Un mois après la parution du «Livre Blanc des architectes», l’Ordre et les syndicats professionnels restent mobilisés en cette veille d’échéances électorales.

Le samedi 7 février 2004, 1.200 architectes venant de toute la France avaient répondu à l’appel commun du Conseil National de l'Ordre des Architectes (CNOA), du Syndicat de l'Architecture et de l’Union Nationale des Syndicats Français d'Architectes (UNSFA). Réunis au palais de la Mutualité à Paris, ils avaient débattu des 30 mesures destinées à revaloriser l'exercice d'une profession fortement fragilisée, et présentées dans le «Livre Blanc». Formulées en commun après une réflexion de longue date, ces mesures demandent aux élus et aux pouvoirs publics une véritable réforme du mode d'exercice du métier d'architecte. Revendiquant une politique basée sur l'exigence d'une architecture de qualité au service de tous les citoyens, ces propositions pourraient prendre effet immédiatement selon Jean-François Susini, président du Conseil National de l'Ordre des Architectes. Car ce dernier explique notamment qu’avec la mise en place du système de partenariat public-privé (PPP), «c’est la fin de la création et de la recherche architecturale», et que «l’on est en train d’étouffer 30.000 architectes».

«La privatisation annoncée du financement, de la conception, de la réalisation et de la gestion des bâtiments publics n'apporte aucune garantie de qualité du service rendu aux citoyens et privera les architectes de l'indépendance nécessaire à l'exercice de leur métier», annoncent les trois organisations. Selon elles, le discours entourant le PPP comporte de faux arguments concernant les coûts et les délais. Ce système qui pourrait se révéler comme un accélérateur d’affaires semble plutôt assujettir les communes à des endettements plus importants et à des procédures de réalisations allongées. N’avoir plus qu’un seul interlocuteur donne aux communes une impression de simplicité, mais dialoguer avec un entrepreneur n’est par la même chose qu’avec un architecte. Chaque changement au contrat d’un entrepreneur se gère plus difficilement qu’avec un architecte, notamment au point de vue financier, affirment-ils.

Se passer d’un architecte, pour Patrick Colombier, président du Syndicat de l'Architecture, ce serait «un drame car on replongerait dans des modèles de bâtiments élaborés par les grands groupes de BTP, à choisir sur catalogue comme les crèches, les gendarmeries, les prisons ou les salles des sports, et donnant l’illusion de délais de constructions réduits». Pour lui, c’est la banalisation de l’architecture et de l’espace public, la non intégration au paysage et à la culture locale. L’architecture, aujourd’hui rattachée au Ministère de la culture, est considérée comme un art mais concerne la vie et la ville au quotidien. Elle dépend de la responsabilité des élus et ne doit pas être abandonnée car elle est un service public. Et même si les villes et la presse présentent majoritairement les 5 % d’architecture liés aux concours internationaux, 95 % de la production se fait dans l’urgence, précisent-ils.

François Pélegrin, président de l’Union Nationale des Syndicats Français d’Architectes, trouve surprenant de voir comment «la ménagère a compris que pour avoir une viande de qualité il fallait ajouter quelques centimes d’euros, mais que dans le bâtiment il est difficile d’augmenter de quelques euros le prix du mètre carré pour obtenir une véritable qualité architecturale». Faire la distinction entre construction et architecture est une question de sensibilisation culturelle et de pédagogie. François Pélegrin estime «qu’il faut donner les moyens à la matière grise et pour cela se battre sur le terrain politique. C’est une question d’intelligence et pas de coup de force».

Même si les trois organisations d’architectes ne sont pas d’accord sur tout, elles mènent un combat collectif pour l’amélioration de l’habitat et de l’équipement de la ville chaque jour. Elles militent également pour la création d’une licence d’exercice d’une durée de 2 à 3 ans garantissant une meilleure insertion professionnelle pour les étudiants en architecture. Un sujet sur lequel reviendra prochainement Batiactu.

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