Alléchés par la perspective des Jeux Olympiques à Pékin en 2008 et de l'arrivée massive d'étrangers dans la foulée de l'adhésion de Pékin à l'OMC, les promoteurs investissent massivement dans l'immobilier de luxe, alors que le revenu moyen par habitant à Pékin ne dépasse guère 1.200 dollars par an.

Sheng Jian est un agent immobilier satisfait qui vante fièrement son produit, une luxueuse villa située dans une résidence pompeusement baptisée Orange County à environ 30 km au nord de Pékin, pour la bagatelle de 14 millions de yuans (1,7 million de dollars). "Voici notre maison française" explique-t-il, en ouvrant la lourde porte d'entrée en bois sculpté, avant de pénétrer dans un vaste hall d'entrée donnant sur un escalier à balustrade menant à l'étage.

Tout est fait pour impressionner le visiteur: six chambres au total, toutes avec salles de bain, un gigantesque séjour avec cuisine américaine, quatre cheminées en état de marche, un décor particulièrement soigné.

"Notre moquette est similaire à celle de la Maison Blanche", affirme M. Sheng de la société d'investissement Zhongyang Chuangye, avant de désigner la tapisserie rouge et le lustre en cristal de la salle à manger, censés représenter le goût français. Une cave à vin aménagée, une salle de gym et un billard complètent le tableau au sous-sol.

138 villas au total, dont les surfaces habitables vont de 200 à 770 m2, sont d'ores et déjà construites dans une résidence qui devrait en compter 200 au début de l'an prochain et qui sera protégée des intrus par des murs de clôture, des caméras et des gardes de sécurité.

Malgré des prix allant de 2 à 14 millions de yuans, seules sept villas restent à vendre dans la résidence, exclusivement réservée aux acheteurs chinois. M. Sheng précise que les villas les moins chères sont parties comme des petits pains dès le début de leur commercialisation en septembre dernier.

Dans un pays où le revenu moyen par citadin s'élevait à 6.869 yuans (830 USD) l'an dernier, contre 2.366 yuans pour les paysans, la multiplication de résidences du type de celle d'Orange County a de quoi surprendre.

Systématiquement affublées de noms anglais tels que Beijing Riviera, Capital Paradise, Dragon Villas ou encore Purple Jade Villas, les résidences haut de gamme ont d'abord cherché à attirer les étrangers -qui acceptent de payer des loyers pouvant aller jusqu'à 10.000 USD par mois- avant de se concentrer sur le marché en pleine expansion des nouveaux riches chinois.

"Nos clients sont principalement des hommes d'affaires chinois qui ont fait fortune à l'étranger, mais également quelques artistes", explique M. Sheng dont l'agence ne travaille que sur des projets résidentiels de ce type.

Alléchés par la perspective des Jeux Olympiques à Pékin en 2008 et de l'arrivée massive d'étrangers dans la foulée de l'adhésion de Pékin à l'OMC, les promoteurs continuent à investir massivement dans l'immobilier de luxe.

"La demande de villas reste forte et elle continuera à augmenter au cours des prochaines années car les Chinois, et plus seulement les étrangers, vont vouloir changer de mode de vie en passant du centre ville à la banlieue", estime Mme Zhang Hong, du cabinet immobilier Jones Lang LaSalle.

Mais dans l'immobilier moyen et bas de gamme, les choses ne sont pas aussi roses. Sur les 17,1 millions de mètres carrés de logements achevés l'an dernier à Pékin, figuraient seulement 1,5 millions de mètres carrés d'appartements subventionnés par l'Etat, pour l'achat desquels existent de longues listes d'attente.

Avec un prix moyen au mètre carré de 4.500 yuans, qui atteint rapidement 8 à 10.000 dans les quartiers centraux, voire plus de 20.000 yuans dans les résidences les plus cotées, acheter un appartement à un prix abordable à Pékin risque de devenir de plus en plus difficile, alors même 340.000 familles vont être expulsées de leurs maisons basses traditionnelles au cours des 5 prochaines années dans le cadre des démolitions massives opérées d'ici aux JO de 2008. La plupart d'entre elles devront se rabattre sur des logements bon marché à plus de 15 ou 20 km de Pékin.

Alors que le revenu moyen par habitant à Pékin ne dépasse guère 10.000 yuans (1.200 dollars) par an, une surabondance existe en revanche pour les appartements privés intermédiaires, selon le site internet spécialisé soufun.com.

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