La Place du palais, en chantier, ou la cathédrale Saint-Isaac, sous les échafaudages, retrouveront bientôt leur lustre. Mais Saint-Pétersbourg ne bénéficiera pour ses 300 ans que d'un habillage cosmétique masquant mal son délabrement.

Saint-Pétersbourg, "Venise du Nord" et "fenêtre sur l'Europe", se meurt doucement depuis des années par manque de moyens financiers. Monuments historiques ou simples habitations, tous ont besoin d'être restaurés.
Alors, pour accueillir dignement les centaines de milliers de touristes attendus, et les chefs d'Etat européens invités le 30 mai par Vladimir Poutine pour fêter le tricentenaire de la ville fondée par le tsar Pierre le Grand, un ambitieux programme de rénovation (497 millions de roubles, soit près de 16 millions de dollars) a été entrepris.

Mais les Pétersbourgeois dénoncent le côté superficiel et discriminatoire de ces rénovations qui ne vont qu'accentuer le contraste déjà existant entre les fastes et la misère de la ville.
"Il n'y a pas de réel programme de rénovation, ce n'est pas fait pour les habitants, mais pour les invités. Ce n'est pas de la restauration, c'est juste du maquillage", s'insurge Ioulia Trizna, une jeune femme travaillant pour un magazine féminin.

Outre les monuments, les quais, la perspective Nevski - principale rue du centre historique - et les autres artères qu'emprunteront les invités étrangers font l'objet d'une attention particulière des autorités locales.

La Bourse maritime se dresse déjà flamboyante sur la pointe de l'île Basile, face à la forteresse Pierre-et-Paul. Le bâtiment de la gare de Moscou a été repeint. Et le monument à Pierre le Grand qui inspira à Pouchkine son poème Le cavalier d'érain (une statue représentant le tsar chevauchant son cheval cabré), a été nettoyé et a retrouvé toute sa superbe.

De grands écrans camoufleront les abords peu attirants de la route conduisant au flamboyant palais Konstantin, la nouvelle résidence présidentielle où M. Poutine, lui-même originaire de Saint-Pétersbourg et chef de la commission gouvernementale chargée au niveau fédéral d'organiser ces fêtes, devrait recevoir ses hôtes.

Mais pour peu que l'on s'écarte des axes privilégiés, l'image se détériore radicalement, sans parler des quartiers excentrés où l'on "se croirait dans un patelin du fin fond de la province", commente Mme Trizna.
"Il est évident que les métamorphoses ne concernent que ce qui est visible par tous", regrette aussi Marina Badkhen, une interprète de 47 ans.
Un point de vue confirmé par Irina Potapova, une habitante du quartier Petrogradskaïa, à côté de la forteresse Pierre-et-Paul, selon qui "rien n'a changé dans (son) quartier" où les immeubles resteront grisâtres et délabrés.

En fait, dans une ville laissée à l'abandon depuis des années, "il est impossible de tout remettre en état" en un an, a expliqué à l'AFP Boris Araktcheev, directeur de la forteresse Pierre-et-Paul, le premier bâtiment en pierre de l'ancienne capitale impériale, dont les travaux de rénovation se poursuivront après le tricentenaire.

La mairie de Saint-Pétersbourg reprend le même argument: "on fait tout ce qu'on peut, les travaux avancent, mais on ne peut pas restaurer une ville qui ne l'a pas été depuis si longtemps dans des délais aussi courts", remarque un porte-parole.
Même sur la perspective Nevski, certaines façades délabrées ne seront vraisemblablement pas remises en état. Elles sont actuellement tendues d'immenses placards publicitaires. Nul ne sait jusqu'à quand...

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