SANTÉ. A l'occasion de la sortie de son nouveau rapport concernant la santé au travail, l'Assurance maladie - Risques professionnels a fait le point sur l'évolution des cancers d'origine professionnelle, sa prévention et l'accompagnement des salariés exposés.

"La part des cancers liée à l'amiante est prépondérante, ils représentent 80 % des cancers reconnus d'origine professionnelle sur la période 2013-2017", déclare Marine Jeantet, directrice des risques professionnels de l'Assurance maladie - Risques professionnels, ce jeudi 11 avril 2019. La branche de la Sécurité sociale a publié un rapport intitulé : "Santé travail : enjeux & actions", dans lequel elle chiffre l'évolution des cancers professionnels, les différentes actions de prévention mises en place et les procédures d'accompagnement des salariés exposés. En 2017, 1.940 cancers reconnus d'origine professionnelle ont été recensés par l'Assurance maladie - Risque professionnels. "Ce nombre a quasiment quadruplé depuis 20 ans ; en 1998, nous étions à 540 cas", ajoute Pascal Jacquetin, responsable de la mission statistiques.

 

Plus d'un milliard d'euros à la charge des entreprises

 

Les maladies les plus récurrentes liées à l'amiante sont les cancers du poumon, dans 70 % des cas, et les mésothéliomes. Hors amiante, l'exposition au benzène, aux poussières de bois et aux produits noirs provoquent des cancers de la vessie, des cancers naso-sinusiens ou des leucémies. Parmi les personnes touchées, une écrasante majorité sont des hommes (96 %). L'âge moyen des pris en charge est de 68 ans, soit parfois des décennies après les expositions aux produits dangereux. "Pour le cas de l'amiante, nous sommes sur des pathologies à effet différé, c'est la raison pour laquelle la moyenne d'âge est très élevée", explique Marine Jeantet. Sans surprise, les secteurs de la métallurgie et du BTP sont les plus concernés, avec respectivement 39 % et 25 % des cas. Ils sont suivis par l'industrie chimique et le bois avec chacun 9 %.

 

Les employés d'entreprises de plus de 50 salariés représentent près de 75 % des cas de cancers pris en charge par l'Assurance maladie. Autre élément, les cancers du poumon reconnus d'origine professionnelle se concentrent dans la partie nord de la France, faisant ressortir les implantations d'activités économiques liées à l'amiante. "La prise en charge des cancers professionnels représente environ 1,2 milliard d'euros par an à la charge des entreprises", indique Pascal Jacquetin. En grande majorité, ce sont les ayants droits qui touchent des rentes viagères, seuls 20 % des bénéficiaires sont les malades. En moyenne, le montant de leur rente est d'environ 17.000 euros par an.

 

Renforcer le dépistage des salariés exposés

 

L'un des objectifs de l'Assurance maladie - Risques professionnels est de prévenir à l'exposition aux risques chimiques. Pour renforcer les dispositifs nationaux déjà présents, comme le Plan cancer, le Plan national santé environnement ou le Plan santé au travail, la branche de la Sécurité sociale lancera, en 2019, le programme "Risques chimiques pros". Pour Marine Jeantet, deux buts principaux ont été définis : "Accompagner les entreprises dans la mise en œuvre de mesures de prévention pour les risques identifiés et améliorer les connaissances des risques et des mesures de prévention mises en place dans des situations mal connues". Pour permettre aux entreprises d'évaluer les risques d'exposition, la branche de la Sécurité sociale met à disposition une centaine de fiches techniques d'aides au repérage et à la substitution des cancérigènes sur l'outil Seirich, développé par l'Institut national de recherche et de sécurité (INRS). L'Assurance maladie propose également, aux entreprises de moins de 50 salariés, une aide financière pour l'achat d'équipements de protection, à hauteur de 40 à 50 % du coût total. "Il faut faire connaître cette offre", affirme la directrice des risques professionnels. Entre 2015 et 2018, 4.200 entreprises ont bénéficié de cette aide, pour un total de 26 M€ de subventions versées. "Pour les quatre prochaines années, nous avons mobilisé un budget de 50 M€ pour cette offre", ajoute Marine Jeantet.

 

"Un salarié sur cinq ne travaillent pas dans les cinq ans suivant le diagnostic"

 

"L'accès aux droits des assurés est un sujet prioritaire de l'Assurance maladie pour les prochaines années", affirme Laurent Bailly, responsable du département des services aux assurés. La non-déclaration des cancers d'origine professionnelle empêche le déblocage des rentes. "La longue période de latence entre l'exposition et la survenue d'un cancer, l'absence d'information des médecins traitants sur son origine professionnelle, son caractère multifactoriel, et la méconnaissance des salariés de leur droit sont les principales raisons de cette part de non-déclaration", explique Laurent Bailly. Afin de faciliter l'accès aux subventions, l'Assurance maladie prévoit de mettre en place un dispositif d'aide à la déclaration des maladies professionnelles, qui proposera un accompagnement personnalisé aux assurés. Les premières expérimentations seront menées cette année pour une mise en place nationale à la fin de l'année 2020.

 

Si la moyenne d'âge des personnes atteintes de cancers d'origine professionnelle dépasse celui de la retraite, pour les actifs, la question du retour à l'emploi se pose. "Un assuré actif sur cinq ne travaille pas dans les cinq ans après le diagnostic" indique le responsable du département des services aux assurés. Selon lui, de nombreux moyens sont mobilisés par l'Assurance maladie - Risques professionnels pour accompagner le salarié et son employeur vers une réintégration dans l'entreprise, notamment le temps partiel thérapeutique ou les contrats de rééducation professionnelle.

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