Voici une affaire qui devrait avoir du mal à passer. Les deux acteurs du rail, la SNCF et Réseau Ferré de France (RFF) viennent de commander 341 trains express régionaux aux constructeurs Alstom et Bombardier, mais ceux-ci sont trop larges pour les quais qui doivent les accueillir d'ici à 2016. Un couac estimé à 50 millions d'euros.

C'est Le Canard enchaîné, paru mercredi 21 mai, qui a dévoilé le scandale : les 182 rames TER Regiolis d'Alstom et les 159 Regio 2N de Bombardier, qui doivent entrer en service progressivement jusqu'à la fin 2016, sont plus larges que leurs prédécesseurs. Résultat: il va falloir raboter 1.300 quais sur les 8.700 du réseau ferré de France, de façon de plus ou moins importante, ont confirmé, la SNCF et RFF dans un communiqué.

 

Dans son édition, l'hebdomadaire satirique a écrit que la SNCF "a défini le cahier des charges, avec, notamment, les dimensions des nouvelles rames. (...) Or les savants ingénieurs de la SNCF ont omis de vérifier la réalité sur le terrain. Conséquence, selon l'Association des Régions de France, que préside le socialiste Alain Rousset : 1.200 quais sont trop proches des voies pour laisser passer les trains."

 

L'opération coûtera 50 millions d'euros d'après la SNCF et RFF
La SNCF et RFF ont toutefois assuré que les 50 millions d'euros (Ndlr : 1% du budget de modernisation du réseau) nécessaires pour modifier ces quais trop larges font partie des 4 milliards d'euros consacrés chaque année par RFF à la modernisation et au développement des voies. "Ces travaux d'adaptation […] font partie d'un plan défini en 2012", dont le but serait de "mettre les quais aux normes internationales", ont-elles ajouté pour tenter de légitimer cette erreur. D'ici à la fin de l'année, 600 quais devraient être "traités", en plus des 300 déjà pris en charge à ce jour.

 

Mais Le Canard enchaîné affirme que RFF aurait débloqué d'urgence 80 millions d'euros. Toutefois "la note risque d'être beaucoup plus salée", complète encore l'hebdomadaire selon lequel RFF se serait tourné vers les régions. Ces dernières ont aussitôt dénoncé, par la voix du président de la région Aquitaine, Alain Rousset, le coût des travaux. "Nous refusons de verser un seul centime sur cette réparation", a-t-il réagi.

 

Un mois avant l'examen à l'Assemblée nationale
Dénonçant la séparation des deux entités ferroviaires à l'origine, selon lui, de ce "dysfonctionnement", le secrétaire d'État aux Transports, Frédéric Cuvillier, a critiqué une situation "rocambolesque" et "comiquement dramatique". "L'enjeu de la réforme ferroviaire prend tout son sens quand on constate l'état du dysfonctionnement du ferroviaire en France", a-t-il souligné sur France Inter. "Qu'il y ait des travaux de modernisation, d'adaptation des infrastructures, (...) on ne peut que s'en féliciter", a souligné Frédéric Cuvillier, tout en soulignant que ces décisions doivent être prises "en connaissance de cause", et non après une erreur de commande.

 

Par ailleurs, la commission du développement durable de l'Assemblée nationale va auditionner Guillaume Pepy, président de la SNCF et Jacques Rapoport, président de RFF.

 

Ce scandale intervient un mois avant l'examen à l'Assemblée Nationale du projet de loi sur la réforme ferroviaire, programmé le 16 juin prochain, qui prévoit de regrouper RFF et la SNCF en un grand groupe public.

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