Dans l’affaire dite des "comptes suisses" où l'ancien ministre Michel Noir et son ex-gendre Pierre Botton sont poursuivis pour recel d'abus de biens sociaux, Martin Bouygues, président du groupe éponyme, sera entendu avec deux autres entrepreneurs pour abus de biens sociaux.

Ce procès - qui risque d’être très médiatisé - s’est ouvert ce lundi 13 octobre devant la 5ème chambre du tribunal correctionnel de Lyon.
Arrivé très en avance, Pierre Botton, 48 ans, est apparu un peu tendu : "à la barre de votre tribunal aujourd'hui, mon travail est d'essayer d'être moi-même (...) et de clore tout le chapitre d'une vie que je dois assumer", a-t-il déclaré en préambule au président Jean-Marc Beurton.

"J'ai été amené à faire un parcours personnel incroyable", a ajouté l'ex-gendre de Michel Noir. Condamné pour banqueroute et abus de biens sociaux à cinq ans de prison, dont 18 mois avec sursis par la cour d'appel de Lyon, en janvier 1996, Pierre Botton a quitté la prison le 12 avril 1997.

Encadré de ses trois avocats a son arrivée dans la salle d'audience, Michel Noir, 59 ans, vêtu d'une veste noire égayée par une cravate jaune, est assis au premier rang. Il n'a échangé ni un mot ni un regard avec son ex-gendre et ancien directeur de campagne.

Dans la salle, où ont pris place de nombreux journalistes, sa fille Anne-Valéry Noir, séparée de corps avec Pierre Botton et avec laquelle il est lui-même brouillé, assiste aux débats. Elle devrait témoigner mercredi matin.

Les débats, prévus pour durer quatre à cinq jours, tenteront de déterminer si l'ancien maire RPR de Lyon (1989-95) a bénéficié de virements occultes effectués sur des comptes ouverts en Suisse par Pierre Botton au nom de deux sociétés écrans panaméennes.

Ces comptes auraient été alimentés par les services de trois dirigeants de sociétés de BTP, Martin Bouygues, PDG du groupe du même nom, Khalil Kamel, PDG de Dumez International, et Bertrand Martin, ex-PDG de CCM-Sulzer, qui comparaissent également pour abus de biens sociaux au préjudice de leurs sociétés.

L’enquête avait été ouverte en 1994 par le juge d’instruction Philippe Courroye. Le magistrat s’est attaché à démontrer que trois entreprises de BTP - Bouygues, Dumez et CCM-Sulzer - avaient réalisé des virements au profit de Michel Noir durant une période allant de 1986 à 1992. Au total, 8,6 millions de francs (1,3 million d'euros) auraient transité via les comptes suisses de Pierre Botton.

Dans le cadre de l’enquête, Martin Bouygues avait été mis en examen pour abus de biens sociaux le 22 décembre 1995. Il avait d’ailleurs reconnu des versements par la filiale du groupe, Bouygues Nigeria Limited, pour un total de 2,3 millions de francs (350 000 euros). Selon lui, ils avaient eu pour finalité de "soutenir l’action politique de Michel Noir" comme il était d’usage à l’époque.

Mais voilà, renvoyée devant le tribunal correctionnel, l’affaire prend une dimension nouvelle. Car, hasard ou coïncidence, la justice a constaté que ces fameux virements occultes sont intervenus au moment où le contrat de concession du périphérique nord de Lyon (un marché de 6 milliards de francs) était attribué à... Bouygues et Dumez.

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