C'est désormais une évidence : tous les bâtiments recevant du public ne seront pas accessibles d'ici à 2015, comme le veut la loi de 2005. Pour autant, pas de report ni de modification du calendrier prévus pour le moment. Les acteurs de l'accessibilité poursuivent leurs efforts pour prêcher la bonne parole et faire avancer les choses. Entretien avec Jean-Marc Maillet-Contoz, président du salon Urbaccess.

Batiactu : Urbaccess aura lieu les 13 et 14 février 2013 à Paris-La Défense. Quelles seront les grandes lignes de cette édition?
J.-M. Maillet-Contoz :
Cette année, notre programme de conférences sera beaucoup plus étoffé, et nous aborderons davantage les domaines du tourisme et de l'industrie hôtelière. Surtout, la grande orientation que nous avons voulu développer, c'est celle de la ville intelligente. Grâce à cela, nous avons pu approcher de grands acteurs tels qu'Orange, IBM ou Keolis, notamment sur le thème de la mobilité.

 

Batiactu : Dans le rapport de l'IGAS, dévoilé en septembre dernier, il est déclaré que seulement 15% des établissements recevant du public (ERP) étaient rendus accessibles à ce jour. Pensez-vous que la loi de 2005 subira des changements d'ici peu afin d'approcher l'objectif fixé ?
J.-M M-C. :
Oui, ce n'est pas un secret de polichinelle, on ne sera pas prêt pour 2015. C'est évident. Mais à ce jour, aucune modification n'est envisagée. Le rapport Campion est attendu pour début 2013. On espère qu'il définira un état des lieux en France de l'accessibilité des bâtiments, en regard des textes. En outre, au moment de notre salon Urbacess, la directive européenne sur l'accessibilité devrait être en partie dévoilée. Son objectif est de pouvoir prendre la main sur tous les pays qui n'auront pas développé de législation en la matière, et de pouvoir éventuellement compléter les textes actuels. Surtout, cela pourrait empêcher certains pays de se soustraire à la loi. Rendez-vous compte, 15% des ERP rendus accessibles, on en est au même point en matière de transport !

 

Pour ma part, un report, secteur par secteur, de deux ans pourrait être intéressant et maintenir une certaine pression sur ceux qui ne se sont pas encore engagés dans l'accessibilité. Mais si prolongation il y a - et je le répète rien n'est officiel aujourd'hui - il faudrait que ce soit fait de manière intelligente en fonction des moyens de chacun des acteurs.

 

Batiactu : Quel pourrait être l'élément déclencheur à une véritable prise de conscience sur le sujet de l'accessibilité ?
J.-M M-C. :
Je pense que les premières et nombreuses plaintes, qui tomberont dès début 2015, vont ouvrir le marché. Les groupes d'associations de handicapés vont user de l'opposabilité de la loi et mettre à jour les multiples infaisabilités liées à celle-ci. Car il faut bien reconnaître que bien des choses ne sont pas faisables. Ce sera, à mon avis, le premier signal.

 

Je le rappelle : le principe de la loi sur l'accessibilité n'est pas d'imposer une norme, mais l'égalité des chances. On en est loin ! Mettre en œuvre l'égalité des chances, c'est tenter d'œuvrer dans tous les domaines, ce n'est pas le cas. Il existe bien des freins, à commencer par la norme qui prône des changements physiques plutôt qu'humains. Ce sont les mentalités qu'il faut faire évoluer avant tout !

 

Batiactu : Un autre rapport du Syndicat de l'architecture mettait, il y a quelque temps, le doigt sur la "mésentente" entre architectes et industriels quant au développement de produits adaptés et abordables… Qu'en pensez-vous ?
J.-M M-C. :
Des solutions abordables et intelligentes existent bel et bien, mais le marché est tellement important que chacun veut développer son pré carré. C'est un des objectifs majeurs d'Urbaccess : être un espace où les industriels montrent ce qu'ils savent faire aux architectes, urbanistes et autres acteurs du cadre de vie.

 

Le problème, c'est qu'aujourd'hui il n'y a pas de cohérence ni de pédagogie sur l'accessibilité. On sert le thème à toutes les sauces, sur tous les salons, les trophées se multiplient… Ça ne peut pas marcher ! Au final, le message est encore noyé et décrédibilisé.

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