RECYCLAGE ET RÉEMPLOI. Alors que les milliards d'euros du plan de relance vont donner lieu à des milliers de chantiers de rénovation énergétique, Nathalie Tchang, présidente du bureau d'études Tribu énergie, exhorte les acteurs à ne pas oublier les enjeux d'économie circulaire.

L'économie circulaire serait-elle en passe de devenir une constante dans les appels d'offres publics ? Des propos tenus par Nathalie Tchang, présidente du bureau d'études Tribu énergie, semblent en tout cas aller dans ce sens. Elle intervenait récemment lors d'une conférence organisée par la société Tarkett, spécialisée dans la fabrication de revêtements de sol, au sujet du recyclage et réemploi des matériaux. "Les aménageurs nous demandent, de plus en plus, d'être moteurs sur ce point, de proposer des solutions", affirme-t-elle. "Ces derniers mois, nous avons vu passer des cahiers des charges fixant des objectifs ambitieux, parfois même peu raisonnables." Ainsi, certains donneurs d'ordre exigent pour un projet l'utilisation d'au moins 70% de produits disponibles dans un rayon de moins de 150 kilomètres. "Parfois, on nous interdit aussi l'utilisation de produits hors frontières européennes", continue Nathalie Tchang. Preuve en tout cas que l'idée d'économie circulaire et locale entre dans les mœurs du secteur. La spécialiste de l'efficacité énergétique, responsable du groupe de travail "modélisateur" en vue de la RE2020, estime que cette pression imposée par les maîtres d'ouvrage est quoi qu'il en soit une "bonne chose". Cette tendance existe également, bien que moins généralisée, du côté des promoteurs privés. La multiplication des labels en tous genres est d'ailleurs une preuve de la montée en puissance de ces concepts sur le terrain.

 

Intégrer l'économie circulaire dans les projets de rénovation

 

Le neuf n'est évidemment pas le seul marché concerné. Alors que les milliards d'euros du plan de relance devraient se concrétiser, dans les mois et années à venir, en milliers de travaux de rénovation énergétique, Nathalie Tchang espère que le secteur ne "ratera pas le coche de l'intégration de l'économie circulaire dans la réhabilitation énergétique". "Les industriels doivent pouvoir proposer des solutions permettant de récupérer les chutes, pour que cela ne parte pas en enfouissement, ce qui serait dramatique."

 

 

C'est dans cette dynamique que Tarkett souhaite s'inscrire, assure Myriam Tryjefaczka, directrice du développement durable au sein de la société. "Nous avons adopté la logique 'cradle to cradle' depuis 2011", pose-t-elle tout d'abord - pour rappel, ce principe signifie qu'un produit en fin de vie doit pouvoir être à nouveau utilisé. "La quasi-totalité de nos produits (98%) ont été évalués par l'agence du déploiement de l'économie circulaire à impact positif. Nous possédons aujourd'hui une compréhension complète de l'impact de ceux-ci sur la santé, l'environnement, l'équité sociale, et ce à chaque étape de leur cycle de vie." Aujourd'hui, Tarkett utilise 12% de matériaux recyclés dans ses procédés de fabrication (utilisation de craie, restes de filets de pêche, films PVB de pare-brise...), et vise les 30% en 2030. L'entreprise a également fourni un effort sur la toxicité des produits, un point trop souvent négligé, assure Nathalie Tchang. "Nous avons trop tendance à croire que si la marque NF ou CE est présente sur un produit, c'est qu'il ne représente pas de risque : ce n'est pas le cas !"

Des fiches FDES parfois renseignées "à la louche"

 

Enfin, Nathalie Tchang insiste sur l'importance de raisonner en coût global, sur le long terme, en misant sur la durabilité des produits, plutôt qu'à court terme. Elle met d'ailleurs en doute la crédibilité de certains éléments contenus dans les fiches de données environnementales et sanitaires (FDES) sur ce point. Certains produits devraient ainsi être remplacés plus souvent que ne le dit leur fiche. "Les durées de vie, dans les FDES, sont parfois évaluées 'à la louche', et leur fiabilité n'a pas toujours été testée de manière fiable sur des bancs d'essai. Il est pourtant très important de raisonner en coût global, et c'est une chose qu'il nous est permis de faire avec les outils et les informations mises à disposition par Tarkett."

actionclactionfp