Un million de dollars en moyenne pour un trois pièces à Manhattan, 400.000 dollars pour deux pièces en sous-sol au coeur de Washington : le marché de l'immobilier dans les grandes métropoles américaines flambe, mais les experts se refusent à parler de bulle immobilière.

Dans certaines zones bien localisées du pays, le rêve américain de posséder son chez soi devient de plus en plus onéreux sur un marché où la demande dépasse largement un stock de logements qui se réduit comme peau de chagrin.
"Entre 10 et 20 zones métropolitaines enregistrent une appréciation annuelle à deux chiffres du prix des logements. La plupart de ces régions ont un stock très serré de logements", indique David Lereah, le chef économiste du groupement national des agents immobiliers (NAR).

A Los Angeles, il en coûtait 24% de plus en décembre 2003 pour acheter un logement, comparativement à décembre 2002, selon la NAR. A Miami (Floride, sud-est), la hausse est de 23% et à Washington, la capitale fédérale, les prix ont augmenté de 13% - contre une progression de 7,5% au niveau national.
Cette envolée rend l'accès à la propriété hors de portée pour de nombreux acheteurs, obligés de s'exiler dans des banlieues de plus en plus lointaines.

A Manhattan, le district le plus huppé de New York, les prix ont grimpé dans tous les quartiers depuis douze mois, affichant des hausses de 30% à 43% dans certains endroits, selon une étude de la société immobilière Douglas Elliman.
"Depuis 4 ou 5 ans, le marché est monté très très haut. Cette année, ça dépasse les bornes", déclare Didier Godat, agent immobilier à Washington.
"La grande différence, c'est qu'avant on avait un nombre assez égal d'acheteurs et de vendeurs. Soudainement, il n'y a plus de vendeurs", explique M. Godat.
"Aucune maison ne se vend au prix offert. Elles partent pour environ 20% de plus ", note-t-il, ajoutant: "c'est pratiquement de la vente à la criée". Ainsi une maison "toute petite, charmante", proposée à 675.000 dollars, s'est vendue à 801.000 dollars. "Il y a encore quatre ans, elle se serait vendue 400.000 dollars", selon lui.

Récemment, des acheteurs n'ont pas hésité à mettre 1,35 million de dollars sur la table pour une maison "très vieille mais avec beaucoup de cachet", dont la mise à prix était de 1,05 million de dollars. Ils prévoient encore d'investir 300.000 dollars dans des travaux pour moderniser leur nouveau nid.
Des propriétaires se sont même vu offrir une semaine aux Caraïbes par des acheteurs décidés à signer la vente.

Qu'est-ce qui permet cette surenchère? Avant tout, des taux d'intérêt à un niveau plancher, qui permettent aux gens d'emprunter plus et poussent les ventes à des niveaux records.
Par ailleurs, "l'amélioration du marché du travail crée un cadre favorable pour les ventes de logements", selon M. Lereah.

Pourtant M. Lereah est catégorique: au niveau national, "il n'y a pas de bulle sur le marché de l'immobilier".
Mais ceux qui espèrent une baisse des prix n'ont qu'à attendre l'été: les experts prévoient une remontée graduelle des taux d'intérêt, qui devrait raréfier les demandes de prêts et ramener l'immobilier à des niveaux plus raisonnables.
"Si les taux d'intérêt remontent, cela se calmera peut-être", prévoit également Didier Godat, qui évoque le risque de saisies quand ceux qui ont emprunté des grosses sommes à taux variables ne pourront plus faire face à leurs paiements.
A ce moment-là, "les stocks augmentent et les prix baissent à nouveau. Si c'est le cas, cela jettera un froid", conclut M. Godat.
"Pour le moment, je ne suis pas inquiet", affirme de son côté David Lereah.

actionclactionfp