Les deux projets d'amendement sur l'éolien, discutés mercredi et jeudi à l'Assemblée, inquiètent au plus haut point. Beaucoup craignent la fin de la production d'énergie éolienne en France.

Les amendements, proposés par la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, stipulent que seules les installations de production d'énergie éolienne d'une puissance supérieure à 30 MW et situées dans des zones spécifiques qui seront définies ultérieurement, pourraient bénéficier de l'obligation d'achat.

Pour l'Eref (European Renewable Energies Federation), la France met en danger les objectifs de développement de l'électricité renouvelable de l'Union Européene et ses engagements fixés lors des accords de Kyoto. «cette tentative de la part des membres du Parlement français est une violation évidente de la directive européenne 2001/77/EC pour la promotion des énergies renouvelables sur le marché interne de l'électricité. J?espère que la majorité du Parlement français votera contre ce mauvais projet», déclare dans un communiqué son président, Peter Danielsson.

«Il n'existe à ce jour aucun parc breton (ni français) supérieur à 30 MW», déplore de son côté, le conseil régional de Bretagne. «L'habitat diffus qui caractérise notre région et la nécessaire préservation des paysages interdisent l'implantation de projets éoliens de très grande dimension», poursuit-il. «Si ces amendements étaient votés, ils risqueraient de porter un coup d'arrêt définitif au développement de la filière éolienne en Bretagne», prévient le conseil régional. A ce jour, 163 projets de parcs éoliens ont été recensés, qui permettraient de passer d'une puissance installée de 40 MW à 930 MW, précise le communiqué. «Ces parcs éoliens moyens auraient des puissances individuelles projetées inférieures à 12 MW, conformément à la loi jusqu'alors en vigueur» qui limitait la puissance à 12 MW pour pouvoir bénéficier du tarif avantageux de rachat de l'énergie produite.

Le Syndicat des Energies Renouvelables et France Energie Eolienne expriment également leur mécontentement devant «l'acharnement législatif dont l'éolien est aujourd'hui la victime». «Après avoir été le seul pays à imposer aux installations électriques de ne pas dépasser une puissance de 12 MW, la France pourrait devenir maintenant le seul pays à fixer une taille minimum de 30 MW à ses installations, en cantonnant celles-ci à des zones qui n'existeront jamais et en sacrifiant tous les projets en cours de développement», déclare le Syndicat dans un communiqué.

En réponse à tous ces «mécontentements», le président UMP de la commission des Affaires économiques de l'Assemblée, Patrick Ollier, s'est défendu mardi de vouloir «tuer l'éolien». «C'est un combat que je mène depuis deux ans», rappelle-t-il dans un entretien avec l'AFP. «Si on était dans la situation du Danemark, où 82% de la production d'électricité est d'origine thermique et émettrice de CO2, peut-être aurais-je une position différente», explique-t-il. Mais en France «95% de notre production d'électricité ne rejette pas de CO2», le principal gaz à effet de serre, dit-il, en faisant allusion au nucléaire qui fournit en gros 80% du courant français et à l'hydroélectricité (environ 15%). «Pour les 5% qui nous manquent, je ne veux pas qu'on ruine des paysages prestigieux, uniquement pour faire plaisir à un certain nombre d'installateurs (d'éoliennes) qui, à juste titre, défendent» leurs intérêts. «A partir de là je veux qu'on réglemente pour éviter le développement anarchique» des éoliennes «car nous n'avons pas besoin d'un tel développement aujourd'hui en France» de cette forme d'énergie, poursuit-il.

Qualifié de «nucléocrate» par les écologistes, M. Ollier déclare «assumer totalement» cette réputation. «Je suis tout à fait favorable au nucléaire, dit-il, je souhaite non seulement que le nucléaire conserve la part qu'il a aujourd'hui (en France dans la production d'électricité et dans le bilan énergétique global) mais à la limite, je souhaiterais qu'on l'augmente parce que, dans le monde entier, on ne connaît pas de production propre d'énergie aussi fiable que le nucléaire». «Dans le cadre de cette stratégie, je suis aussi pour l'augmentation des barrages(hydroélectriques) (...), peut-être à raison de 2% dans les 5% qui nous manquent» pour avoir une production d'électricité sans rejets de gaz carbonique. C'est dans ce cadre que doit s'inscrire «l'affaire des éoliennes», poursuit-il. «La spécificité française permet de bien gérer le problème, donc si des éoliennes doivent être construites, je suis d'accord, mais dans un cadre réglementé pour éviter la pollution des paysages».

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