ENTRETIEN. L'architecte-urbaniste Simon Teyssou, Grand Prix de l'urbanisme 2023, revient sur sa carrière et sur sa vision du secteur de la construction dans une interview donnée à Batiactu. Rencontre avec un passionné...


Une vision plus juste et écologique du monde rural. C'est ce que porte l'architecte-urbaniste Simon Teyssou. Le directeur de l'École nationale supérieure d'architecture (Ensa) de Clermont-Ferrand -dont il est sorti diplômé en 2000- et fondateur de l'agence l'Atelier du Rouget s'est vu décerner en décembre 2023 le Grand Prix de l'urbanisme pour l'ensemble de ses travaux, sa pensée et son engagement.

 

Depuis plus de vingt ans, il œuvre à transformer son secteur. La co-autrice de l'ouvrage "En campagne. Simon Teyssou, Grand Prix de l'urbanisme 2023", Ariella Masboungi, le considère comme "un précurseur et un militant, militant en faveur des territoires qui se sentent délaissés. Militant d'une sobriété dans un milieu rural porteur d'innovations et de savoir-faire". L'homme né à Paris en 1973 d'une mère américaine et d'un père français a été élevé dans le Cantal. Installé au cœur du Massif central, l'architecte réfléchit, depuis deux décennies, à l'impact de son secteur sur l'environnement, le milieu rural et périurbain.

Batiactu : Vous avez reçu le Grand Prix de l'urbanisme 2023 le mois dernier. Quel regard portez-vous sur cette récompense ?

Simon Teyssou : Il s'est écoulé quelques mois entre le moment où j'ai appris que j'étais lauréat et le jour où l'on m'a attribué cette récompense. Durant cette période, j'ai intensément travaillé sur l'écriture de l'ouvrage "En campagne", avec Ariella Masboungi et Antoine Petitjean [publié le 6 janvier 2024 aux éditions Parenthèses]. Le Grand Prix de l'urbanisme est l'occasion, pour les lauréats, de mettre des mots sur leurs pratiques et pensées.

Y a-t-il des événements ou des actualités récentes qui vous ont interpellé ces derniers mois et qui ont nourri votre réflexion sur votre secteur ?

Pandémie de Covid-19, guerre en Ukraine, mouvement des gilets jaunes… Depuis quelques années, nous vivons une série d'événements inaugurant un nouveau monde et régime climatique. Nous allons devoir nous habituer à vivre des crises perpétuelles. Cela a, inévitablement, une incidence sur notre discipline et notre manière d'imaginer l'avenir. Nous connaissons déjà des tensions sur les matières premières, la hausse des prix de l'énergie mais aussi une pénurie de main d'œuvre. Les chantiers se complexifient, les délais se rallongent, des entreprises manquent dans certains territoires et il faut parfois attendre six mois avant d'obtenir un devis.

 

Le Zan "permettra à notre secteur de mieux considérer la biodiversité"

La pression est également forte sur le foncier…

Absolument, et cela sera un enjeu déterminant ces prochaines années, notamment avec la question du Zéro artificialisation nette (Zan). [Une loi de 2021 a fixé l'objectif d'atteindre le Zéro artificialisation nette des sols en 2050, avec pour objectif intermédiaire la réduction de moitié de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers dans les dix prochaines années. Cette trajectoire progressive est à décliner territorialement dans les documents de planification et d'urbanisme.]

 

Je trouve le dispositif intéressant car il empêchera l'artificialisation des sols et permettra à notre secteur de mieux considérer la biodiversité. Mais il provoque déjà des tensions politiques et sociales. Le président de ma région [Auvergne-Rhône-Alpes], Laurent Wauquiez, a affirmé [en octobre 2023] qu'il n'appliquerait pas le Zan. Certains considèrent ce dispositif comme une contrainte supplémentaire. Cela peut se comprendre. Jusqu'à présent, le foncier était peu coûteux dans certaines zones. La question est aujourd'hui de savoir comment on transforme cet objectif en opportunité.

Est-ce aux architectes et urbanistes de promouvoir le Zan auprès des élus ?

La question climatique, des sols et de la biodiversité doit être abordée collectivement. De nombreux gisements existent dans des petites centralités mais il est encore trop difficile
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