Sujet de nombreux colloques, conférences et présentations, le BIM demeure encore une notion abstraite et lointaine pour nombre de professionnels de la construction. Les acteurs de l'informatique rivalisent pourtant d'ingéniosité pour rendre leurs solutions plus accessibles, plus performantes et plus intégrées. Tour d'horizon de quelques idées reçues encore (trop) souvent rencontrées.

L'utilisation de la maquette numérique progresse : vantée par les uns, redoutée par les autres, elle n'en finit pas de faire débat. Mais les professionnels se déclarent encore trop peu informés, entraînés et aidés dans la démarche de transition qui s'impose, depuis les solutions informatiques classiques vers la méthodologie BIM. Emmanuel Di Giacomo, responsable du développement des écosystèmes BIM en Europe pour Autodesk, a signé une tribune qui revient sur les idées reçues les plus couramment rencontrées.

 

 

Ainsi, le BIM ne serait pas nouveau, tous les acteurs de la construction travaillant déjà sur des solutions informatiques 3D. Le spécialiste répond : "Le BIM n'a jamais été autant d'actualité ! Les innovations technologiques transforment le marché et les méthodes traditionnelles de travail évoluent. Les outils et les processus changent rapidement, repoussant les limites entre le numérique et le physique, ouvrant l'ère du tout connecté". La maquette numérique s'apparente ainsi davantage à un processus collaboratif, reposant notamment sur la puissance du Cloud, qu'à une simple représentation tridimensionnelle d'un bâtiment, enrichie de nomenclatures et fiches techniques. Le BIM permet de mettre à jour, simultanément pour tous les intervenants d'un chantier, les plans en temps réel. Une quantité d'informations phénoménale qui permet d'éviter des erreurs et de prendre des décisions plus rapidement. "On passe ainsi de ce qui était 'la solution la meilleure par expérience' à ce qui sera 'la meilleure solution rationnelle possible'", annonce-t-il.

 

Gérer les propriétés non-graphiques de tous les éléments

 

L'éditeur Abvent a notamment fait évoluer sa solution, pour améliorer ses performances dans la gestion de projets. Archicad 20 supporte nativement le format IFC 4, en import-export. Outre l'envoi de nomenclatures vers les tableurs, il est également possible d'importer et de filtrer des données non-graphiques d'éléments. Selon les besoins, elles peuvent être affichées et communiquées de façon spécifique pour réaliser des plans de vente, des plans de sécurité, des analyses techniques ou des visualisations de phases. Abvent explique qu'il est possible de créer des propriétés personnalisées et de les assigner aux éléments de construction ou à des zones, et qu'elles puissent être stockées, transférées d'un projet à un autre, et partagées avec tous les acteurs concernés, selon les autorisations attribuées. "Le BIM Archicad s'ouvre au design algorithmique avec un outil d'interface Rhino-Grasshopper qui permet de visualiser en temps réel les modifications paramétriques dans la fenêtre de travail", ajoute la société.

 

Le BIM souffre également d'une image d'outil élitiste, qui requiert un niveau de détail trop élevé que seuls des experts peuvent gérer. Là encore, le responsable d'Autodesk répond : "Avec les technologies actuelles, rassembler, synthétiser et collaborer autour de grandes quantités de données (Big Data) d'un projet est possible. Les informations d'état existant de bâtiments sont récupérées par le biais de technologies de capture de la réalité (scan laser, photogrammétrie), via des données SIG (système d'information géographique) ou d'autres données disponibles publiquement (y compris des informations démographiques, de zonage, économiques ou environnementales)". Une apparente complexité qui réserverait la maquette numérique aux gros projets menés par des architectes. Les spécialistes de l'informatique rétorquent que le procédé est adapté à tous les types de projets ou de bâtiments et infrastructures, les bénéfices étant les mêmes pour tous. A savoir, des délais de conception optimisés, une qualité accrue par l'évitement d'erreurs et une maîtrise des coûts par une meilleure anticipation.

 

Toujours plus de modules intégrés

 

 

On peut noter l'évolution rapide des solutions proposées, à l'image de Stabiplan qui propose désormais d'intégrer au BIM un grand nombre de calculs qui nécessitaient auparavant un programme annexe, et des étapes d'import/export ou de saisie de données. La société explique avoir développé "un moyen rapide et fiable de dessiner les installations, de générer des notes de calculs, de les contrôler et de comparer les solutions de dimensionnement". La maquette numérique servira donc de comparateur des alternatives de conception. Stabiplan cite l'exemple des modèles de calculs pour les conduits d'aération, les sprinklers, les installations de chauffage/climatisation, l'eau sanitaire chaude ou froide, le bouclage et l'évacuation, tous disponibles. "Ainsi, tous les systèmes de tuyauterie d'un bâtiment peuvent être calculés et/ou contrôlés de manière intégrée, d'après les normes et standards français", précise le développeur.

 

Autre idée reçue, un taux d'adoption faible, "en particulier dans le génie civil et le BTP". Au contraire, selon Emmanuel Di Giacomo, les professionnels de ces secteurs présenteraient un taux supérieur à celui des architectes : "Les directives publiques et les exigences des maîtres d'ouvrage poussent de plus en plus à utiliser le BIM pour les projets d'infrastructures publiques afin de réduire les coûts et les risques divers", assure-t-il. Enfin, dernière démythification, celle de la maquette numérique cantonnée aux seules étapes de conception-construction. Le spécialiste déclare : "Rien ne pourrait s'éloigner plus de la réalité que cette affirmation ! (…) le BIM apporte de la valeur à la maîtrise d'ouvrage tout au long des phases de conception et de construction, mais aussi lors des phases d'exploitation et de maintenance d'un bâtiment ou d'une infrastructure". Les promoteurs de l'informatisation du BTP mettent en avant la montée en puissance de la maintenance prédictive et de la télémaintenance. Quoi qu'il en soit, la digitalisation de la construction est en marche, et elle semble inéluctable. L'important, pour les professionnels, sera de prendre le train à temps.

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