Créé en 1992, le concept d'agences immobilières à vocation sociale (AIVS) s'impose progressivement. En 10 ans, elles ont logé quelque 15.000 personnes, dont la moitié vivent avec les minima sociaux.

Louer aux ménages très démunis peut être une bonne affaire pour des propriétaires privés. C'est en tout cas ce qu'affirment les agences immobilières à vocation sociale (AIVS), qui souhaitent mieux se faire connaître alors que la crise du logement atteint, disent-elles, la cote d'alerte.

"La situation du logement en France est catastrophique, on n'aura jamais construit aussi peu de logements sociaux depuis 1954, entre 18.000 et 30.000 en 2003", a affirmé jeudi Patrick Doutreligne, de la Fondation abbé Pierre, lors d'une conférence de presse organisée par le réseau des AIVS.

"Les prix du locatif privé flambent sur toute la France, ajoute-t-il, et les plus pauvres, qui ne trouvent pas de logements HLM, ne peuvent pas prétendre au privé". D'autant que l'offre locative diminue car, les prix de la pierre ayant fortement augmenté, les propriétaires préfèrent vendre leurs logements vacants plutôt que courir les risques de la location.

D'où l'idée de concilier les intérêts des uns et des autres en proposant à des propriétaires, contre un loyer plus faible d'environ 30% de celui du marché, mais avec des garanties, de louer à des familles modestes.

"Les propriétaires qui s'adressent à nous ont souvent eu une mauvaise expérience: locataires mauvais payeurs ou dégradations", affirme Emma Blazy, qui dirige la jeune agence immobilière de Seine-Saint-Denis.

Ce sont souvent aussi des retraités qui quittent leur domicile pour la province et louent pour la première fois, ou des personnes qui héritent d'un logement, ou encore qui ne savent pas que faire d'un logement dégradé.
Les trois quarts des propriétaires qui s'adressent aux AIVS louent pour la première fois.

L'agence à vocation sociale leur apporte une aide pour la réalisation de travaux, en les informant sur les aides publiques mobilisables (crédits de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat-ANAH, primes des collectivités...).

S'il accepte de louer à des personnes en difficulté, le propriétaire bénéficie par ailleurs d'exonérations fiscales (abattement de 6 à 60% sur les revenus). Enfin, l'AIVS offre des garanties en cas d'impayés de loyers ou de dégradations.

"On assure d'autres services, dit Emma Blazy. Je visite par exemple deux fois par an les logements, je maintiens des contacts réguliers avec les locataires et les propriétaires". En lien avec les services sociaux, elle est en mesure de prévenir et gérer les risques locatifs.

La FAPIL (Fédération des associations pour la promotion et l'insertion par le logement), qui regroupe ces administrateurs de biens un peu particuliers, souhaite pouvoir identifier les propriétaires des deux millions de logements vacants, explique son président André Gachet. "Beaucoup pourraient être convaincus de nous louer leurs appartements", dit-il.

Les associations souhaitent aussi négocier avec le gouvernement un dispositif de "Conventionnement de solidarité": "il n'est pas déraisonnable, souligne Patrick Doutreligne, de demander à un propriétaire d'au moins cinq logements, d'en consacrer un au logement social contre une mesure de défiscalisation des revenus locatifs".
Une trentaine d'AIVS ont été créées en dix ans en France, gérant plus de 7.000 logements. 70% des 15.000 ménages qui ont eu recours à une AIVS, louaient pour la première fois de leur vie. La moitié des locataires vit avec les minima sociaux.

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