Pour préparer l'avenir en réfléchissant de façon prospective, les membres du groupe de travail RBR 2020 présentent un nouveau rapport d'étape. Il contient trois grandes idées destinées à orienter les efforts de R&D des industriels et à faire progresser la pensée collective. Explications avec Philippe Pelletier, président du Plan Bâtiment Durable, et Christian Cléret, directeur général de la Poste Immo.

"Il nous fallait mener deux sujets de front : d'un côté, déployer le processus de construction économe et de rénovation à travers le pays, et dans le même temps, développer une réflexion prospective sur l'étape d'après, posée par la loi Grenelle I, en 2009, la construction de bâtiments à énergie positive en France à partir de 2020", annonce en introduction Philippe Pelletier, président du Plan Bâtiment Durable.

 

Pour lui, le troisième rapport d'étape du groupe de travail "Réflexion Bâtiment Responsable 2020" tombe au meilleur moment : "Les amendements sur la loi de transition commencent à être examinés, et madame la Ministre a annoncé l'accélération de la mise en mouvement vers les bâtiments à énergie positive pour les édifices publics et les bailleurs sociaux, sans attendre 2020". Or, pour la trentaine de spécialistes du groupe - architectes, promoteurs, sociologues, ingénieurs, financeurs, économistes de la construction ou médecins - cette perspective d'accélération sera positive "à condition que le référentiel soit bien défini". De quoi permettre l'élaboration de futurs labels volontaires. "Il faut concilier la logique des passages obligés et la logique d'incitation et de mobilisation, avec des enjeux facultatifs peu à peu intégrés dans un tronc commun", décrit Christian Cléret, le directeur général de la Poste Immo et co-président du groupe de réflexion RBR 2020.

Pas une nouvelle RT

D'accord avec Philippe Pelletier, il précise qu'il ne s'agit pas de créer une énième réglementation, mais que les travaux du groupe constituent une direction à suivre, afin de lancer le mouvement. "Nous sommes aujourd'hui dans une situation de mutation qui s'impose à nous et à la planète. Il faut la comprendre et l'anticiper, pour permettre à la R&D de prendre les bonnes décisions. Il n'existe pas de réponse technologique pure mais des choix de société, avec mobilisation complète des citoyens, utilisateurs et habitants", insiste-t-il. Plusieurs idées émergent : tout en restant sur les thématiques traditionnelles de l'efficacité énergétique, les acteurs du secteur souhaitent introduire de nouveaux critères comme les notions d'autoproduction et d'autoconsommation, de cycle de vie, d'empreinte carbone du bâtiment en exploitation, de biodiversité, de confort et de santé. "Il faut développer les capacités de dialogue des bâtiments avec les différents réseaux (électricité, eau, gaz, communications), mutualiser à l'échelle de l'îlot ou du quartier, et prendre en compte l'impact du transport dans l'empreinte écologique", liste Christian Cléret.

Critères obligatoires et facultatifs

Dans la logique de labellisation future, le groupe de travail RBR 2020 propose une modulation géographique, afin de tenir compte des différences territoriales face aux besoins de chauffage, aux ressources en eau ou à la situation d'approvisionnement électrique. "Les caractéristiques BePos, le bilan carbone, la qualité de l'air, la gestion de la puissance électrique ou la mutualisation-mutabilité des espaces seront des critères obligatoires. Les parties facultatives porteront sur la flexibilité du bâtiment et sa résilience, l'adaptation aux personnes âgées, les conforts acoustique et lumineux, les économies d'eau, l'économie circulaire, la notion de chantier vert…", estime le directeur général de la Poste Immo.

Des indicateurs pertinents

Le groupe pose également l'épineuse question de l'indicateur de la performance énergétique. "Il faut afficher les bons indicateurs pour donner un signe clair permettant la compréhension et la mobilisation de tous les acteurs, y compris les citoyens lambda et les utilisateurs", explique Christian Cléret, qui estime que les enseignements de la RT 2012 ont été tirés. Les participants à la réflexion n'ont toutefois pas souhaité fixer un indicateur de façon trop fine, afin de laisser de la place aux échanges. Le co-président de RBR 2020 souhaite que la sophistication reste masquée et que l'affichage soit clair, "à la façon d'un iPhone dont la simplicité apparente cache des trésors d'ingéniosité et de haute technologie". Quant au bâtiment responsable, "il devra faire la preuve de sa performance", annonce-t-il. Au-delà du test d'étanchéité à l'air, des mesures variées pourront être réalisées (isolation thermique, ventilation, étanchéité des réseaux, entretien obligatoire des installations aérauliques, maintenance adaptée aux équipements).

 

Philippe Pelletier résume : "Nous ne voulons pas que la prochaine réglementation soit une RT, qui viendrait après les opus de 2000, 2005 et 2012. Que l'on ne poursuive plus ce chemin de bâtiments toujours plus isolés : le temps est venu de procéder autrement en ouvrant la réflexion à d'autres préoccupations, plus globales, plus environnementales, replaçant le bâtiment dans son cadre".

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