Le Conseil d'analyse économique (CAE) propose de réformer en intégralité le système d'apprentissage en France. Les auteurs d'une note publiée mercredi 7 janvier dénoncent "une gouvernance opaque et un blocage du système dus au rôle central que joue l'Education nationale." Découvrez leurs quatre préconisations qui pourraient figurer dans la future loi portée par François Rebsamen sur le marché du travail.

La nouvelle note du Conseil d'analyse économique (CAE), qui dépend de Matignon, dévoilée ce mercredi 7 janvier par France Info, dresse un tableau sévère de l'apprentissage en France. En effet, les deux auteurs, Pierre Cahuc et Marc Ferracci avec les contributions de Jean Tirole, prix Nobel d'Economie, et Etienne Wasmer plaident pour une réforme en profondeur de la formation professionnelle en alternance et soulignent le "dysfonctionnement" du système dans son financement, sa gouvernance et son offre de formations.

 

Le constat est clair : les formations en alternance et les moyens qui lui sont accordés ont connu un "développement significatif depuis 25 ans", mais sans que leur efficacité soit tangible. Le CAE rappelle que les deux types de contrat d'alternance, contrats d'apprentissage ou contrats de qualification, ont vu leurs effectifs fortement augmenter et le nombre de salariés concernés est passé de 440.000 à 540.000 de 1990 à 2013.

 

Toutefois, la note du CAE souligne un repli observé depuis 2010. Le taux de la France (2,3 %) "reste nettement plus faible que dans des pays qui réussissent à intégrer efficacement les jeunes dans l'emploi et où la formation en alternance joue un rôle important".

"L'essor de l'apprentissage depuis dix ans a surtout profité aux apprentis de l'enseignement supérieur"

Par ailleurs, le financement de l'apprentissage a bondi de 51 % entre 2000 et 2012, avoisinant les 6 milliards d'euros à la fin des années 2000, résultat d'une "importante contribution financière de l'État, des régions et des entreprises". "De fait, l'essor de l'apprentissage depuis dix ans a surtout profité aux apprentis de l'enseignement supérieur, tandis que le nombre d'entrées en apprentissage de jeunes sans aucun diplôme a diminué", soulignent les auteurs du rapport.

"Un système complexe"

Le Conseil d'analyse économique pointe également la complexité du système d'alternance français, "caractérisé par un grand nombre d'intervenants"  : Éducation nationale, régions, chambres de commerce, État, partenaires sociaux… Leurs "actions sont peu ou mal coordonnées", ce qui "occasionne des frais de gestion importants et une allocation de ressources peu efficace".

 

Ainsi, "une part importante de la taxe d'apprentissage ne finance pas l'apprentissage", poursuit la note. Pour rappel : 38 % de cette taxe sont affectés à l'enseignement professionnel et technologique hors apprentissage. Enfin, le contenu des formations d'apprentissage est dans le viseur du CAE. "Le rôle central de l'Éducation nationale ne permet pas de faire évoluer suffisamment la carte des formations en fonction des emplois, ni d'assurer un contrôle qualité efficace", ajoute la note.

Quatre recommandations

Parmi leurs recommandations qui pourraient figurer dans la future loi portée par François Rebsamen sur le marché du travail, le CAE formule quatre recommandations pour "un système d'alternance plus efficace". Ce dernier doit ainsi être "profondément revu pour le rendre plus attrayant, à la fois pour les jeunes et pour les entreprises". La première recommandation serait de "fusionner l'apprentissage et le contrat de professionnalisation" et d'"unifier leurs financements" pour davantage de clarté et de lisibilité, et enfin simplifier la collecte en substituant les URSSAF aux organismes collecteurs de la taxe d'apprentissage.

 

 

Il faudrait d'après les auteurs également instaurer un système unique de certification des formations en alternance via des agences commanditées par une commission nationale réunissant toutes les parties prenantes : branches professionnelles, Education nationale, ministère du Travail, experts indépendants.

 

Les deux dernières pistes concernent essentiellement le financement. La première, d'après la note, consisterait à "moduler les subventions en fonction des diplômes" et à "moduler les contributions des entreprises en fonction du devenir de leurs alternants". Enfin, les économistes, auteurs de la note, souhaitent que les "moyens publics" soient "concentrés sur l'insertion professionnelle des jeunes peu qualifiés" et enfin "réduire la part des matières académiques dans les diplômes de CAP et en promouvant le tutorat des apprentis."

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