Deuxième portrait de notre série d’architectes nommés au Prix de l’architecture durable, la sud-africaine Carin Smuts consacre sa vie à l’amélioration de l’habitat des bidonvilles et des campagnes de son pays. Passionnée par l’art populaire, elle s’appuie sur une démarche sociale et collective pour réaliser ses projets.

«Le caractère durable, c’est la population, pas la structure», tel pourrait être le résumé de l’approche architecturale de Carin Smuts. Cette sud-africaine de 48 ans s’implique dans de nombreux projets de rénovation et d’équipements en milieu rural et dans les quartiers les plus défavorisés de son pays.

Le travail de la jeune femme s’inscrit dans l’histoire de l’Afrique du Sud marquée par l’apartheid. Diplômée en architecture à l’université du Cap en 1984, Carin Smuts a connu les émeutes raciales dans les townships (bidonvilles) et les campagnes. C’est en 1989 qu’elle décide de créer son agence CS Studio afin d’améliorer les conditions des populations les plus démunies. Et pour mettre en œuvre sa vision de l’architecture, elle tient à s’appuyer sur «les autorités publiques qui doivent jouer un rôle important dans la restructuration mais aussi sur les citoyens».

Chantiers participatifs
Pour cela, elle n’hésite pas à faire participer les habitants, les élus, les associations et les jeunes sur ses chantiers, que ce soit sur la conception ou la construction. Elle a ainsi réhabilité «un vieux marché» en tenant compte des attentes de la population : «au départ, ce bâtiment avait des formes droites et nettes à l’européenne. Mais après dialogues et débats, les gens nous ont fait comprendre qu’ils n’en voulaient pas. Ils ont préféré opter pour un toit dépassant et un espace moins rigide», explique la jeune femme.

Des chantiers de formation et de réinsertion pour les jeunes
Au total, CS Studio a réalisé une centaine de projets : des salles communales, des foyers ruraux, des hangars, des écoles… tout en tenant compte des problématiques et des difficultés (toxicomanie, alcoolisme, violences…) des communautés. Carin Smuts propose d’ailleurs d’intégrer les jeunes, souvent touchés par la crise urbaine, à ses projets par le biais d’ateliers de formation ou encore par des chantiers de réinsertion. Pour preuve, lors de la réalisation d’une salle polyvalente à Laingsburg, elle a décidé de faire appel à des jeunes soudeurs et électriciens : «On a créé ensemble la maquette du projet et on a utilisé des matériaux locaux pour fabriquer une rambarde. Et pour cela, on a ramassé de la vieille ferraille qui nous a servi de matière première», indique l'architecte.

Utilisation de l’art populaire
Mais la jeune femme ne se limite pas à l’utilisation des sous-traitants locaux. Passionnée d’art populaire, elle sollicite également les artistes, les poètes, les peintres traditionnels sud-africains dans beaucoup de ses constructions. Tissages de tapis, céramiques, fresques… les habitants apportent leurs contributions décoratives et en sont fiers. Mais pour Carin Smuts, cette approche a pour mission de conserver la culture sud-africaine «et surtout celle des sud-africains de souche».

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