ENTRETIEN. APL Travaux, aides à l'accession à la propriété, revitalisation des zones périurbaines... Le député (Larem) de l'Indre et rapporteur spécial des crédits logement et hébergement d'urgence François Jolivet revient pour Batiactu sur les apports passés et à venir du projet de loi de finances 2020.

BATIACTU: Quels sont les principaux apports de la Commission des Finances sur la mission Cohésion des territoires dans le PLF 2020 en matière de logement ?

 

François Jolivet: Les deux amendements que j'ai portés ont été votés par la Commission et concernent une aide aux travaux qui est un ersatz de l'APL Travaux dédiée aux personnes qui n'arrivent pas à boucler le financement de leurs travaux d'amélioration. L'Anah a augmenté ses moyens, mais cible les personnes qui ont les ressources les plus faibles, alors que d'autres ont encore des moyens insuffisants pour boucler leur plan de travaux. Je souhaite entendre le gouvernement à ce sujet afin qu'il puisse s'exprimer. Mon second amendement vise à augmenter l'enveloppe dédiée au financement des nuitées dans les pensions de famille, à 16 euros la nuit et qui n'ont pas été augmentées depuis 2012.

 

Il s'agirait d'engager 200 millions d'euros pour les pensions de famille et 50 millions d'euros pour l'aide aux travaux. Ce sont des réflexions redondantes au sein du Parlement jusque dans l'appareil d'Etat. Ce budget du logement est dans la constance, nous avons eu quelques inquiétudes sur la capacité des bailleurs à avaler la réforme, et il semble qu'ils l'aient plutôt bien vécu, comme nous le confirment l'Ancols, la CGLLS et la Cour des comptes. On voit que l'autofinancement ne s'est pas effondré.

B: Quels types de travaux seraient ciblés par l'aide que vous portez dans votre amendement ?

F.J: Peu importe la nature des travaux entrepris, à partir du moment où ils permettent le retour à un habitat durable. Elle sera réservée aux personnes qui sont éligibles aux dispositifs de l'Anah et bénéficiant d'un accompagnement personnel pour l'assistance à maîtrise d'ouvrage, y compris dans les décisions qu'elles sont amenées à prendre pour que le logement puisse les accueillir durablement. Qu'il s'agisse de travaux énergétiques, du remplacement d'une baignoire par une douche, ou l'effacement des seuils de portes pour permettre la circulation d'un fauteuil roulant, l'aide aux travaux s'adressera à toute opération qui permet de pouvoir rester dans son logement.

B: Au sein de votre groupe politique, la députée Stéphanie Do a fait adopter en Commission des affaires économiques un amendement pour le rétablissement de l'APL Accession. Il a été retoqué en Commission des Finances mais devrait être présenté en séance publique. A-t-il le soutien de la majorité parlementaire ?

F.J : Je lui ai demandé de retirer son amendement au profit de mon amendement sur l'APL Travaux. Il y a deux approches aujourd'hui sur l'APL Accession, celle selon laquelle on doit toujours permettre aux gens d'acheter un logement même s'ils ne disposent pas des ressources pour l'entretenir par la suite. De plus, le gouvernement réfléchit de manière plus large aux niches fiscales dans le secteur du logement, partant du constat que la politique du logement est complexe du fait d'un régime d'aides permanent qui a pour impact de faire monter le prix des opérations. C'est une intuition qui dure dans notre pays depuis une vingtaine d'années. La deuxième approche consiste à dire qu'il est important d'avoir une France de propriétaires, mais qu'il y a un patrimoine existant qui s'inscrit durablement dans le temps, qui doit être remis sur le marché et réhabilité grâce à des aides aux travaux. Avec cette nouvelle réflexion, qui vise à faire en sorte que pour chaque niche fiscale créée, il faut qu'il y ait une mission d'intérêt générale derrière. C'est le cas du dispositif Denormandie dans l'ancien dans les périmètres Action Coeur de Ville, pour lequel je pense d'ailleurs à déposer un amendement non rattaché pour baisser la quotité de travaux, suite à de premiers retours des opérations qui remontent.

B: Ces amendements confirment le revirement de l'Etat en faveur de la rénovation, au point d'enterrer un peu plus l'idée d'un maintien du PTZ neuf en zones B2 et C ?

F.J:L'approche conduite par quelques acteurs au sein du ministère consiste à dire que le PTZ ne sert à rien puisque les taux d'intérêt sont très faibles. Or, il y a la question des fonds propres dans des opérations d'accession à la propriété. Dans mon département de l'Indre, dans une agence bancaire périurbaine, 120 PTZ sont accordés sur 260 dossiers d'emprunt, je ne sais pas s'il serait possible de boucler des opérations s'il n'y avait pas le PTZ.

 

Le logement est une matière qui s'inscrit toujours dans le temps et qui ne fonctionne pas avec les calendriers électoraux. Je comprends l'émulation et les pensées parfois contradictoires dans l'appareil de l'Etat à ce sujet, il n'y a pas de position unanime. On pensait que les opérations d'accession à la propriété disparaîtraient avec l'APL Accession, cela s'est démenti. L'APL Accession en zone C devait encourager les locataires à acheter leur logement social, mais elle n'a pas dopé la vente HLM. Ce qui démontre la nécessité de penser la politique du logement à une échelle locale et pas nationale.

 

Les patrimoines en zones B2 et C devront de toute manière s'inscrire dans la transition écologique et le développement durable, mais je pourrais développer un amendement en faveur d'une avance remboursable avec un différé de remboursement. Je souhaite aussi avoir l'avis du gouvernement sur ce point.

actionclactionfp