IMMOBILIER. Alors que les plateformes de location de courte durée comme Airbnb impactent de plus en plus leur parc locatif, les villes européennes cherchent à faire front commun et appellent à un durcissement de ton à l'échelle supranationale, et à redonner davantage de pouvoirs aux municipalités.

En Europe, presque aucune capitale n'est épargnée par le phénomène de location de courte durée, même s'il frappe à divers degrés, de concert avec l'attractivité de la ville. D'abord présenté comme l'élément perturbateur du secteur hôtelier, Airbnb a fini par déstabiliser le marché du logement dans les métropoles. Devant ce constat, Paris, Lisbonne ou Venise aimeraient pouvoir parler d'une même voix.

 

Ces villes se sont d'ailleurs retrouvées le 17 octobre 2019 lors du Forum de développement économique du réseau Eurocities, qui regroupe 140 municipalités européennes. "Les débats se sont principalement concentrés sur la réponse européenne à apporter au phénomène Airbnb, et à la prochaine étape de nos discussions, en vue d'obtenir un engagement commun de toutes nos villes membres", développe Aleksandra Olejnik, conseillère politique auprès d'Eurocities, contactée par Batiactu. "Le renouvellement récent des institutions européennes est l'occasion de faire remonter ces demandes", ajoute-t-elle.

 

Avoir accès aux données détenues par Airbnb

 

Car pour les élus de Munich, Paris, Helsinki ou de Barcelone qui se sont retrouvés jeudi dernier, la réponse doit être législative, et être prononcée à l'échelle supranationale, depuis l'hémicycle de la Commission européenne. "Les mesures concrètes qui pourraient être imposées seraient de limiter la durée légale de location sur ces plateformes, et d'assurer un accès public aux données détenues par ces plateformes afin de contrôler le respect des limites et de mieux appliquer les politiques fiscales", estime Eurocities dans un communiqué.

 

Pour l'heure, les réponses des villes pour lutter contre l'expansion d'Airbnb varient. A Munich, les propriétaires peuvent être soumis à une amende salée s'ils louent leur logement plus de huit semaines par an. A Barcelone, les propriétaires désireux d'avoir recours à la plateforme doivent d'abord obtenir un permis auprès des autorités touristiques. Dans la ville catalane, la location de courte durée est exclusivement réservée aux résidences principales, dans une limite maximale de deux chambres louées, quatre mois par an.

 

"Que chaque ville puisse choisir le curseur"

 

La capitale française, elle, se conforme à la législation nationale qui s'applique sur tout le territoire, selon les dernières dispositions de la loi Elan qui autorise la location d'une résidence principale pour une durée maximale de 120 jours, et rend obligatoire la publication d'un numéro d'enregistrement sur les annonces d'hébergement. A l'Hôtel de Ville de Paris, on aimerait pourtant avoir davantage de souplesse pour lutter contre Airbnb.

 

"Nous souhaitons que la compétence permettant de réguler la location meublée de courte durée soit redescendue au niveau des municipalités, pour que chaque ville puisse choisir le curseur, et aller par exemple jusqu'à 30 jours d'autorisations contre 120 aujourd'hui", explique-t-on au cabinet de l'adjoint au logement Ian Brossat. Un souhait formulé lors du dernier Congrés HLM par la maire Anne Hidalgo, qui souhaite, au passage, interdire les annonces basées dans les arrondissements les plus saturés de Paris, dans son centre et les quartiers autour de Montmartre notamment.

 

Possibilité de "moduler" les durées légales

 

Un amendement adopté jeudi dernier au Sénat, contre l'avis du gouvernement, devrait apporter davantage de flexibilité aux élus. Cette mesure, qui serait intégrée à la future loi Engagement et proximité, offrirait la possibilité de "moduler" les durées légales de location entre 60 et 120 jours.

 

L'action de la municipalité parisienne est pour l'heure suspendue à une décision de justice émanant de la Cour européenne. Dans le litige qui l'oppose à la plateforme Airbnb, la juridiction européenne devra dire si le régime d'autorisation imposé par la municipalité aux propriétaires relève de "l'intérêt général" en vertu de "la protection de l'habitat et la lutte contre la pénurie de logements". Si la Cour de justice de l'Union européenne donnait raison à Airbnb, cette jurisprudence porterait atteinte au code français de la construction et de l'habitation.

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