INTERVIEW. Philippe Pelletier est avocat honoraire, président du Plan Bâtiment durable. Découvrez ses réflexions, sa vision, son actualité, son message aux professionnels et son portrait en 5 traits.


La crise que nous traversons nous incite plus que jamais à faire un pas de côté : prendre du recul, réfléchir, accorder un temps long à la rencontre et au partage. Avec ces entretiens "Grands Témoins", Batiactu vous invite à mieux connaître des personnalités aux horizons divers, mais qui contribuent aujourd'hui, par leurs visions, leurs réflexions et leurs actions, à expliquer, anticiper, façonner, faire exister, notre cadre de vie et donc, la société dans laquelle nous voulons vivre.

 

Avocat, désormais honoraire, spécialisé dans les investissements immobiliers, Philippe Pelletier est une personnalité incontournable de la filière. La rencontre et le dialogue sont pour lui des piliers fondamentaux, mis en œuvre notamment dans le cadre du Plan Bâtiment Durable (PBD), qu'il préside depuis sa création en 2009. C'est Jean-Louis Borloo qui, au lendemain du Grenelle de l'environnement, le charge de développer cette instance au format inédit. Son objectif ? Créer un lieu fédérateur, de dialogue, de rencontre et de concertation, pour l'ensemble des acteurs du bâtiment et de l'immobilier, autour des défis immenses que représentent les objectifs d'efficacité énergétique et environnementale. Force de proposition, le PBD sera cette passerelle indispensable entre les différentes branches et métiers de la filière, mais aussi entre tous ces acteurs du terrain et les pouvoirs publics, "afin de pouvoir guider, ensemble, la transition énergétique et environnementale dans le secteur de la construction et de la rénovation." Lors des dix ans du PBD en 2019, Emmanuelle Cosse, ancienne ministre du Logement, avait ainsi déclaré : "Beaucoup d'obstacles et de freins furent levés à force de pédagogie, de travaux partagés et d'une recherche de consensus. Pour cela, on doit beaucoup à la personnalité de son président, Philippe Pelletier, qui a toujours voulu convaincre de la nécessité d'avancer en évitant toujours d'être dans l'obligation-interdiction-sanction."

 

La rencontre, le dialogue et le "prendre soin"

 

La rencontre, le dialogue, mais aussi le "prendre soin", autant de maîtres-mots qui animeront notre discussion, ce 15 décembre, en visioconférence. Que retient Philippe Pelletier des dernières semaines que nous venons de vivre ? Quels en sont les impacts sur sa vision de notre secteur ? Où l'on parle bien sûr de la crise actuelle, mais aussi des premières annonces concernant la RE2020 ou encore du discours du Président Macron devant la Convention Citoyenne sur le Climat. Une rencontre pour partager avec lui sa vision actuelle de notre secteur et ses perspectives, son actualité, mais aussi pour mieux le connaître, à travers un portrait en cinq traits.

 


L'ACTUALITÉ MARQUANTE

Batiactu : Que retirez-vous des actualités de ces dernières semaines ?

Philippe Pelletier : Il y a un ensemble de pensées qui se bousculent dans ma tête. Elles ont comme caractéristique commune de révéler une société assez largement chamboulée et désarticulée. Quatre mots la caractérisent.

 

Le premier, le plus important pour moi, est le mot "fragilité." On voit l'émergence de fragilités de tous ordres : celle, la plus marquante, de la multiplication et la diversité des personnes venues chercher des repas gratuits, mais aussi la montée, tout aussi inquiétante, des fragilités psychiques, notamment chez les jeunes ; enfin, la fragilité de notre tissu économique qui s'abîme et dont on soupçonne que ce n'est là que le début.

 

Le second vocable est celui de l'interdépendance. Elle s'est manifestée fortement, alors que beaucoup avait ce sentiment auparavant que l'on pouvait être chacun de son côté : nous nous sommes aperçus que nous sommes une grande chaîne humaine, où les interdépendances et les interactions sont majeures. À l'échelle du pays, nous sommes dépendants de composants médicaux fabriqués en Chine ou en Corée ou encore de solidarités financières importantes, mais aussi à notre échelle propre : nous nous rendons compte que nous dépendons du regard attentif d'un voisin, de l'attention de l'autre qui est à côté de soi. Nous sommes dans des liens forts de solidarités, qu'on le veuille ou non. Élément d'inquiétude pour ceux qui pensaient pouvoir faire cavalier seul, l'interdépendance devient élément d'optimisme pour ceux qui ont compris que c'est ensemble que l'on réussit à marcher.

 

Le troisième est pour moi est un signal positif : la conscience que l'on a tous désormais de la complémentarité entre le national et le local, indispensable à l'organisation de tout. Ce n'est plus raisonnable d'imaginer que tout peut se décider au plan national : certes dans une phase de crise, des décisions nationales doivent être prises, mais l'ensemble ne fonctionne que quand il y a une coordination intelligente. Il faut une complémentarité entre le local, capable de comprendre les situations, mesurer les besoins, adapter des solutions et, le national, à qui revient un rôle de stratège et d'organisateur général.
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