ANNONCES. Les pouvoirs publics viennent d'annoncer un renforcement du dispositif de soutien public à destination des entreprises touchées par la crise sanitaire et économique du coronavirus.

"L'épidémie de coronavirus aura un impact sévère sur l'économie française, qui se chiffrera en plusieurs dixièmes de point de PIB", a assuré le 9 mars 2020 le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, lors d'une conférence de presse qui s'est tenue à Bercy. Le Gouvernement, qui prévoyait une croissance de 1,3% cette année, envisage que nous passions sous les 1%. Les pouvoirs publics ont donc annoncé un renforcement de l'arsenal visant à lutter contre les conséquences de cette crise, avec trois objectifs : maintenir le tissu économique, éviter d'éventuelles défaillances d'entreprises, préserver l'emploi.

 

Report possible des paiements fiscaux et sociaux

 

"Le 15 mars prochain, tomberont les prochaines échéances fiscale et sociale", a rappelé le ministre. Le Gouvernement a annoncé que les entreprises pourront demander le report du paiement des charges sociales par "simple envoi d'un mail". "Nous allons aussi demander de reporter les charges fiscales de la manière la plus simplifiée possible." Enfin, si la survie d'une entreprise est menacée par les conséquences de l'épidémie, le Gouvernement propose un "dégrèvement des impôts directs".

 

Recours à l'activité partielle simplifié

 

A vendredi dernier, 900 entreprises avaient déjà demandé un recours à l'activité partielle. Alors que le délai de réponse de l'administration ne doit pas dépasser 15 jours, le Gouvernement s'est engagé à fournir une réponse en 48 heures, au vu de l'évolution rapide de la situation. Plus de 50 millions d'euros sont déjà engagés, mais le ministère a assuré que dans cette situation "extraordinaire" il avait décidé de faire passer la dimension budgétaire au second plan. "Les niveaux financiers prévus seront largement dépassés, notre action sera pour ainsi dire sans limite. L'accompagnement des entreprises prime sur le budgétaire", résume Muriel Pénicaud.

 

"Le chômage technique [ou activité partielle, NDLR] est une solution prévue lorsqu'une entreprise ne peut pas maintenir son activité normale à cause de conditions particulières", a rappelé Muriel Pénicaud, ministre du Travail. "Le contrat de travail est alors, non rompu, mais suspendu, l'entreprise paie 70% de la rémunération du salarié, et l'État rembourse 7,74 euros/heure pour les entreprises employant jusqu'à 250 salariés." Ce seuil de 7,74 euros, situé 29 centimes sous celui du Smic, va être relevé à 8,04 euros, pour plus de simplicité.

 

Coronavirus : l'appel du Gouvernement au monde du travail
La ministre du Travail, Muriel Pénicaud, a souhaité faire passer un message au monde du travail dans son ensemble à propos des mesures de base d'hygiène et de précaution : "Je rappelle que les grandes barrières face à l'extension du coronavirus, ce sont bien sûr de ne plus se serrer la main, ne plus s'embrasser, etc. Ces mesures doivent être respectées à 100% et nous permettront d'éviter un grand nombre de contaminations."

 

Faire du virus un cas de force majeure en marchés publics comme privés

 

Bruno Le Maire est revenu sur la décision de faire du coronavirus, en marchés publics, un cas de force majeure. "Si une entreprise de BTP a un retard dans l'exécution de son contrat (elle a des problèmes de livraison de fournitures ou des salariés confinés), elle exécute son contrat avec retard, mais ne doit pas se voir infliger des pénalités de retard : c'est cela, la solidarité nationale", a illustré le ministre. L'État a déjà annoncé qu'il appliquerait cette règle pour ses marchés publics, et a rappelé que les Régions s'étaient également engagées. Le Gouvernement échangera avec les mairies et les départements de manière à ce qu'il en soit de même.

 

 

Il est également question de faire passer ce principe en marchés privés. La médiation des entreprises, service de Bercy, a été missionnée pour étudier le cadre juridique à mettre en place pour son application. Bruno Le Maire a d'ailleurs appelé "les donneurs d'ordres privés, les grandes entreprises avec leurs sous-traitants" à faire acte de solidarité en ne demandant pas de pénalités.

 

L'Union des entreprises de proximité (U2P), si elle salue ces nouvelles mesures dans un communiqué de presse du 9 mars 2020, "souhaite que le gouvernement envisage une prise en charge des pertes d'exploitation subies par les entreprises artisanales, commerciales et libérales, si besoin par l'intermédiaire des compagnies d'assurance". L'organisation professionnelle argue en effet que les TPE doivent faire face à une série de difficultés ces derniers mois : gilets jaunes, grève des transports, puis épidémie de coronavirus. La CPME, pour sa part, souhaiterait que soit reconnu un "état de catastrophe sanitaire permettant aux entreprises de faire jouer, le cas échéant, la garantie perte d'exploitation auprès des assureurs".

 

Le droit de retrait ne serait pas une réponse
La ministre du Travail, questionnée sur le sujet du droit de retrait, a précisé qu'il ne devrait pas entrer dans le cadre du coronavirus, car il ne peut s'exercer que dans le cas d'une menace immédiate et grave pour la santé - elle a pris l'exemple d'un salarié du bâtiment à qui l'on demanderait de monter sur un échafaudage sans lui fournir d'équipements de protection. Ainsi, si l'employeur a pris toutes les mesures qui s'imposent par apport à cette crise en matière d'hygiène, il n'y a pas de raison d'invoquer un droit de retrait dans l'immense majorité des cas.

 

Les banques invitées à être solidaires

 

La Banque publique d'investissement a été missionnée, sur tout le territoire, pour garantir à hauteur de 70% les prêts de trésorerie pour les sociétés qui en auraient besoin. Elle peut intervenir pour les PME, mais aussi les entreprises de taille intermédiaire (ETI).

 

Le ministre de l'Économie, qui a échangé avec la Fédération bancaire française (FBF), "compte sur le soutien des banques". "Elles se sont engagées à faire preuve de solidarité, en revoyant par exemple les échéanciers de crédit." Le ministre souhaite également qu'au niveau européen une pression excessive ne soit pas mise sur les organismes financiers en termes de respect des règles prudentielles. "Tout le monde doit jouer le jeu, à tous les niveaux", estime-t-il. "Les banques françaises seront [aux côtés de leurs clients] pour les accompagner dans cette période, comme elles l'ont toujours fait dans des périodes d'incertitude et de ralentissement économique", a récemment assuré la FBF dans un communiqué de presse. "Elles examineront avec attention les situations individuelles des TPE et PME impactées dans les secteurs exposés aux conséquences de cette crise sanitaire. Les banques rechercheront notamment au cas par cas les solutions adaptées aux besoins de financement court terme."

 

Préparer la reprise

 

Le Gouvernement souhaite qu'un plan de relance soit programmé de manière coordonnée au niveau européen pour un vrai redémarrage de l'économie lorsque nous en serons au stade 4, c'est-à-dire à la fin de l'épidémie. Au niveau national, il est également proposé aux entreprises de profiter de cette période pour former des salariés. C'est le sens d'une rencontre qui aura lieu demain entre le Gouvernement, les organismes de compétences et le Fonds national de l'emploi formation.

 

"Nous devrons enfin réfléchir à rebâtir une mondialisation avec des chaînes de valeurs mieux protégées, et la relocalisation d'activités stratégiques comme la santé", a conclu Bruno Le Maire.

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