D'un point de vue technique, rien d'insurmontable. "Pour intégrer l'autoconsommation dans les systèmes de gestion, nous nous concentrons sur différentes solutions afin de valoriser au mieux la production photovoltaïque au lieu de tenter de la maximiser pour tout revendre", développe Ignace de Prest, directeur Energies renouvelables France chez Schneider Electric. "L'enjeu est d'adapter l'usage à la production, notamment par des mesures d'effacement ou de modification des périodes de consommation, ou de prévision de la production d'énergie, via des services météo dédiés". Pour les membres du SER, l'évolution est inéluctable : "L'autoconsommation est essentielle dans une logique de réduction de la consommation. Elle s'imposera d'elle-même", déclare Philippe Chartier, conseiller Stratégie & Recherche du syndicat, rejoint par Arnaud Mine, le président de SER-Soler. "L'autoconsommation va obliger à reconsidérer le coût du photovoltaïque, car, consommé localement, il ne faudra plus lui attribuer des coûts qui ne sont pas les siens !". Une remarque qui s'adresse aux gestionnaires de réseaux et à la CRE et son mode de calcul de la CSPE. "Maintenant que nous atteignons la parité réseau, l'autoconsommation, dans les îlots ou zones urbaines, devient souhaitable et bénéficiera à l'ensemble des parties. Elle sera, dans un premier temps, plus facile à exploiter dans le tertiaire et les locaux commerciaux, occupés en journée au moment où le photovoltaïque produit", renchérit Eric Vincent, directeur Energies Renouvelables chez GDF Suez.

 

Présent lors du colloque, Philippe de Ladoucette, président de la Commission de régulation de l'énergie, ne ferme pas la porte à l'autoconsommation, mais tempère toutefois : "Il faut réfléchir à l'autoconsommation, cela n'aurait aucun sens de ne pas le faire. Mais comment traiter le stockage de l'énergie ?". Car c'est bien là que le bât blesse : qu'en sera-ti-il du coût des solutions de stockage de l'électricité en vue de sa réutilisation ultérieure ? Des solutions de batteries existent mais elles entraînent un surcoût. C'est pourquoi des investissements pour augmenter les capacités du réseau de distribution à accueillir les EnR seront nécessaires : "Environ 100 milliards d'euros d'ici à 2030", chiffre Gilles Gallean d'ERDF. "Mais la mise en place de smart grids, ces réseaux intelligents, pourrait permettre d'économiser 5 à 10 % sur cette facture".

 

Un cadre réglementaire à définir
"Il faut encore des travaux de R&D et innovation, mais les offres sont déjà là", conclut Arnaud Mine. "Seule la mise en place d'un contexte réglementaire pour l'autoconsommation est manquante, pour les bâtiments, les réseaux, les tarifs et le système des certificats d'économie d'énergie. Car, si le chauffe-eau solaire est éligible aux CEE, pourquoi les panneaux photovoltaïques conduisant à des non-consommations sur le réseau ne le seraient-ils pas ?", se demande le président du SER-Soler. Afin de faciliter le déploiement du parc photovoltaïque en autoconsommation (donc hors des tarifs d'achat), il faudra donc définir le statut et les droits du producteur-consommateur pouvant également devenir fournisseur à l'échelle limitée d'un quartier. Deux mécanismes pourront être envisagés : une prime au kWh autoconsommé, ou un mécanisme de "net metering" où les flux entrants et sortants sont comparés sur une période de temps. Pour les collectivités locales, une réglementation incitative à une synchronisation intelligente de la consommation et de la production pourrait aussi apporter des avantages et limiter le nombre de pics de la demande. Autant de pistes qui seront étudiées prochainement par les professionnels et les pouvoirs publics.

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