Alors que le niveau de construction est au plus bas, les industriels estiment que l'innovation est primordiale pour relancer l'activité du secteur. Le nombre d'Avis Technique a notamment explosé en 2014, grâce à des procédures accélérées, preuve de la vivacité de la R&D. L'AIMCC a organisé un colloque sur le sujet qui rassemblait tous les acteurs de la filière.

Le secteur de la construction est en crise, mais il se mobilise pour développer de nouvelles solutions techniques, aptes à répondre aux attentes de ses clients. "Ce n'est pas paradoxal. Au contraire, c'est le bon moment pour parler d'avenir et d'innovation", déclare Hervé de Maistre, le nouveau président de l'Association des industries de produits de construction (AIMCC). "Cela donne l'image d'une industrie consciente de son rôle et de sa capacité à amener l'innovation", poursuit-il en préambule d'une table ronde sur la question, organisée ce 3 février 2015. Réduction des coûts ou de la pénibilité, amélioration de l'ergonomie ou facilité d'emploi sont autant de caractéristiques recherchées. Mais la recherche de performances amène les industriels à anticiper des niveaux d'exigences attendus pour 2020 ou 2030.

Les institutions publiques soutiennent l'innovation

Damien Abad, député et membre de la commission spéciale chargée d'étudier le projet de loi sur la transition énergétique, est du même avis : "Je suis persuadé de l'apport de l'industrie pour la relance du bâtiment". L'élu de l'Ain estime que la surenchère normative, couplée à un principe de précaution dévoyé, risquent d'étouffer cet esprit d'initiative. "L'obscurantisme est l'ennemi du progrès. L'effet pervers est l'inaction, le statu quo. Il faut remplacer ce principe de précaution par un principe d'innovation responsable. Car ce dévoiement nous coûte cher : la France accumule un retard technologique croissant", fait-il valoir. Pourtant il n'y aurait aucune appréciation réelle et impartiale des risques, ni des bénéfices, de ces nouvelles technologies. Damien Abad souhaite donc concilier progrès et gestion des risques encore mal connus, notamment en créant une autorité publique des risques environnementaux et sanitaires.

 

De son côté, Katy Narcy, sous-directrice de la Direction de l'Habitat et de l'Urbanisme (DHUP), soutient : "Dans un contexte économique particulièrement morose, les industriels ont un rôle moteur". Constatant une inflation régulière du nombre de textes concernant la construction, les autorités ont donc décidé de simplifier certains règlements techniques. "Une relecture était nécessaire. Grâce à des échos des acteurs de terrain, via les fédérations, et grâce à un site Internet dédié, nous avons recueilli des remontées qui ont été analysées à la fin de 2013 et au début de 2014", poursuit-elle. Plusieurs textes ont déjà été révisés : prolongement de la période transitoire pour le collectif, encadrement de la procédure de titre V, réglementation sismique assouplie, zonage termites ajusté, adaptation des règles d'accessibilité aux ERP existants, autorisation en façade des matériaux biosourcés… D'autres problématiques seront prochainement étudiées, dont la sécurité incendie, l'accessibilité des ERP neufs ou les normes électriques. Frédéric Bechara, chef adjoint du bureau "Réglementation et qualité", au ministère de l'Ecologie souligne malicieusement que les règlements ont un rôle d'aiguillon : "S'il n'y avait pas eu de RT2012, y aurait-il eu toute cette R&D ?", s'interroge-t-il.

Effort de vulgarisation à l'attention des professionnels

Fortement sollicité en 2014, le CSTB possède le pouvoir d'éclairer les acteurs de la construction sur l'aptitude à l'emploi de nouveaux produits de la construction. Charles Baloche, son directeur technique, explique : "L'innovation est vivace, et elle doit être évaluée pour inspirer la confiance et ne pas générer de sinistralité". L'an passé, pas moins de 773 dossiers d'Avis technique ont été examinés, contre 200 à 300 les années antérieures. Le raccourcissement des délais et l'évolution de l'accès à ces procédures grâce à un réseau régional seraient les principales raisons de cette augmentation. Les entreprises de la FFB se déclarent, quant à elles, toujours intéressées par l'innovation, adoptant des produits plus faciles à mettre en œuvre ou mieux commercialisables auprès de leurs clients. "Encore faut-il être entièrement sûr de ces produits", déclare Eric Durand, le directeur des Affaires techniques de la Fédération. Pour lui, l'enjeu consiste à rassurer les professionnels, notamment grâce aux AT et ATex (lorsque la faisabilité n'est pas encore démontrée), qui valident l'assurabilité des produits. Il demande également un effort de vulgarisation et de formation : "L'industrie doit aider les entreprises et artisans sur le terrain". De quoi justifier le rôle du Plan d'actions pour la qualité de la construction et la transition énergétique (PACTE), piloté par l'AQC et annoncé par Sylvia Pinel en décembre dernier.

 

L'ensemble des acteurs de la construction est bel et bien mobilisé pour continuer à avancer vers toujours plus de performance pour les produits, équipements et ouvrages. L'orientation vers une obligation de résultats, démontrant les capacités des produits innovants, plutôt qu'une obligation de moyens, limitant le nombre de solutions possibles, serait un premier axe privilégié par certains, dont Qualitel.

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