en exploitation, et qui traduisent la difficulté à appréhender l'usage et l'exploitation en conception. Pour expliquer ces écarts, il y a bien sûr l'importance de l'impact des comportements, mais aussi la qualité intrinsèque des ouvrages qui n'atteint pas non plus les objectifs attendus en projet. L'efficacité énergétique passe donc par la qualité d'usage et la nécessité de considérer l'usager et le gestionnaire comme des acteurs de leur espace car ils ne sont pas complètement assujettis aux systèmes techniques mis en œuvre, assène l'étude.
En outre, afin d'éviter que la chaîne de responsabilité de l'efficacité énergétique ne se brise et aboutisse à des bâtiments dont la performance énergétique et la fiabilité sont fragiles, l'étude recommande « un monsieur énergie », comme l'indique Sébastien Illouz, co-auteur du rapport, qui serait le point de contact unique dans la responsabilité énergétique en projet et en fonctionnement.
Enfin, le rapport prône la nécessité d'un partenariat énergétique entre propriétaire, gestionnaire et utilisateur, ainsi que l'accord d'une vraie place à la prise en compte de l'exploitation-maintenance en conception (PCEM), qui permettrait de mieux anticiper les consommations réelles d'énergie et les dépenses de maintenance. « L'étude conclut sur le fait qu'une mutation transversale de la filière de l'immobilier se profile, avec une évolution des représentations, des pratiques et des compétences pour les maîtres d'ouvrage, gestionnaires et utilisateurs. « Attention toutefois à ne pas être déconnecté des cibles imposées par les réglementations thermiques », prévient Sébastien Illouz.

 

Retrouvez l'intégralité de l'étude en cliquant ici.

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