L'architecte de la nouvelle ambassade de France à Berlin, qui vient d'être inaugurée par Jacques Chirac, a joué avec la luminosité berlinoise, rare en hiver.

Sur le nouveau bâtiment qui abritera les services diplomatiques français à Berlin, peu d'informations ont pu être dévoilées. Le secret devait être bien gardé jusqu'à l'inauguration officielle par le président. Même après, difficile d'obtenir le moindre renseignement sur l'architecture du bâtiment.

La nouvelle ambassade a été construite sur le terrain même où se situait la précédente ambassade. Ce palais du XVIIIème siècle avait été entièrement détruit en 1945, et finalement rasé. L'ambassade de France s'est ensuite installée à Bonn. Le terrain a alors été laissé en friche jusqu'à la chute du mur de Berlin et sa restitution à la France en 1990.

Un concours d'architecture a été lancé en 1995 pour la reconstruire. 150 agences d'architectes ont répondu et des sept " finalistes ", c'est le projet de Christian de Portzamparc qui a été retenu. La pose de la première pierre a eu lieu de 10 juillet 1998. L'achèvement des travaux, initialement prévu en 1999, puis repoussé en 2000, a finalement été officialisé en octobre 2002. La date de l'inauguration devenait alors toute trouvée et symbolique : le quarantenaire de la signature du traité de l'Elysée.

Situé sur Pariser Platz, à proximité immédiate de la Porte de Brandebourg, le site posait comme premier problème d'être en forme de L. Ensuite, pour dessiner les bâtiments, l'architecte du négocier pouce par pouce avec le Sénat berlinois, connu pour ses règles très strictes. Ainsi, il exigeait que la façade repose sur un socle en pierre, qu'elle soit ornée d'une corniche et surplombée par un attique, que les fenêtres ne soient pas plus large que l'espacement des piliers de la Porte de Brandebourg.

Finalement, Christian de Portzamparc a obtenu de remplacer la pierre par du béton. La raison de ce choix tiendrait à la fois du budget et de sa volonté de créer un contraste avec l'étage supérieur. La façade est hachée par des meurtrières qui viennent la rythmer.

La lumière cachée de l'austérité

Derrière cette façade, que les berlinois trouvent austère, l'ambassade est composée de sept bâtiments. Le problème majeur, pour l'architecte français, hormis la forme du terrain, bloqué par deux murs aveugles, était de donner de la lumière à toutes les pièces et à tous les bâtiments. " Si je ne trouve pas une idée pour apporter de la lumière à toutes les pièces, j'abandonne ", aurait-il dit, selon sa femme, Elizabeth de Portzamparc, responsable de l'architecture d'intérieur du bâtiment, interviewée par Libération.

L'imbrication de ces sept bâtiments permet la percée d'une rue intérieure, mais aussi la création d'un jardin en pleine terre au premier étage, une plantation de bouleaux au quatrième. Surtout, cela permet de dilater l'espace et d'offrir de la lumière naturelle, sans avoir recours à un atrium ou à la lumière de second jour.

En donnée chiffrée, la surface de base est de 4.500m². La surface cultivée est de 20.000m². Les bureaux (4.000m²) sont occupés par le personnel diplomatique du ministère des Relations extérieures ; mais aussi des services d'autres ministères comme la Défense, de l'Intérieur ou des Finances. Le Centre culturel mesure 1.250m² et l'accueil 1.400m². 400m² sont réservés aux logements et 1.350 aux installations logistiques.

Dans son discours d'inauguration, le Président Jacques Chirac a affirmé que " cette ambassade est à l'image de la France d'aujourd'hui : moderne, dynamique, imaginative, ouverte sur le monde ". Il a jugé le bâtiment " original, léger, lumineux, prenant place parmi les créations remarquables d'une ville qui compte déjà quelques-uns des plus beaux joyaux de l'architecture contemporaine ".

Avec le retour de l'ambassade sur son site original, la Place de Paris redevient le " salon de Berlin " qu'elle était autrefois. Selon certaines sources, ce retour aurait coûté 60 millions d'euros.

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