ÉNERGIE. Dans son rapport annuel sur le charbon, l'Agence internationale de l'énergie prévoit une diminution de la demande mondiale en 2019 mais une certaine stabilité jusqu'en 2024. Majoritairement porté par les pays asiatiques, ce marché doit toutefois affronter l'essor des énergies solaire et éolienne, dont le coût est de plus en plus compétitif. En Europe et aux Etats-Unis, la ressource ne cesse de perdre du terrain.

Si le charbon est rejeté par un nombre croissant de pays, il est cependant assuré de conserver une bonne place dans le classement des ressources énergétiques pour les années à venir. Dans son rapport annuel consacré à ce matériau, l'Agence internationale de l'énergie (AIE) prévoit certes une diminution de la demande mondiale pour le bilan de l'année 2019 - ce qui s'inscrit dans la continuité des précédentes études -, mais une certaine stabilité jusqu'en 2024. Les analyses indiquent en effet que le marché du charbon va être majoritairement porté par les pays asiatiques, au premier rang desquels la Chine. La décrue que devrait connaître la demande globale de l'année écoulée s'explique essentiellement par la réduction de 2,5% de la production d'électricité au charbon, "sa plus forte baisse jamais enregistrée" d'après l'AIE, ce qui représente plus de 250 térawatts/heures (TWh). La cause : l'Europe et les Etats-Unis d'Amérique ont grandement diminué leurs recours au charbon, dont la production électrique dans ces deux marchés "s'enfonce à des niveaux jamais vus depuis des décennies".

 

 

"L'éolien et le solaire photovoltaïque se développent rapidement dans de nombreuses régions du monde. Avec le tarissement des investissements dans de nouvelles centrales, la capacité de production du charbon en-dehors de l'Asie est clairement en baisse et continuera à baisser dans les années à venir", a indiqué Keisuke Sadamori, directeur des marchés énergétiques et de la sécurité à l'AIE. "Mais ce n'est pas la fin du charbon, car la demande continue de croître en Asie. La part de la région dans la production mondiale d'électricité au charbon est passée d'un peu plus de 20% en 1990 à près de 80% en 2019, ce qui signifie que le sort du charbon est de plus en plus lié aux décisions prises dans les capitales asiatiques."

 

Il faut dire que la ressource fossile se retrouve sérieusement concurrencée par le solaire photovoltaïque et l'éolien, deux énergies renouvelables dont le coût s'avère a fortiori de plus en plus compétitif. De même, les prix du gaz naturel sont faibles, dans un contexte où la demande d'électricité tend qui plus est à stagner. Sur le Vieux Continent comme Outre-Atlantique, les centrales au charbon sont donc de moins en moins nombreuses, et ce retrait devrait perdurer jusqu'en 2024, sous réserve que le matériau ne soit pas ciblé par de nouvelles politiques environnementales ou ne soit pas encore plus pénalisé par une autre baisse des prix du gaz naturel.

 

La moitié du charbon mondial est produit et consommé en Chine

 

Alors, la baisse de la production mondiale d'électricité au charbon observable en 2019 est-elle le prélude à son déclin ? Il est encore trop tôt pour le dire, selon l'AIE, qui pronostique parallèlement une part importante des énergies renouvelables dans la hausse de la demande mondiale d'électricité au cours des 5 prochaines années. Sur le même laps de temps, donc jusqu'en 2024, la production électrique au charbon ne progressera que de manière extrêmement timide, à moins de 1% par an, pour passer de 38% en 2018 à 35% en 2024. Mais ces chiffres montrent malgré tout que le charbon demeure la principale source d'approvisionnement en électricité de-par le monde. Et un élément prépondérant doit être pris en compte : la Chine, dont le rôle et la place dans l'économie planétaire font d'elle un pays incontournable sur le plan des ressources énergétiques - la moitié du charbon mondial y est produit et consommé.

 

Ceci dit, l'Empire du Milieu est loin d'être le seul dans cette région du monde à avoir besoin d'un tel matériau. D'autres nations de l'Asie du Sud et du Sud-Est, telles que l'Inde, l'Indonésie et le Vietnam, sont elles aussi dépendantes du charbon pour faire tourner leurs économies respectives. Au Pakistan, les deux sources d'énergies utilisées pour la production d'électricité demeurent le gaz naturel et le pétrole, mais le pays a tout de même mis en service une capacité de 5 gigawatts (GW) de centrales au charbon depuis 2017, auxquels devraient s'ajouter 5 autres GW dans les années qui viennent. Pendant longtemps, le gaz naturel a aussi majoritairement contribué à l'approvisionnement électrique du Bangladesh, mais le charbon y gagne également des parts de marché, avec notamment une capacité de 10 GW en préparation.

 

 

"En 2019, la production mondiale d'électricité à partir du charbon connaîtra la plus forte baisse jamais enregistrée, et la production indienne d'électricité à partir du charbon diminuera probablement pour la première fois en 45 ans", a ajouté Keisuke Sadamori. "La situation mondiale n'a cependant pas beaucoup changé. Le charbon disparaît dans de nombreuses économies développées, mais il résiste et continue même de croître dans les pays asiatiques en développement. La faible production d'électricité au charbon enregistrée en Inde cette année est due à une croissance inhabituellement faible de la demande d'électricité et à une production hydroélectrique exceptionnellement élevée. Il n'est pas du tout certain que cela se répétera."

 

Avec une opposition de plus en plus importante des opinions publiques à son égard, des politiques environnementales l'excluant progressivement du bouquet énergétique, des énergies renouvelables et un gaz naturel toujours plus compétitifs, les menaces à l'encontre du charbon ont donc tendance à se multiplier. A voir comment les pays asiatiques gèreront son intégration dans leurs outils de production énergétique, tout en prenant en compte son impact environnemental non-négligeable.

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