Le Sénat a entériné mardi le transfert par l'Etat de plus de 15.000 kilomètres de routes nationales aux départements, un des dispositifs phare du projet de loi sur "les responsabilités locales" dont l'examen en première lecture est en cours à la Haute Assemblée.

Cette disposition, approuvée par les seules voix de la majorité sénatoriale de droite, prévoit le transfert "de 15.000 à 20.000 km" de voirie classée route nationale aux départements.

Les sénateurs, qui ont eu la primeur du projet de loi, ont également adopté un amendement du rapporteur de la commission des Lois, Jean-Pierre Schosteck (UMP, Hauts-de-Seine), stipulant que ce transfert "interviendrait en tout état de cause, de plein droit, le 1er janvier 2008".

Le domaine public routier national comporte actuellement près de 7.500 km d'autoroutes concédées, ainsi que 30.500 km d'autoroutes non concédées et de routes classées RN.

Les groupes de gauche se sont opposés, en vain, à ce transfert, jugeant la compensation financière envisagée par l'Etat insuffisante. "Les départements ne sont pas demandeurs de ce transfert (...) On a l'impression assez forte qu'il y a un délestage de l'Etat qui se débarrasse d'une charge sur des routes qu'il entretenait d'ailleurs fort mal", a fait valoir l'orateur PS Jean-Claude Peyronnet.

Pour l'élue PCF Marie-France Beaufils, "l'Etat, en se déchargeant de ses responsabilités, met en cause l'unicité même de notre République, puisque le réseau routier est un élément fort de l'aménagement de notre territoire".

"Votre projet de loi aurait bien pu s'appeler « projet de loi de déresponsabilisation nationale » (...) Votre politique d'abandon de l'Etat prend appui sur votre conception de l'Europe, celle de Maastricht", a-t-elle déclaré, à l'adresse du ministre délégué aux Libertés locales Patrick Devedjian.

Les orateurs de droite, à l'instar des sénateurs UMP Jacques Oudin et Gérard Longuet, ont apporté leur soutien au dispositif gouvernemental, tout en soulignant la nécessité d'établir des schémas nationaux pour permettre aux régions de définir "la cohérence régionale des grandes infrastructures de transport et de déplacement".

Pièce maîtresse de l'acte II de décentralisation lancé par le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, ce projet de loi, dont l'examen a été ouvert le 28 octobre par le Premier ministre, entend "clarifier l'exercice de nombreuses compétences et répondre au besoin de proximité".

Le ministre de l'Intérieur Nicolas Sarkozy avait résumé en trois points l'architecture du texte: "aux régions, le développement économique; aux départements, l'action sociale et médico-sociale; aux communes, la vie quotidienne".

La semaine dernière, le Parti socialiste, par la voix de l'ancien Premier ministre Laurent Fabius, a rendu public son projet de "démocratie territoriale", présenté comme une "alternative" à "la fausse décentralisation Raffarin-Sarkozy".

Pour les socialistes, la décentralisation impulsée par le gouvernement est "en réalité un démantèlement des services publics sur le dos des collectivités territoriales".

En début de soirée, le Sénat a également entériné un autre article du projet visant à autoriser, sous certaines conditions, "l'institution de péages tant sur les autoroutes que sur des routes express et les ouvrages d'art", en dépit de la vive opposition des groupes de gauche (PS, PCF).

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