La chaleur rejetée par les ventilateurs des groupes frigorifiques classiques, généralement perdue, peut être récupérée par un module afin de produire de l'eau chaude sanitaire. Détails avec Arnaud Deridot, responsable technique d'Ecolactis, l'entreprise bourguignonne qui l'a conçu et qui le commercialise.

Réutiliser la chaleur perdue produite par les groupes frigorifiques est une idée pleine de bon sens, qui répond aux exigences du développement durable autant que de la logique économique. Techniquement cependant, la mise au point d'un système efficace et performant, relève du défi. C'est une entreprise de Bourgogne, Ecolactis, qui a tenté de le relever. Arnaud Deridot, le responsable technique, nous raconte : "Laurent Decaestecker, le fondateur, a travaillé pendant plus de 15 ans dans les tanks à lait réfrigérés. Dans ce cadre, où il était chef de produit, il s'est penché sur la récupération de chaleur de ces cuves, car aucune solution réellement satisfaisante n'existait". Fort de son expérience, ce dernier fonde sa propre société en 2008 et développe un produit sur la base de la technologie "Dual condense", brevetée en 2009. La petite entreprise collabore avec le Cemagref d'Antony (aujourd'hui Irstea) pour mener des essais en laboratoire et optimiser le procédé.

 

Techniquement, la solution baptisée Boostherm, a la particularité de récupérer toute la chaleur rejetée par les condenseurs des systèmes frigorifiques pour les chambres froides. "Le module capte les calories dont il faut se débarrasser, en se substituant aux ventilateurs et en s'interfaçant entre compresseur et condenseur", détaille Arnaud Deridot. La chaleur est récupérée par un échangeur double peau, contenant un fluide caloporteur séparé de l'eau à préchauffer par deux parois. "Le fonctionnement est dissocié en deux cycles distincts. Le mode 'condenseur à eau', où les ventilateurs sont coupés ce qui permet de préchauffer rapidement un volume d'eau chaude sanitaire contenu dans un ballon tampon ; et le mode 'désurchauffeur' une fois que ce volume est préchauffé à 55 °C, on assiste à une remise en marche de la ventilation", précise le responsable technique.

 

Obtenir de l'eau chaude sanitaire gratuitement

 

Boostherm
Boostherm © Ecolactis
La particularité du système, qui se pilote seul grâce à des capteurs électroniques et des températures de consigne, est d'être beaucoup plus efficace qu'un système désurchauffeur seul, qui ne récupère en général que 10 à 20 % de la chaleur, selon les conditions extérieures. "Notre système condense avec l'eau froide du réseau de chauffage, dont la performance est constante toute l'année, et indépendante de la météo", assure le spécialiste. En mode "condenseur à eau", l'efficacité atteindrait les 100 %. Le bilan énergétique global est donc intéressant, puisque l'installation permet de produire gratuitement de l'eau chaude sanitaire. Un atout pour certains types d'utilisateurs, comme les restaurateurs, les artisans bouchers ou les traiteurs. Forte de plusieurs centaines d'installations, l'entreprise s'est attaquée au marché des fastfoods et des installations de puissance plus importante. Elle a notamment décroché un contrat d'équipement pour 155 supermarchés Casino dans le cadre d'un programme national. "Cette année, nous avons une quarantaine de dossiers d'autres chaînes de distribution à chiffrer et nous espérons commercialiser 300 systèmes Boostherm de petite et moyenne puissance", nous explique le responsable.

 

Autre avantage, dans le cas d'une réfrigération à eau perdue (l'eau utilisée pour dissiper la chaleur étant simplement rejetée dans les égouts), le système d'Ecolactis permet de réduire le débit de liquide utilisé dans des proportions importantes. La facture d'eau pourrait être divisée par deux, tout en obtenant gratuitement 80 à 100 % de l'eau chaude sanitaire. Cependant, dans le cadre de la RT2012, la solution n'est pas reconnue : la récupération de chaleur n'est pas valorisée, ce qui empêche l'entreprise de se positionner sur des petits projets neufs et la cantonne à des rénovations. "La pompe à chaleur est privilégiée dans le mode de calcul alors qu'elle est moins rentable sur certaines applications", regrette Arnaud Deridot, qui met en avant une réduction de la facture énergétique liée à la production d'ECS et une baisse des nuisances sonores, grâce à l'arrêt fréquent des batteries de ventilateurs.

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